Le patron de United Autosports est au cœur de l’actualité de l’Endurance en ce moment. En effet, il a annoncé il y a peu son passage de la Ligier JSP217 à l’ORECA 07 pour la saison WEC à venir. Nous avons pu le rencontrer entre les 4 Heures de Barcelone et le Prologue WEC !
Avant d’aborder la saison 2019/2020 du WEC, comment se sont passées vos dernières 24 Heures du Mans ?
« Nous n’avions eu qu’une seule invitation lorsque la liste officielle des 24 Heures du Mans est sortie. La 2e est arrivée plus tard et ce fut une vraie surprise. Cette course demande beaucoup d’anticipation et de préparation en amont surtout lorsque vous apprenez tardivement que vous avez une 2e voiture au Mans. Ce ne fut pas facile, mais comme vous avez pu le voir, pas impossible. De plus, nous avons été placés dans des stands temporaires ce qui a créé des soucis supplémentaires à gérer comme celui de l’essence. Ce fut donc un vrai défi d’être prêt pour Le Mans, puis pendant la course, ce fut un challenge « normal » comme toutes les éditions. Nous avons eu un problème technique avec la #32 (un alternateur) et la #22 a terminé 4e, au pied du podium. La course pour cette dernière fut presque limpide, pas de souci en dehors d’une portière.
Avec un peu de recul, en analysant cette course, je pense que c’est le meilleur résultat que nous pouvions obtenir avec le rythme que nous avions en piste. Ce n’est un souci d’équipage, nous avons juste tiré la quintessence de notre package équipe / pilotes / châssis. Quatrième est toujours une place difficile, un cran au dessus et tout le monde était content et ouvrait les bouteilles de champagne. Là, nous sommes juste rentrés à la maison, mais c’est comme cela, nous savons que ce fut plus douloureux pour les écuries qui ont fini derrière nous ou qui ont abandonné ! »
Votre intérêt pour le WEC était évident avant Le Mans, mais depuis, vous avez annoncé que vous alliez changer de châssis. Pourquoi ce choix ?
« Tout est parti de ce que nous avons vu au Mans. J’ai particulièrement observé tout ce qui s’est passé pendant cette édition 2019, regardé en détail les temps au tour, les différents secteurs. Ce fut une course douloureuse à regarder car, comme je l’ai dit, je ne vois pas ce que nous avons mal fait. Nous avons eu un drive through qui nous a coûté quelques secondes et cette porte sur la #22. C’est tout ! Ce qui est certain, c’est que notre rythme n’était pas assez bon. J’estime que nos mécaniciens et ingénieurs ont fait du super travail ! Je ne changerais pour rien au monde mes pilotes. Ceci m’a donc amené à me dire qu’il fallait essayer autre chose pour voir si mon analyse était la bonne : notre voiture a manqué de performance. Nous ne savions pas quelle réponse apporter et cela nous a poussés à faire ce changement. Nous l’avons vraiment fait à la dernière minute, nous étions déjà engagés en WEC, mais la première course n’a pas encore eu lieu. Il était donc encore temps de changer. Le WEC présente d’autres défis que ceux que nous connaissons déjà. Il y a une restriction sur le nombre de journées d’essais privés, seulement un petit nombre. Le Prologue, ce sont deux jours d’essais qui ne rentrent pas dans ce quota. Il fallait absolument faire ce changement de châssis avant le Prologue si nous voulions rouler avec cette nouvelle auto. C’était très important car nous savons que nos concurrents roulent avec des 07 depuis trois ans, qu’ils ont une vraie expérience avec cette auto et que ce sont de très bonnes équipes. Nous devons donc essayer de refaire notre retard le plus vite C’est pourquoi nous avons pris une décision très rapide après les 24 Heures du Mans, c’est fait! Je ne sais pas maintenant si c’est la bonne ! »
Quelles sont vos ambitions pour votre première saison en WEC ?
” A court terme, je dirais que nous souhaitons apprendre le plus vite possible avec cette ORECA 07. Sans cela, pas d’objectif plausible possible. Comme je l’ai dit, il y a beaucoup de très bonnes équipes avec de super pilotes. Cependant, je ne suis pas effrayé par ce championnat, nous avons déjà roulé contre des équipes WEC aux 24 Heures du Mans lors des trois dernières années. Sur certaines courses, cela ressemblera aux épreuves de l’Asian Le Mans Series, c’est-à-dire avec des voitures arrivent assez tard sur le circuit et vous n’avez que quelques jours pour les préparer. Nous sommes juste excités à l’idée de commencer ! »
Avez-vous l’intention d’engager des ORECA 07 aussi en ELMS et peut-être même avant la fin de la saison 2019 (l’équipe ayant trois châssis à disposition) ?
« Nous ne savons pas pour le moment, tant que nous n’avons pas répondu à la première question ! Est-ce notre forme actuelle, notre position actuelle, notre niveau actuel est le résultat maximum de la combinaison équipe / pilotes / châssis ou allons-nous franchir un cap avec l’ORECA 07 ? Si je dis maintenant que nous allons changer, cela veut dire que je prédis déjà que nos résultats vont s’améliorer. Nous espérons que nous allons progresser, mais pour le moment, nous n’en savons absolument rien, donc nous avons prévu de rester avec les Ligier en ELMS. »
Depuis, Ligier Automotive a mis un terme à ses accords de distribution avec United Autosports. Déçu par cette décision ?
« Bien sûr, je suis déçu par cette nouvelle car nous avons une relation fantastique avec Ligier, mais aussi de super résultats ensemble. Nous avons partagé des moments particuliers avec eux. Nous avons gagné des courses, fait des podiums avec les voitures Ligier, avons été champion European Le Mans Series à deux reprises. Nous avons tissé un lien qui est assez inhabituel en sport automobile. Nous étions vraiment proches et, d‘un point de vue humain, c’est terriblement décevant de perdre cette relation. Cependant, elle reste amicale, j’ai d’ailleurs mangé avec Jacques et Pierre (Nicolet) hier soir. Donc déçu oui, surpris pas vraiment ! Je respecte la décision prise et en même temps, comment pouvez-vous être agent Ligier lors que vous roulez avec un châssis concurrent ? Même si United Autosports et Ligier UK étaient séparés, nous avions construit une réputation autour de notre nom en faisant rouler les produits que nous vendons, cette décision casse, bien entendu, ce processus.»
Allez-vous aussi disputer l’Asian Le Mans Series ?
« Je pense que c’est assez improbable avec la LMP2 à cause du WEC. Au sein de United Autosports, nous avons trois équipes complètement indépendantes : celle de LMP2, une pour les LMP3 et une pour la Michelin Le Mans Cup. Donc envoyer l’équipe LMP2 en Asian et en WEC me semble difficile même si nous faisons courir une seule voiture à chaque fois. Par contre, l’Asian Le Mans Series en LMP3 est possible car une de nos équipes peut y aller et gérer cela. Nous discutons avec des pilotes et voyons aussi pour le budget, nous travaillons dessus actuellement ! »
L’an dernier vous aviez évoqué le DPi. Où en êtes-vous ?
« Nous n’avons pas changé d’avis sur cela, mais il n’y a pas d’opportunité pour le moment pour y aller. Nous sommes prêts à ouvrir des discussions, mais pour l’instant, rien de concret. Nous avons vraiment envie de faire quelque chose en IMSA, nous avons des ateliers, des camions transporteurs, de l’équipement aux USA. »
Que pensez-vous de l’Hypercar ?
« Je n’en sais pas plus sur l’Hypercar que ce que j’ai pu entendre lors de la conférence de presse la veille des 24 Heures du Mans. Pour être honnête, nous avons été très occupés depuis Le Mans par tous nos différents projets. Nous n’avons donc pas regardé attentivement le nouveau règlement Hypercar ! »
Vous pourriez aussi engager de nouveau des GT3. Qu’en est-il ?
«Nous avons été impliqués en GT auparavant (avec Audi et McLaren, ndlr). Nous aimons la Blancpain GT Series et j’ai, pour ma part, une vraie admiration pour l’organisation de Stéphane Ratel. Cette série est solide, en particulier, la partie Endurance. Nous regardons cela de près, mais encore une fois, il faut que ce soit à très haut niveau, c’est-à-dire en partenariat avec un constructeur. A l’heure actuelle, il n’y a pas de réelle discussion à ce niveau là, même si notre intérêt pour ce championnat est fort. Nous allons attendre que le Prologue se passe et nous verrons ensuite.»