Deuxième partie de notre article consacré à Pierre Yver (ci-dessus, assis entre les deux Porsche)
A partir de 1994, vous avez quitté les Protos pour passer aux GT avec l’équipe Larbre de Jack Leconte et Jean-Luc Chéreau. Ce passage aux GT a-t-il été un choix délibéré ? Que préférez-vous, les Protos ou les GT ?
« La belle époque des Groupe C et, surtout des 962, était révolue. Les grosses usines sont arrivées et mon sponsor Primagaz, maintenant entre les mains d’un groupe hollandais, voulait donner une autre image de la compétition, disons plus écolo. Laurent Bourgnon a su en profiter. C’est ainsi que, grâce à lui, Primagaz allait truster les victoires sur les Transats. Bravo mon ami Laurent, tu nous manques !
J’ai eu la chance de rencontrer une autre personne, Jean-Luc Chéreau, devenu un grand ami. Nous avons monté ensemble un programme de Carrera Cup, puis ensuite, avec Larbre Competition, le BPR et Le Mans en GT. Le choix du GT était évidemment d’ordre budgétaire. Personnellement, je préférais le Proto. Au Mans, il est plus facile de rouler vite avec un Proto car vous doublez les GT et c’est vous qui imposez le rythme. En GT, vous devez sans cesse surveiller les dépassements des Protos. Je disais souvent : en GT, vous regardez plus souvent derrière que devant…Qu’importe, cela me permettait de continuer à disputer Le Mans dans une bonne écurie, et c’était cela l’essentiel. «
Dans vos 22 participations, quels sont les coéquipiers qui vous ont le plus marqué ?
« J’ai eu un certain nombre de coéquipiers, tous ont rempli leur rôle avec sérieux et bonne humeur. Lorsque j’avais ma propre écurie avec les Rondeau, c’était un choix difficile car je devais choisir le coéquipier performant, mais pas trop, pour ne pas mettre la voiture dans le rail et, en même temps, celui qui pouvait apporter un petit budget. Cela s’est toujours bien passé.
L’équipier qui m’a le plus marqué, c’est sans doute Jürgen Lässig, mon fidèle équipier sur la 962, un vrai gentleman, jamais stressé, rapide et très sympa. Ce n’est pas toujours le cas dans les écuries de pointe allemandes. L’autre fidèle coéquipier qui m’a surpris, c’est Jean-Luc Chéreau, un autre gentleman. Il a très vite appris et était très rapide et sûr sous la pluie. »
Y-a-t-il une édition des 24 Heures du Mans pour laquelle vous avez des regrets ?
« Lorsque l’on finit, en 1987, la plus grande course du monde à la deuxième place, on a forcément des regrets, mais la Porsche d’usine était forcément plus rapide, et en plus avec des pilotes pro…Deuxièmes, c’était de toute façon comme une victoire pour nous.
Autres regrets : l’époque des Rondeau avec plusieurs abandons dus à la fragilité du moteur Cosworth, sauf avec la M 379 (l’ancienne Le Point ITT qui avait remporté la course en 1980), une des deux Rondeau à l’arrivée avec le bon vieux moteur 3 litres en 1982 . »
Quelle voiture auriez-vous aimé piloter au Mans, en dehors de celles que vous avez conduites. Quelle est celle que vous avez préféré ?
« Je suis allé en spectateur dans différentes portions du circuit pour voir l’évolution des voitures ces dernières années, disons au moment du duel Porsche-Toyota. C’est hallucinant de voir les vitesses de passage en courbe, les freinages et les accélérations. J’aurais évidemment aimé conduire une de ces voitures, mais je pense que l’entraînement est tout autre. Nous avons connu une époque formidable, il est impensable maintenant d’envisager une deuxième place avec une voiture privée et des gentlemen drivers.
Celle que j’ai préférée, c’est sans hésiter la 962, je dirais même celle que j’ai pilotée au Norisring avec les rapports ultra courts et une puissance à vous tordre le cou pour une semaine !!! »
Rondeau, Courage, Porsche, en quoi étaient-elles différentes ?
« La Rondeau était une excellente voiture pour l’époque. Son seul point faible était le moteur, pas vraiment adapté au Mans.
La Courage m’a agréablement surpris, avec le moteur Porsche similaire à celui de la 962.
La Viper chez Oreca était une GT intéressante à conduire, à part la chaleur qui régnait à l’intérieur. les Porsche GT2 n’étaient pas forcément faciles pour aller vite, mais elles étaient passionnantes. »