Le champion de Handbike, Alex Zanardi, récupère lentement ses fonctions vitales, dans un processus qui ressemble à une ascension de l’Everest. Voir, il voit. Il entend, il entend. Il ne peut toujours pas parler car, par précaution, ils gardent le trou dans sa trachée ouverte, sa boîte crânienne a été réparée fragment par fragment. Et le cerveau a recommencé à tisser des liens, à retrouver une à une les merveilleuses fonctions dont il est capable. En bref, Alessandro Zanardi est vivant et se bat comme lui seul peut le faire.
Le quotidien italien Corriere della Sera a publié un article très poignant sur Alex Zanardi, dont nous vous livrons quelques passages. L’article italien est signé Carlo Verdelli :
Avec le double champion CART, l’impossible devient possible. Trouvant sa force on ne sait où, le recordman mondial des résurrections, gravit lentement le deuxième Everest qui lui est soudain apparu et c’est l’une des rares bonnes nouvelles d’une très mauvaise année. Son premier Everest est d’être sorti vivant d’un accident en Allemagne (en 2001 à 35 ans) où il avait perdu ses deux jambes. Cependant, il est devenu encore plus fort et plus champion en se jetant comme un fou dans le monde du handibike. Quatre médailles d’or et deux d’argent aux Jeux olympiques, une série de titres, une réputation de monument vivant à ne jamais rien lâcher, l’intention de relever un autre défi, Tokyo 2021, les premiers Jeux après le virus de la Covid-19 à l’âge de 54 ans.
Puis c’est la rencontre et l’impact avec un camion sur une route de la campagne siennoise dans un virage aveugle, le 19 juin dernier lors d’une sortie d’entrainement. Aussi maudite et imprévisible que sa première expérience, elle le met face à la mort.
Cette fois, il est condamné, les contes de fées n’accordent pas de rappel. Les premiers sauveteurs secouent la tête. Mais son cœur bat encore, sa femme Daniela se jette sur son mari comme pour empêcher son âme de s’enfuir. Elle parvient à le maintenir conscient, malgré le chagrin de le retrouver, une fois de plus, marqué par le destin. Mais c’est précisément à partir de cet instant que Alessandro Zanardi repart pour sa troisième vie. Peu de gens ont espoir en ces heures, dans son état. Mais la première nuit passe, puis la deuxième, la troisième.
Une fois de plus, et pour la deuxième fois, Alex Zanardi fait tout pour ne pas décevoir sa famille. Comme les héros de bandes dessinées pour enfants qui se relèvent après chaque coup dur, Alex Zanardi s’engage dans une autre bataille féroce et invisible avec le destin. Il n’abandonne pas même lorsque, après les efforts des premiers mois dans l’autre monde, une infection le ramène à la case départ. D’autres opérations, d’autres hôpitaux, le San Raffaele de Milan recompose avec une patience et une habileté infinies le puzzle d’un homme cassé. Chaque chirurgien s’investit à fond, une vague d’affection populaire se fait sentir autour de lui et il y a une femme, Daniela Zanardi, qui a épousé son Alessandro en 1996 et qui, depuis 24 ans, est à ses côtés pour le meilleur mais aussi pour le pire.
Vous ne trouverez pas d’interview avec elle, de photo posée, ni d’apparition à la télévision. Elle est là pour lui et pour leur Niccolò, leur fils, silencieuse, infatigable, inaccessible, non par arrogance mais par modestie. Ils se sont rencontrés sur les circuits de Formule 3. Daniela était la directrice d’une équipe, elle était très compétente et les courses étaient suivies depuis le mur. Même sang, mêmes passions, mêmes caractères, grand amour. C’est grâce à Daniela que le champion italien renait pour la deuxième fois après la tragédie allemande du Lausitzring. C’est grâce à Daniela que Zanardi est en route vers les starting-blocks de sa troisième vie. Il n’abandonne jamais, elle ne l’abandonne jamais. Ensemble, il n’y a pas d’Everest pour les décourager. La première question que Daniela a posée aux médecins après le dernier accident n’était pas “que va-t-il devenir, comment restera-t-il s’il survit, quel avenir a-t-il ? » Non, la première et dernière question était “pouvons-nous le sauver ? Alors, faites ce qu’il faut”.