On ne reverra pas Peugeot en Endurance dans les prochaines années même si le come-back de la marque au Lion en LMP1 a bien figuré dans les tuyaux. Peugeot a opté pour le WRX au lieu du Mans. S’il y a une personne qui connaisse tous les rouages des différentes disciplines du sport automobile, c’est bien Bruno Famin. Le patron de Peugeot Sport a officié en endurance, rallye, rallye-raid, course de côte, coupes de marques et maintenant le rallycross. Il n’a pas besoin d’avoir dirigé une équipe de F1 pour avoir une vision du sport automobile à 360 degrés. Malgré un emploi du temps bien chargé, Bruno Famin nous a accordé un entretien sur sa vision globale du sport automobile du côté constructeur.
Est-il encore judicieux pour un constructeur généraliste de faire du sport automobile ?
“D’un point de vue constructeur, le sport auto se rationalise. On peut même dire qu’il gagne en sens. De nos jours, on lance un nouveau programme que s’il colle à ce que la marque a à raconter. On a tous fait beaucoup de progrès dans ce sens. Il faut que la marque s’en serve pour raconter quelque chose. Dans le cas de Peugeot, j’ai deux expériences. La première est le rallye-raid qui a accompagné les campagnes SUV 2008 et 3008 au sein des deux piliers que sont le Dakar et le Silk Way Rally. Ce programme nous a permis de commercialiser nos produits. Maintenant que l’offensive SUV est lancée, on passe par autre chose.”
Ce “autre chose” se nomme World RX ?
“Il faut tenir compte de la transition énergétique. Une des autos qui traduit le plus cela est la nouvelle génération de 208. Le rallycross doit se mettre à l’électrique à l’horizon 2020. Il y a un vrai sens pour la marque. Le programme sportif doit être un programme de la marque. Le temps où on pouvait faire quelque chose dans son coin est révolu. Un des arguments était de passer en premier lieu par la case hybride.”
C’est aussi ce qui a pesé dans la balance face à un retour possible en LMP1 ?
“Il faut faire en sorte de dépenser de l’argent là où il y a du sens. Le ‘Road Relevant’ (pertinence à la route, ndlr) est un terme un peu galvaudé. Quand on voit le coût d’un développement aéro, qui en plus n’a rien de ‘road relevant’, on peut se poser la question de savoir si c’est bien utile. Même avec les nouvelles technologies, on peut réduire les coûts sur certains postes. Ce n’est pas antinomique. Personnellement, je ne crois pas au ‘cost capped’. C’est un serpent de mer dans pas mal de disciplines. Il est toujours possible de trouver des parades. Il faut rendre la discipline accessible à partir d’un certain budget pour pouvoir gagner. Si on peut gagner à partir de 30 millions, c’est très bien. Si quelqu’un veut en mettre 100 pour le même résultat, c’est son problème. Chez Peugeot, on a l’habitude de gagner avec un budget inférieur aux autres. Le sport automobile a un avenir s’il a du sens. Nous n’avions pas tant de choses à dire autour de la 908. Avec le rallye-raid et le rallycross, on a des choses à raconter. Nous sommes au service de ce que la marque peut raconter.”
On vous sent impatient d’en découdre en rallycross…
“La discipline gagne à être connue. C’est un peu l’école de l’excellence. C’est spectaculaire, il n’y a pas de décompte de points et le niveau est exceptionnel. Si on veut faire de la communication institutionnelle, on fait de la Formule 1 ou de l’Endurance. En revanche, si on veut faire de la communication autour du produit, on fait du rallye, du rallycross ou des coupes de marques. Le rallycross est l’antithèse du rallye-raid. C’est très excitant. Il y a six départs avec des manches de 2 minutes 30. On prend le départ des 24 Heures du Mans six fois par week-end.”
Vous croyez dans le développement de l’historique ?
“Il y a un vrai marché pour cela. Je suis ravi de voir l’engouement autour de la Peugeot 908 même si c’est de l’historique récente. Je ne suis pas persuadé que l’historique soit un vecteur de communication. En revanche, le côté business autour de l’historique se développe. Pour Peugeot Sport, la compétition-client est très importante. C’est le socle de notre activité. C’est le seul programme qui n’a jamais été interrompu.”
Volkswagen s’attaque à Pikes Peak. Peugeot pourrait s’y intéresser à nouveau ?
“Nous n’avons pas eu besoin de Volkswagen pour nous y intéresser. Peut-être que si le record est battu, cela fera une bonne raison d’y retourner (rires).”
Peugeot Sport reste à l’écoute de beaucoup de disciplines ?
“On est en veille sur tout. Nous sommes dans une période de mutation. Jusqu’à présent, je n’avais jamais vécu cela : technologie, e-sport, usage de la voiture. Il faut tous les modes de sport automobile. La période actuelle est incroyable, excitante et palpitante.”