Filipe Albuquerque fait partie des meilleurs pilotes d’endurance au monde. L’ancien pensionnaire d’Audi Sport compte désormais cinq participations en Sarthe et évolue cette année en LMP2 pour le compte de United Autopsorts. Le vainqueur des 24 Heures de Daytona 2018 pilotera la Ligier JS P217 #22 en compagnie de Phil Hanson et Paul di Resta.
Auriez-vous aimé rouler sur la ligne droite des Hunaudières sans les chicanes ?
« Je pense que cela aurait été ennuyant. Auparavant, vous sortiez du Tertre Rouge et jusqu’à Mulsanne, rien ne se passait. Il devait être plus difficile de faire la différence et cela se jouait plus sur la partie aérodynamique. Il n’y a pas de freinage, on ne peut pas se préparer à la moindre chose avant le virage de Mulsanne. Donc non ! »
Quelle est la décoration qui vous a le plus marqué aux 24 Heures du Mans ?
« Je dirais la Porsche 911 GT1 de 1998, celle avec laquelle Allan McNish, Stéphane Ortelli et Laurent Aiello ont gagné. J’adore cette auto et cette décoration Mobil 1. Lorsque j’étais enfant, je l’avais en miniature, en Scalextric. »
Quelle est votre recette pour garder la forme et être au mieux à l’approche des 24 Heures du Mans ?
« Je m’entraîne vraiment dur pendant l’hiver, mais rien ne remplace le fait d’être dans la voiture. Les essais et les courses sont le meilleur des entraînements. Cependant, il faut bien gérer la fatigue au Mans car le fait d’être à 300 km/h presque tout le temps demande beaucoup d’énergie. Les premiers double ou triple relais sont assez faciles, la 2e série est ok aussi, mais lors de la 3e, ça devient plus compliqué. Cela peut devenir difficile de freiner à 340 km/h. L’an dernier, j’ai fait une bêtise à l’une des deux chicanes, c’était la première fois. J’ai été distrait, je n’ai pas freiné aussi fort que d’habitude, j’ai raté le point de corde. J’ai traversé tout le bac à gravier, me dirigeant vers le mur, je pense l’avoir un peu touché mais j’ai juste été chanceux. Je me suis alors dit : « Allez, on se réveille et tu te concentres !” C’est comme cela que l’on peut compromettre un podium ou même une victoire. Finalement, l’an dernier, c’est mon coéquipier (Paul di Resta, ndlr) qui a crashé la voiture au niveau des Virages Porsche. Le petit matin est critique. A ce moment là, avant le crash, Phil Hanson était au volant, mais il n’était pas assez rapide. Nous avons donc mis Paul à la place. Les incidents arrivent, mais à cette période là, cela ne peut pas être une coïncidence. Une bonne préparation est donc nécessaire. C’est pourquoi j’intensifie la longueur et la fréquence de mes footings. Je fais environ 5 à 10 km / jour et là j’en fais plus, 10 kms devenant le minimum. Je vais plus souvent à la salle de musculation. J’«éclaircis » aussi mon agenda pour me reposer, dormir, je minimise les périodes d’interviews…Je commence cette grosse période d’entrainement au moment du mois d’avril. »
Quel est votre moment préféré de la semaine des 24 Heures du Mans ?
« Quand la course démarre ! Cela en est alors terminé de la pression et de l’attente. Je me rappelle de mon premier Le Mans (avec Audi). Je voulais juste me retrouver tout seul dans la voiture. J’avais eu tellement d’interviews, de demandes, d’autographes. C’est normal, ça fait partie du show comme la Parade que j’apprécie vraiment. La première fois, j’avais l’impression d’être un enfant à Disneyland. Quand je suis au départ, je suis seul, on ne demande plus rien et je dois juste me concentrer sur ce que j’aime le plus : piloter ! J’adore aussi la nuit car là aussi, je suis seul, tout le monde est endormi et c’est génial de rouler dans ces conditions là ! »
Quel sera le futur du Mans ? Le thermique, l’hybride, l’hydrogène, l’électrique ?
« Le futur du Mans, je ne le connais pas, je ne sais vraiment pas ce qui va se passer. Tout ce que je sais, c’est que je veux gagner Le Mans en LMP1 ou autre, qu’importe le nom de cette nouvelle catégorie. Je pense être au sommet de ma carrière en ce moment en termes de forme physique et je sens que je manque des opportunités. Je suis juste un peu en colère car je suis assez malchanceux. Dans une situation “normale”, je serai sans doute encore impliqué dans un programme Audi Sport. Les pilotes de mon age (il a 33 ans, ndlr) n’auront jamais la chance de faire si ce n’est 10% de ce qu’ont pu accomplir des Dindo Capello ou Tom Kristensen. Je suis dans la meilleure des catégories actuellement, le LMP2. Le GTE est aussi vraiment très bon, mais tout ça ne permet pas de jouer la victoire au général. »