Pour être transparent, on pensait qu’Endurance-Classic serait en ligne avant Amelia Island Concours d’Elegance mais on ne maîtrise pas tous les paramètres. Malgré ce petit contretemps, il n’était pas question de rater l’évènement une semaine avant les 12 Heures de Sebring.
En arrivant le samedi matin à 7h30 dans l’enceinte du Ritz-Carlton d’Amelia Island, on s’attendait à trouver un endroit encore inaccessible et gardé par de multiples vigiles vu les bijoux exposés. Pourtant, rien de tout cela. Une fois que vous avez montré votre pass média et que vous avez traversé la passerelle enjambant la route, vous arrivez dans une enceinte déserte. Certes, il est encore tôt. Vous marchez dans l’herbe encore humide de la fraicheur matinale et vous tombez nez à nez avec des joyaux de l’automobile. Combien sont-ils ? 100 ? 150 ? 200 ? Vous regardez autour de vous car vous pensez être dans un endroit interdit tant l’espace est quasiment vide de toute chaleur humaine. Vous ne trouverez pas la moindre personne pour vous parler de BOP, de catégorisation de pilotes. On ne vous dit pas ce qu’il faut écrire ou ne pas écrire. Pas de off record. Vous prenez le temps sans vous préoccuper de revenir au pas de course en salle de presse pour publier une info en exclusivité mondiale interplanétaire. Là, c’est juste ‘Elles et Moi’ pour reprendre le titre de la chanson de Max Berlin repris plus tard par Cicada.
On s’arrête volontairement devant les deux Porsche 917. Elles sont là devant moi, encore toutes embrumées de la fraîcheur de la nuit. Pas un vigile, pas âme qui vive autour, pas une barrière. Rien ! Je suis bien trop jeune pour avoir vu rouler ces 917 mais quand on pense à ce qu’elles ont apporté à la discipline et aux 24 Heures du Mans, il y a de quoi avoir quelques frissons. Plus tard dans la journée, seuls les passionnés s’arrêtent pour contempler ces deux oeuvres d’art, dont l’une (châssis #019) est encore dans son jus d’origine. Les autres passent sans s’arrêter comme je peux le faire devant les voitures d’avant-guerre. Chacun sa période, chacun son regard. Gijs van Lennep et Helmut Marko ont écrit l’une des plus belles pages des 24 Heures du Mans et ces deux Porsche 917 ‘Martini’ (la grise appartient à la Collection Collier, la blanche au Musée Porsche) sont là sans aucune protection.
En poussant un peu plus loin, les Lancia ‘Martini’ sont là elles aussi tout comme plusieurs prototypes de l’ère GTP IMSA. Elles sont rutilantes et ne demandent qu’à reprendre la piste. Plus tard dans la journée, le public est bien plus nombreux et on ne regarde plus ces autos de la même façon dans le brouhaha du samedi. Je pensais être l’un des plus jeunes de tous les spectateurs présents jusqu’à ce que je tombe sur un gamin de 5 ou 6 ans assis fièrement dans une Parnelli VPJ-1 IndyCar de 1972. Lui non plus n’a pas connu cette époque mais à voir son sourire, il s’en souviendra longtemps.
On ne sait pas ce que nous réserve l’avenir mais quand on voit le plateau présent à Amelia Island, on espère que les autos actuelles attireront autant que celle qu’on qualifient actuellement d’anciennes. Une chose est sûre, il n’y a qu’aux Etats-Unis où on peut voir un tel plateau de bon matin sans aucune contrainte…