Rebellion doit tirer sa révérence en Endurance à l’issue des 24 Heures du Mans en septembre prochain. L’écurie suisse compte bien refermer un long chapitre de son histoire par un succès, 40 ans après Jean Rondeau, qui lui aussi était le petit qui a vaincu le gros. Avec deux succès cette saison en WEC face à Toyota, Rebellion Racing a de sérieux atouts dans son jeu mais Le Mans reste Le Mans. Quelques jours seulement avant le confinement, Calim Bouhadra, CEO de Rebellion Timepieces, nous a reçu chez LEMO, en Suisse, dans son bureau qui respire le sport auto. De quoi revenir avec lui sur la saga Rebellion Racing qui n’est pas terminée…
Que retenez-vous de cette présence Rebellion Racing en Endurance ?
“Rebellion Racing est l’équipe privée qui a pu contester la suprématie des constructeurs. L’écurie est là depuis 13 ans avec une belle montée en puissance. Une marque comme Toyota est bien plus grande que Rebellion, mais les Rebelles ont fait tout ce qui pouvait être fait pour mener la rébellion. Je ne pense que, durant cette période, quelqu’un d’autre ait pu faire mieux.”
Vous avez conscience de la cote d’amour de l’équipe ?
“Je m’en rends compte quotidiennement. Ce capital sympathie s’est construit au fil des années. Rebellion Racing est un poumon pour beaucoup de passionnés de sport auto. Nous sommes une petite équipe et les fans s’identifient à l’équipe dans un monde de globalisation où tout est aseptisé et standardisé. Je suis un petit rebelle, mais je ne veux pas de révolution.”
L’Endurance a permis à Rebellion et LEMO de se faire connaître mondialement ?
“La philosophie d’Alexandre Pesci, propriétaire de l’équipe, est de toujours tirer vers le haut avec la culture de l’excellence. Chez LEMO, nous sommes reconnus pour être les meilleurs. La qualité suisse est là, on met les moyens de nos ambitions. Alexandre Pesci a toujours dit ‘si je fais quelque chose, je le fais bien’. LEMO, c’est 1800 personnes sur plusieurs sites. La marque Rebellion s’est développée grâce à l’Endurance. C’est la seule qui n’a pas simplement des stickers sur une voiture. Là, c’est notre auto et notre équipe. La voiture est bien une Rebellion. On a aussi mis notre compétence du sport auto dans Rebellion Motors (vente et restauration, ndlr) où tout l’environnement du sport auto est présent.”
Quel est votre meilleur souvenir ?
“Les 24 Heures du Mans 2018 ! Voir le propriétaire sur le podium est quelque chose d’extraordinaire. On y rêve tous, mais les places sont chères. Il y a l’euphorie des dernières minutes où chaque minute devient des heures. L’euphorie de l’équipe est ancrée à jamais en moi. J’espère que l’on revivra tous la même chose cette année.”
Votre plus mauvais souvenir ?
“Le Mans 2017. On termine pourtant à la 3e place, mais je n’étais pas content. A ce moment-là, on ne parlait pas de disqualification. J’étais le seul à pleurer. On a loupé une chance de s’imposer (il s’arrête de parler, ndlr). On aurait pu gagner Le Mans avec une LMP2 qui tournait comme une horloge. Toyota était hors du coup, Porsche a connu un pépin technique. Notre auto était devant, mais on est passé à côté à cause d’un souci de boîte de vitesses qui n’était jamais arrivé auparavant. On avait juste à dérouler. Porsche l’emporte finalement avec un tour d’avance. Bien sûr, il y a eu ensuite le problème rencontré après l’arrivée.”
La suite de la saison vous a permis de rectifier le tir…
“La plus belle revanche a été de gagner le titre mondial pour 12 secondes à Bahrain. C’était la plus belle revanche que l’équipe pouvait donner. Il n’y a pas d’injustice à nous avoir mis hors classement au Mans. L’erreur est humaine et ce titre était une belle réponse. Cela fait aussi partie des bons moments.”
Un pilote vous a marqué plus qu’un autre ?
“Nous sommes proches de nos fans, de nos mécanos et des gens d’une façon générale. On est une famille. J’ai beaucoup de respect pour Bruno (Senna). Il n’a pas eu la carrière qu’il méritait. Pour ma part, j’étais déjà fan de son oncle, Ayrton. C’est lui qui m’a donné cette passion du sport auto. Bruno m’a fait rêver en 2017. Peu importe la position où il était, Bruno était toujours là pour y aller. Cette année-là, nous avions la même auto que les autres.”
Rebellion Racing a la particularité d’avoir fait rouler beaucoup de pilotes suisses. C’était une volonté ?
“On travaille avec le coeur. L’équipe a donné sa chance à Neel (Jani) qui a ensuite été repéré par Porsche. Nous sommes fiers que les constructeurs prennent nos pilotes. C’est la même chose pour Thomas (Laurent). On prend des jeunes à qui on donne leur chance. Rebellion Racing reste une équipe privée, mais c’est notre travail de faire rouler des jeunes. Les constructeurs ne peuvent pas tous se permettre ce type de risque. On a joué notre rôle à 100%. Comme on aime aussi les clins d’œil, mettre Prost/Senna dans la même voiture nous a plu. L’idée était de mettre Piquet, mais cela n’a pas pu se faire.
Je n’oublie pas non plus les 24 Heures de Daytona 2017 où nous avons fait rouler Neel (Jani), Stéphane (Sarrazin), Nick (Heidfeld) et Sébastien (Buemi). Personne ne pouvait réunir un tel équipage avec trois pilotes officiels qui roulent habituellement pour le compte d’un constructeur. Rebellion Racing a toujours aimé les Etats-Unis et nos deux succès au Petit Le Mans restent quelque chose de magique.”
A suivre…