Erwin Creed a réalisé l’un de ses objectifs personnels cette saison. Il a d’abord disputé l’intégralité d’un championnat du monde, celui du WEC, mais il a surtout disputé les 24 Heures du Mans, et ce à deux reprises ! Le parfumeur le plus rapide du paddock (avec Romano Ricci) dresse le bilan de cette Super Saison passée au sein de l’équipe Labre Compétition.
Après quelques années passées en Fun Cup, Erwin Creed a fait un peu de VdeV. Il revient sur la suite de son parcours en sport automobile. « Grâce à Jack Leconte et Larbre Compétition, j’ai pu concrétiser mon rêve d’enfant tout comme Romano (Ricci) dont le père a fait douze fois les 24 Heures du Mans. Gamin, quand je venais au Mans, j’avais des étoiles plein les yeux. J’ai fait du sport automobile il y a sept ans avec du Karting, de la Mitjet et de la Formule Renault. J’ai gravi les échelons et j’ai roulé en LMP3 en ELMS en 2017. Cela s’est bien passé, avec une victoire à Monza, même si l’auto était toute neuve avec pas mal de petits défauts. La même année, j’ai disputé Road To Le Mans. On est parti 47e sur la grille et avons fini 3e ! »
Avec son acolyte Romano Ricci, les deux hommes avaient envie de passer à l’échelon supérieur et une personne leur en a donné l’opportunité. « Nicolas Minassian nous a proposé de rouler en LMP2 en ELMS avec Patrice Lafargue. Cependant, notre souhait était de faire du LMP2 afin de disputer les 24 Heures du Mans. Il nous a alors mis en relation avec Jack Leconte avec qui ça a tout de suite accroché. Cela nous a permis de faire l’intégralité de la Super Saison WEC dont deux fois Le Mans ! »
Cependant, il a d’abord fallu s’habituer à une nouvelle auto. « La Norma M30 LMP3 en ELMS n’était pas une voiture facile à piloter au début et nous avons trouvé la LMP2 plus réconfortante, plus rectiligne. Elle a plus d’aéro, ce qui fait qu’elle colle mieux à la piste. On se sent plus en sécurité dans la LMP2 car on est plus en confiance. En même temps, nous ne l’emmenons pas à 100 % non plus (rire) ! »
Erwin Creed a donc disputé la Super Saison WEC 2018/2019 avec Larbre Compétition sur la Ligier JS P217 #50. Cette année et demie étant terminée, il est l’heure de faire le bilan. « Spa 2018 nous a servi de mise en jambes avant les 24 Heures du Mans qui se sont bien passées. Nous sommes des gentlemen drivers, des Bronze, il ne faut pas l’oublier. J’étais parmi les meilleurs d’entre eux au Mans, ce qui était plutôt agréable ! Ensuite, Silverstone s’est bien passé, j’étais dans les trois meilleurs Silver du plateau alors que je ne suis que Bronze. Ensuite, ce fut la tournée asiatique avec, pour commencer, Fuji, un circuit que je n’apprécie pas trop. A Shanghai, nous avons eu l’aide d’un pilote professionnel en la personne d’Enzo Guibbert. Les conditions étaient très difficiles, mais depuis ma période en Formule Renault, j’aime bien la pluie, j’aime me forcer à rouler dans de mauvaises conditions. Je me rappelle toujours d’Ayrton Senna qui, dès qu’il pleuvait, sortait son karting. En Chine, j’avais fait du sport, j’étais donc vraiment très bien dans la voiture. Après ce fut Sebring avec Gunnar Jeannette. Là aussi, tout s’est bien déroulé. J’ai adoré cet endroit et cela faisait partie des mes rêves. Le circuit est atypique, l’ambiance est géniale, ce sont les Etats-Unis. Il me reste Suzuka et Bathurst sur ma liste de circuit préférés. Comme piloter n’est pas notre job, que nous avons un métier à côté et que nous avons des aléas, j’ai eu pas mal de choses à régler avant les dernières 6 Heures de Spa et cela s’est ressenti sur mes performances. Je n’ai pas réussi à mettre tout cela de côté, plus des conditions météos exécrables, je n’étais pas dedans n’arrivant pas à me détendre au volant, ce ne fut pas agréable. » Le Français résume très bien ce qu’il vient de vivre : « Nous savions que nous manquions un peu de performance pour espérer faire un podium, mais, au moins, on s’est fait plaisir. »
La saison s’est terminée en apothéose avec une deuxième participation aux 24 Heures du Mans. Le trio Nicholas Boulle, Romano Ricci et Erwin Creed s’élançait de la 28ème place sur la grille de départ. Ils ont d’abord connu une crevaison puis reçu une pénalité de cinq secondes pour avoir touché un retardataire lors d’un dépassement à Mulsanne. Au cours de la nuit, l’équipe française a eu quelques petits soucis, notamment lorsque le capot de la voiture s’est soudainement détaché.
La #50 a de nouveau été victime d’une crevaison, mais l’équipage termine à la 12e place des LMP2 ! « Je suis très satisfait du travail de mes deux équipiers qui m’ont toujours rendu une voiture en bon état après chacun de leurs relais. Le début de course a été difficile car je me suis mis la pression et je n’ai trouvé le bon rythme qu’à partir du matin lorsque mes temps ont commencé à être bons. Les conditions de course n’étaient pas faciles, notamment lorsque les voitures de sécurité quittaient la piste. Il fallait vraiment être prudent. J’ai suivi les conseils de Jack et préféré faire attention plutôt que de prendre des risques inutiles. Il vaut mieux perdre quelques secondes et ne pas partir en tête-à-queue ou sortir de la piste. »
Une belle saison donc où Erwin Creed, tout comme Romano Ricci, a bien évolué au niveau pilote et performance même si cela n’a pas toujours été facile. Il est à noter que les deux hommes ont terminé toutes les courses ! « Tout au long de la saison, nous avons malheureusement eu des coéquipiers différents. Au début, à Spa, nous avons eu Julien Canal et ensuite, avec Romano, nous nous sommes un peu retrouvés les leaders de l’équipage. Ce fut une bonne chose de ne pas avoir de pilote phare car cela nous a forcé à apprendre à régler la voiture, à dire ce qui n’allait pas sur l’auto. Nous nous sommes un peu débrouillés tout seuls avec l’aide de l’équipe Larbre Compétition. En dépit du peu d’informations qu’on leur donnait, ils ont quand même réussi à ajuster la voiture. Certes, nous n’étions pas les plus rapides, mais l’auto était confortable à piloter. Nous avons bien progressé tout au long de l’année, le fait d’être en championnat du monde nous a obligé à faire du sport, courir, à faire attention à que nous mangions, avoir une certaine hygiène de vie. J’ai par exemple perdu huit kilos ! Cela ne nous empêche pas d’avoir une très bonne ambiance, pas de tension dans l’équipe, Larbre Compétition est une belle structure, les mécaniciens sont top, mais ce côté un peu plus professionnel nous a apporté aussi. L’écurie a vu notre évolution. Certes, les gars ne vont pas en bas du podium nous applaudir, mais ils sont assez fiers de nous. Ils voient qu’à notre niveau, on arrive à faire des choses vraiment bien. Pas mal d’autres pilotes et équipes nous ont souvent dit qu’avec Romano, nous nous étions bien débrouillés ! »
Ces belles prestations ont bien entendu aiguisé son appétit et Erwin Creed se verrait bien franchir une étape supplémentaire à l’avenir. « Je me dis qu’avec deux pilotes pro, je pourrais peut être jouer la gagne au Championnat du Monde. Ce sera peut être l’étape suivante si je veux recommencer. Je ne sais pas si je vais repartir avec Romano. Cette saison, c’était plaisir et apprentissage. Là, si je veux faire le truc à fond, il faut que je trouve deux pilotes pro ! Certes, il y a l’ELMS, mais j’aime ces destinations mondiales. De plus, faire le WEC permet de disputer à coup sûr les 24 Heures du Mans. Malheureusement, il y a un aspect financier qui joue à 80%. Au niveau de mon travail, ça va, par contre, en sport automobile, je ne sais pas très bien me vendre. Je vois Nick Boulle, il a beaucoup de partenaires sur lui. Je n’ai pas de manager. Je sais déjà bien vendre mes parfums, c’est déjà pas mal (rires). J’ai un peu de budget cependant. J’aimerais rester en LMP2. On a vu avec Romano, si on veut continuer à courir ensemble, que l’Asian Le Mans Series était vraiment sympa. Le budget est un peu moins élevé. Deux pilotes Bronze, un Silver ou un Gold, des anciennes LMP2. Nous y serions bien. J’ai en plus des bureaux à Hong Kong et aussi en Australie. »
L’avantage du WEC ou peut être de l’Asian Le Mans Series est de pouvoir concilier sport, plaisir et affaires La Maison Creed est l’une des plus anciennes société familiale de parfumerie de luxe. Elle est actuellement dirigée par Erwin Creed représentant la septième génération de parfumeurs. « Le temps qu’il me reste va à ma famille et c’est surtout mon travail car je fais beaucoup de voyages. J’ai profité de plusieurs déplacements WEC pour m’occuper de mes affaires dans certains pays. A Shanghai, j’y suis allé deux jours avant tout le monde et suis resté le lundi après la course pour des rendez-vous. A Fuji et à Sebring pareil, j’ai pu faire la tournée de mes points de vente. Ces voyages m’ont permis de faire le point dans les magasins car c’est là que notre activité est concentrée. Nous sommes présents dans le monde entier. La course automobile via le WEC était pratique, je dois bien avouer. »