A 22 ans, Gabriel Aubry est en pleine ascension en Endurance. Le natif de Saint-Germain-en-Laye devait piloter aujourd’hui-même l’ORECA 07/Jackie Chan DC Racing en WEC avec Ho-Pin Tung et Will Stevens en WEC à Spa. A trois courses de la fin de saison WEC, le Français garde toutes ses chances de titre mondial LMP2 mais un récent test positif au Covid-19 a enrayé la machine. Le pilote au triple programme (WEC, ELMS, IMSA) va devoir regarder ses petits camarades depuis son domicile. Pourtant, Gabriel Aubry est affuté comme jamais. Entretien…
Comment vous sentez-vous physiquement ?
“Très bien ! Je n’ai pas le moindre symptôme. J’ai fait un nouveau test sérologique en Belgique qui montre que je suis au début de l’infection et un nasal qui me dit que je suis en fin d’infection.”
Le tout premier test était à votre initiative ?
“J’ai décidé de faire le test de mon plein gré à Paris le mardi suivant la manche European Le Mans Series de Spa. Un ami, qui n’a aucun lien avec le sport automobile, a été déclaré positif. La dernière fois que je l’ai vu remonte au 30 juillet. Mon père a également fait le test car il était avec moi. Mon père est négatif, moi positif. Il a reçu la réponse à 12h, moi à 16h30. J’ai de suite prévenu mon équipe (Algarve Pro Racing, ndlr), j’ai étais mis à l’isolement. Le protocole a été suivi avec le traçage des personnes avec qui j’ai été en contact. J’étais juste de retour à Spa pour la manche WEC. Le deuxième test a lui aussi montré que j’étais positif. Trois des quatre amis avec qui j’étais sont positifs, sans le moindre symptôme. J’avais pris deux jours de vacances dans la foulée d’un stage physique chez 321Perform à Font-Romeu. Je suis donc au repos forcé même si je suis le meeting à distance. J’harcèle Ho-Pin de messages (rire)”
Vous avez été soutenu dans toutes vos démarches ?
“J’ai reçu une entière collaboration du WEC qui m’a accompagné dans mes démarches. Je suis en contact permanent avec Pascal Dimitri (directeur des opérations WEC et ELMS) et Cédric Vilatte (event manager), ainsi qu’avec le service communication.”
Vous attendez donc le prochain test ?
“Je vais faire d’autres tests dans la semaine. Finalement, je ne sais pas trop quand me faire tester car je n’ai pas de symptôme. C’est un peu comme si je sortais chaque matin avec une pièce de deux euros, que je la lançais et que j’attendais de savoir de quel côté elle allait retomber.”
Venons-en à votre saison. Le printemps a été compliqué à gérer compte tenu de l’incertitude de la reprise ?
“J’ai eu un coup de mou avant le début de la pandémie, en novembre. J’étais parti pour disputer tout l’IMSA en LMP2 et j’ai appris en fin d’année que cela ne pourrait pas se faire. J’étais en stage à Font-Romeu et j’ai cru que le ciel me tombait sur la tête. A partir de là, deux solutions : soit tu prends ton courage à deux mains, soit tu restes là à te lamenter. J’ai appelé tout le monde pour dire que j’étais disponible. En plus, je n’avais pas grand-chose à leur dire, juste que j’étais prêt. C’était aussi le cas durant le confinement. Mike McGregor (responsable commercial, essais et services de Goodyear Motorsport, ndlr) m’a appelé pour me dire qu’une place était libre chez Algarve Pro Racing pour l’ELMS.”
Vous n’avez pas laissé tomber l’IMSA ?
“J’ai beaucoup travaillé le dossier américain. Je vais rouler chez JDC-Miller Motorsports sur les trois dernières courses (Mid-Ohio, Petit Le Mans, Sebring, ndlr) au volant de la Cadillac DPi #85. Le virus a chamboulé toutes les discussions car on devait se voir en mars à Sebring. C’est une belle satisfaction d’avoir pu finaliser un tel programme. Je suis le seul français à avoir roulé en WEC, ELMS et IMSA cette année sur autant de meetings. Rouler en LMP2 en IMSA m’a permis d’apprendre les circuits. J’adore le championnat américain.”
A terme, vous visez un baquet en LMDh ?
“C’est l’objectif ! Peut-être que je suis encore jeune et moins expérimenté que d’autres pilotes. Je ne peux pas me comparer à un Montoya ou un Pagenaud mais je ne pense pas qu’il y a beaucoup de pilotes français qui à 22 ans auront en fin d’année trois Le Mans, deux Daytona et deux Sebring.”
Quel regard portez-vous sur votre début de saison en ELMS ?
“Le championnat est très compétitif. Disputer la qualification est quelque chose d’incroyable tant le niveau est relevé. Les trois pilotes roulant en Goodyear étaient séparés par 7 centièmes à Spa. Je l’ai payé cash avec une erreur dans un virage qui m’a fait perdre 6 centièmes. La moindre faute n’est pas permise.”
Et le WEC ?
“Il m’a fallu du temps en début d’année pour m’habituer aux pneumatiques mais Jota sait faire la différence. J’ai aussi la chance de pouvoir travailler avec de très bons pilotes qui m’apportent énormément. J’ai encore passé un gros step depuis le début de saison, pas spécialement en pilotage même si je me suis affiné. En 2018, je faisais LMP2, LMP3 et GP3, ce qui était trop. Jota est au-dessus de tout ce que j’ai vu jusqu’à maintenant. L’équipe est du niveau d’un constructeur LMP1.”
Vous avez trouvé votre voie avec les courses d’endurance ?
“Le sport auto, c’est ma vie. J’y consacre tout mon temps. Aujourd’hui, je ne suis pas là pour gagner de l’argent. Je cherche juste à travailler avec le plus de personnes différentes et à rouler. A terme, je veux vivre de ma passion.”
Vous êtes arrivé en Endurance au bon moment ?
“Si j’étais arrivé plus tôt, je n’aurais pas disputé ma deuxième saison en Formule Renault chez Tech 1 Racing. Sans eux, je ne serais pas là. J’ai débuté par le LMP3 en Asian Le Mans Series, ce qui a été très formateur. En 2018, j’ai pris part à 21 courses dans 4 championnats. J’ai appris sur moi-même. Ma carrière prend plus de temps à décoller mais je travaille beaucoup pour être exemplaire. C’est la raison pour laquelle je prends assez mal la situation actuelle car je suis prêt. Je suis un entraînement physique 3 à 4 mois/an à Font-Romeu. Je fais 1 mois en décembre pour préparer Daytona, 1 en février avant Sebring, 1 en mai avant Le Mans, et plusieurs semaines le reste de l’année. Là, je rate Spa, je jette mon championnat par la fenêtre. Maintenant, l’objectif est d’être au Mans. Pour ce qui est du Paul Ricard, cela ne dépend pas de moi…”