Suite à la conférence de presse donnée par Peugeot Sport, Jean-Marc Finot, patron de PSA Motorsport, a fait le point sur le programme Hypercar pour Endurance-Info. Il est revenu sur le choix de la catégorie, l’impact de la crise sanitaire et sur l’hydrogène…
Pourquoi avez-vous choisi de revenir en Endurance ?
« Ce qui nous a attiré sur le programme WEC, c’est que c’était un très bon support pour l’électrification et la nouvelle performance de la gamme Peugeot. Nous sommes en train de lancer une gamme sportive basse émission, le premier opus étant la 508 que nous présenterons à la fin du mois. Peugeot Engineered est une gamme avec des voitures de forte puissance, des autos plaisir, mais qui seront en dessous des 50 grammes de CO2. Pour porter cette nouvelle ligne, nous avions besoin d’un programme iconique qui s’associe à l’hybridation. Le programme Endurance était le plus adapté et il présente l’avantage d’être dans les gènes et dans l’ADN de Peugeot avec nos trois victoires aux 24 Heures du Mans (1992, 1993 avec les 905 et 2009 avec la 908, ndlr). Beaucoup d’efforts ont été faits conjointement par la FIA, l’ACO et par les constructeurs pour faire baisser les coûts et avoir un rendement marketing intéressant. Toutes les croix ont été cochées et nous avons donc décidé de nous engager en Endurance sur le long terme. »
En quoi va consister l’implication de PSA Motorsport dans ce programme ?
« En termes d’organisation, PSA Motorsport regroupe les marques du groupe : Peugeot, Citroën, Opel, Vauxhall et DS. Chaque programme sportif est tiré par sa marque, mais ils utilisent le creuset de compétences de PSA Motorsport. Aujourd’hui, nous bénéficions des compétences des gens qui ont déjà travaillé sur la Peugeot 908 (photo ci-dessus). Par exemple, nous avons une nomenclature déjà prévisionnelle de notre nouvelle voiture qui est issue de notre savoir-faire de la 908. Nous avons aussi un planning pour chacun de nos composants ainsi qu’un coût objectif. Cela nous permet d’avoir une forte visibilité et un potentiel d’optimisation. On a associé aussi les personnes qui ont travaillé sur le V8 de la 908 il y a quelques années avec ceux qui ont récemment bossé sur le WRC. Les motoristes du WRC d’hier sont ceux du WEC aujourd’hui ! On retrouve aussi cette transversalité avec la Formule E. Ce sont les mêmes personnes qui ont développé le moteur électrique de la Formule E qui font les cahiers des charges et le développement du moteur de la voiture WEC. Cela nous permet de bénéficier de bonnes synergies pour des programmes plus efficients. »
Vous aviez deux choix : Le Mans Hypercar ou LMDh. Qu’est ce qui a fait pencher la balance ?
« Il y a plusieurs éléments. Nous trouvons la réglementation Le Mans Hypercar très pertinente. Elle donne beaucoup de libertés à la marque et au concepteur. Sur l’aéro, nous n’avons pas de forme imposée, mais nous avons un cahier des charges d’appui et de trainée. A partir de cela, nous faisons les formes que nous voulons à partir du moment que l’on respecte certaines choses (longueur, largeur, etc…). Cela permet de mettre l’ADN de la marque sur la voiture, nos codes de style, des éléments de style qui vont préfigurer les Peugeot de demain, la griffe Peugeot, etc…
Ensuite, la voiture est entièrement faite par le constructeur. Comme on veut se battre contre les autres marques, il y a une certaine légitimité à être complètement maitre d’œuvre du produit. En termes de motivation et management des équipes, il y a beaucoup plus d’enthousiasme pour faire notre propre véhicule. Il y a une synergie de technologie avec les quatre roues motrices “hybridées” qui est aussi la technologie et l’architecture que l’on va retrouver sur nos Peugeot de route. »
Avez-vous eu des craintes avec le Covid-19 comme un retard voire une annulation du projet ?
« C’est un projet qui a été décidé fin 2019 sur une stratégie qui n’a pas changé. Comme on a un niveau d‘efficience, la rentabilité marketing de ce projet est toujours au rendez-vous. Comme au même titre que l’entreprise, il a fallu faire des choix, des optimisations dans le cadre du Covid-19, mais on est toujours dans une situation stable aussi bien d’un point de vue stratégique que budgétaire pour la poursuite de ce projet. En fait, c’est à l’image du groupe PSA. L’efficience que nous avons réussi à atteindre en sport automobile nous protège et nous permet de pérenniser les programmes quand les conditions sont difficiles. »
Vous aviez un partenariat avec Rebellion qui est tombé à l’eau. Comment va-t-il être compensé ?
« C’était une hypothèse de partenariat. Maintenant, nous sommes sur un projet complètement sous la maitrise de Peugeot Sport qui sera donc piloté par nos équipes. Cela ne nous empêche pas de faire appel à de la sous-traitance comme Ligier Automotive sur la partie aérodynamique que ce soit pour la technologie ou pour l’exploitation. Cela peut encore faire partie des hypothèses. »
Qu’en est-il des pilotes ? Aura-t-on des équipages français ? Certains pilotes vus dans le programme 908 seront-ils de nouveau présents ?
« Nous avons des idées et pas mal de propositions. Nous sommes dans une analyse objective des performances car nous ferons nos choix sur ces critères : performance instantanée, consistance et des critères plus subjectifs comme le “team spirit”. Nous ferons notre choix de la performance, donc la couleur des yeux du pilote (rire) et sa nationalité ne vont pas primer. Tout est ouvert pour les pilotes, nous n’avons rien décidé. J’ai au moins 40 noms sur la table.
Nous abordons ce championnat avec beaucoup d’humilité car nos savons que nous allons devoir faire face à des grands. Certains sont déjà officiels comme Toyota, mais il peut y en avoir d’autres ! Nous savons que cela va être très dur donc pour avoir des chances, il ne faudra faire aucun compromis nulle part, nous devrons être bon partout… »
La suite du programme pourrait-elle passer par l’hydrogène dans les années à venir ?
« Le challenge sur lequel nous sommes concentrés est la démonstration de notre développement technologique sur l’hybride et notre but est de démontrer notre savoir faire si possible avec la réussite et en gagnant avec cette technologie. Une fois ce cap passé dans quelques années, on pourra penser à l’hydrogène, mais, à l’heure actuelle, nous ne concentrons pas de ressources motorsport sur cette nouvelle énergie. Nous sommes uniquement focalisés sur le développement de cette Hypercar hybride ! »