Johnny Dumfries, vainqueur des 24 Heures du Mans 1988 avec Andy Wallace et Jan Lammers sur une Jaguar XJR-9 LM du Tom Walkinshaw Racing avait évoqué pour Endurance-Info son succès ici. Johnny -de son vrai patronyme John Colum Crichton-Stuart, authentique Marquis de Bute, qui se fait d’ailleurs appeler plus simplement John Bute- avait évoqué pour le Club britannique des Pilotes des 24 Heures du Mans sa première expérience dans la Sarthe avec une Sauber Mercedes C 9 :
« Je ne vais pas évoquer aujourd’hui les 24 Heures 1988 qui se passent d’autres commentaires, mais ma première expérience du Mans avec Sauber Mercedes en 1987.
Après avoir été éjecté sans égards du Team JPS Lotus à la fin de la saison 1986, je me demandais ce que j’allais bien pouvoir piloter l’année suivante. En l’occurrence, j’ai eu une série intéressantes d’offres de la part de teams de Groupe C et d’IMSA, plus particulièrement de la part de Sauber, du Richard Lloyd Racing ainsi qu’une approche de Jaguar TWR , avant que je ne signe pour ces derniers pour la saison 1988.
Maw Welti, le team manager de Sauber, m’a contacté pour que je pilote au Mans pour Sauber, avec Chip Ganassi comme coéquipier. Mike Thackwell partageait l’autre voiture avec Henri Pescarolo.
Je connaissais très bien Mike et c’était un pilote très respecté et très rapide. Je n’avais jamais entendu parler de Chip Ganassi mais j’ai cru comprendre qu’il avait beaucoup d’expérience dans plusieurs types de compétitions aux USA. Il est devenu ensuite un patron de team accompli et respecté aux USA.
J’ai rapidement accepté de me joindre au team qui était réputé pour avoir un moteur magnifique et un châssis raisonnablement rigide. Il y a toujours un équilibre à trouver au Mans pendant les essais libres et les qualifications pour savoir s’il faut décider d’un temps de piste suffisamment partagé entre les pilotes ou de définir un set-up de course satisfaisant pour la course. Les pilotes veulent toujours bien se qualifier mais, clairement, le set-up de course est essentiel au Mans.
Ganassi, de manière compréhensible, fut frustré de son manque de temps de piste pendant les essais mais je suis resté sourd à ses plaintes et, avec du recul, assez antipathique. Mike était le genre de pilote qui allait se concentrer tranquillement sur son job et piloter n’importe quelle machine en tirant le maximum de ses capacités considérables.
La première impression de la Sauber fut très bonne. Elle semblait solide et stable avec un moteur très puissant. L’équipe était certainement inexpérimentée mais elle était très enthousiaste. Après avoir passé à ce moment-là toute ma carrière en monoplace, la Groupe C paraissait avoir un temps de réaction lent, mais Le Mans est un circuit rapide avec quelques virages rapides très sympa, donc je ne me sentais pas mal du tout. La vraie révélation pour moi fut le pilotage sur une piste humide pendant les essais libres. Nous avions des Michelin qui étaient très efficaces sur le mouillé. La voiture avait une adhérence impressionnante et la bosse de de Mulsanne se passait facilement à fond sur le mouillé à 370 km/h, ce qui était une expérience grisante.
J’ai regardé les chronos sur Wikipedia, ce qui a été une lecture intéressante . Les Porsche d’usine avaient à l’évidence monté la pression des turbos et s’étaient qualifiées devant dans les 3.21 mn.
Les Jaguar TWR venaient ensuite, dans les 3.24 mn environ et ensuite il y avait une Courage isolée.
J’étais septième en 3.26.5 et Mike venait ensuite en 3.27.4.
A l’époque, les 24 Heures du Mans étaient extrêmement importants pour Porsche et ils voulaient toujours dominer tout le monde, ils avaient là-bas un fantastique palmarès. Quand on descendait la grille de départ on trouvait un nombre impressionnant d’équipes dans la catégorie majeure, la C1, avec les jeunes équipes Nissan et Toyota dans leurs premières années.
Quelques années plus tard seulement mes vieux copains et complices Mark Blundell et Julian Bailey allaient illuminer les feuilles de chronos de la plus spectaculaire des façons au Mans avec les voitures extrêmement puissantes du Team Nissan.
Nous n’avons pas été bien loin en course. Quelques heures de course après le départ une casse mécanique (boîte de vitesses, NDLR) mit fin à mes espoirs mais pas avant que je n’ai fait le meilleur tour en course en 3.25.4. Je ne m’étais pas bien mis dans la tête le concept des courses d’endurance et, rétrospectivement, j’aurais dû être beaucoup plus bienveillant envers la mécanique. En fin de compte, ce fut une expérience très frustrante car j’avais pu me rendre compte du potentiel de la voiture qui allait devenir finalement une puissante force du Championnat du Monde en Groupe C.
Sauber m’invita ensuite à courir les 1000 Km du Nürburgring où j’ai sérieusement gâché ma copie en abîmant lourdement la voiture en qualifications. Ceci est une autre histoire ! »