2020 marque la troisième année de collaboration entre Julien Canal et Panis Racing. Pour cette nouvelle campagne en European Le Mans Series, le Manceau roulera sur une ORECA 07 qu’il partagera avec Will Stevens et Nico Jamin. Sur le papier, le trio fait clairement partie des favoris, mais la concurrence sera rude tout au long de la saison qui doit débuter en avril à Barcelone. A quelques semaines du début des hostilités, Julien Canal a fait le point avec nous sur la saison à venir, mais aussi ses craintes sur l’avenir avec des budgets qui ne cessent de flamber.
Poursuivre avec Panis Racing était l’option privilégiée dès le début ?
“J’avais plusieurs pistes possibles et il a fallu tenir compte de la hausse des budgets. Pour être performant dans le championnat, il faut disputer les essais du jeudi, ce qui fait monter le budget. Personnellement, je n’ai pas roulé depuis Portimão alors que d’autres n’ont pas quitté le baquet. A l’origine, rempiler chez Panis Racing n’était pas possible pour une question budgétaire. Je discutais avec trois écuries, mais des choses se sont fermées à cause du budget. Simon (Abadie) m’a rappelé pour me dire qu’il avait quelque chose d’intéressant à me proposer.”
La piste GT a été à l’étude ?
“Rouler pour Tech 1 Racing sur la Lexus en GT World Challenge Europe powered by AWS a fait partie des discussions, tout comme intégrer AKKA-ASP sur une Mercedes-AMG GT3. Je suis passé tout près de rouler sur la Mercedes car j’ai pleine confiance et de l’amitié pour Jérôme (Policand). Si je n’avais pas eu la possibilité de jouer les premiers rôles en LMP2, l’option GT3 aurait été privilégiée. Vu la composition de l’équipage Panis Racing, je ne pouvais pas dire non.”
On peut vous classer parmi les favoris ?
“Sur le papier, l’équipage est très beau. J’ai l’avantage de connaître l’équipe dont le staff est identique à la saison passée. C’est aussi un point positif d’avoir Will qui, techniquement, est vraiment au top. Il roule en WEC tout en restant pilote McLaren F1 sur le simulateur. Je connais très peu Nico, mais je sais qu’il est intelligent et rapide.”
Selon vous, le championnat s’annonce plus relevé qu’en 2019 ?
“L’ELMS se remplit car le WEC est devenu trop cher. Quand tu as 18 LMP2, c’est signe que l’étau se resserre. Les autos équipées de pneumatiques Goodyear seront en infériorité numérique face aux Michelin. Ces dernières saisons, le championnat ELMS est devenu très pointu.”
Les budgets flambent ?
“Plus le temps passe, plus c’est compliqué… J’ai quasiment le même budget depuis près de 10 ans. On dépasse les deux millions d’euros pour une saison correcte. Les essais ont été rajoutés et le prix de certaines pièces a augmenté, surtout les consommables. Pour des équipes privées, on est arrivé à une fourchette très haute. Avant, on m’appelait, mais maintenant, c’est moi qui fait le premier pas. Je ne pense pas avoir perdu en performance, mais avec mon budget, je suis obligé de me vendre.”
Vous sentez aussi un désintérêt des fans ?
“Mes enfants jouent au football et il m’arrive fréquemment de discuter avec d’autres parents. Tout le monde reste intéressé par Le Mans, mais les gens sont perdus et ne comprennent plus rien. Si tu n’es pas passionné, c’est dur de t’y retrouver. Tu peux voir un prototype se faire dépasser par une GT. Certains pensent encore que Gibson est une marque de guitare. Voir une seule catégorie prototype et GT avec des GT3 serait l’idéal. De plus, les gens ne savent pas qui soutenir. Ils ont même du mal à supporter quelqu’un. Actuellement, c’est trop flou. Les fans veulent savoir que untel se bat contre untel. Le GT est plus vibrant. Déjà, les voitures ont une sonorité différente. Celui qui franchit la ligne d’arrivée en premier ne fait pas rêver alors que le GT oui.”
Vous connaissez le WEC et l’ELMS. Avant cela, il y avait l’ILMC (Intercontinental Le Mans Cup). C’était la bonne époque ?
“L’ILMC était un programme rêvé. En 2011, il y avait tout de même Sebring, Spa, Le Mans, Imola, Silverstone, Zhuhai et Road Atlanta au menu. Tu commençais avec des étoiles dans les yeux à Sebring. Avec ce budget, je fais l’ELMS. Ce qui est sûr, c’est que je vais vivre à 100% mes journées sur les circuits cette saison et cela n’a rien à voir avec l’âge. Olivier Panis m’a bien fait savoir cet hiver que le budget demandé était bien trop important. Je n’avais jamais finalisé un programme aussi tard.”