La chronique de François Perrodo : “Toujours y croire et saisir sa chance”

“Impose ta chance, sers ton bonheur et va vers ton risque. A te regarder, ils s’habitueront.” (René Char)

Bonjour a tous, 

Les dieux du sport auto étaient a Bahrain il y a maintenant près de trois semaines, une finale de folie, dernier à un tour à mi-course, scénario catastrophique, une voiture très compliquée à piloter avec le lest et les hautes températures. Et puis, le miracle…

Mais avant cela, revenons en Europe, à Portimao au Portugal, course d’ELMS que nous décidons de faire pour justement bien nous préparer pour cette finale d’anthologie. 

Le résultat hélas, ne reflétera pas notre course car j’ai été victime d’un contact avec une LMP2 dans le dernier virage, ce qui nous fera perdre trois tours, mais dans l’optique du WEC, l’objectif est atteint. Le rythme est bon, je me hisse parmi les top pilotes Bronze du plateau, Manu est solide et nous rencontrons surtout Alessio Rovera, très bon pilote italien fort sympathique qui remplira parfaitement son rôle de pilote Silver. 

De quoi aborder Bahrain plutôt confiant, la seule inconnue restant le comportement de la 488 avec 30kg de lest sur ce circuit à très forte énergie, un tarmac et des conditions météos qui font dégrader énormément les pneus. Et bien nous avons eu notre réponse très rapidement dès les essais libres. Notre voiture était en valeur absolue (BOP + success ballast) la plus lourde du plateau et ça n’a pas loupé, notre bel étalon s’est vite révélé être plutôt une grosse vache. Seules les températures de nuit permettaient de générer plus de grip avec les Michelin, il était très clair que de jour et en début de course, la voiture serait très difficile à emmener.

Après les qualifications au terme desquelles nous terminons P7, c’est vraiment la soupe à la grimace, surtout que notre concurrent direct et archi favori la #90 s’est qualifiée à une très belle deuxième place! Ok la course dure huit heures et il peut se passer beaucoup de choses mais franchement, ça pue… 

Sans surprise, un début de course ultra compliqué à 14h00 dans des conditions très chaudes sur une piste avec très peu de grip, je me retrouve très vite dernier à lutter avec la queue du peloton alors que les voitures de tête font le show sur un rythme bien plus élevé que le notre. Constat identique pour Manu et Nicklas, si bien que quand je reprends le volant pour mon deuxième relais dans la quatrième heure de course, c’est le coup de grâce, la #98 me colle un tour!!! 

A ce moment précis, nous n’y croyons plus, même notre brillant ingénieur Luca me dit à la radio : pas de regret François, on aura essayé, désolé, je vous ai fait une voiture de merde, box pour un splash rapide pour compléter ton temps de conduite, si la #98 fait le plein et les pneus, ça te permettra de ressortir devant elle, et là, nous aurons une fenêtre très courte pour un miracle…

La suite tient tout bonnement…. du miracle, un enchaînement d’événements tous aussi improbables les uns que les autres. La #98, qui en effet refait le plein et met un train de balles neuves et qui du coup ressort derrière moi, s’en suit un accrochage entre la #51 et la #56 qui endommage légèrement la #51, mais le pneu explose à l’entrée de la voie des stands et les débris bloquent l’accès à cette voie des stands. Entrée en piste du safety-car, le ‘pass around’ attribué par la direction de course nous permet de revenir dans le tour du leader et toutes les voitures sont recollées. Drapeau vert, mon temps de conduite est terminé, il fait nuit, frais, la piste a plus de grip. Manu et Nicklas font une remontada formidable jusqu’à la deuxième place, aucun des autres pilote Bronze n’ayant terminé leur temps de conduite. A ce stade, nous sommes tous plus ou moins incrédules devant une telle deuxième moitié de course, mais le championnat n’est pas joué. Avec l’écart de points, il faut que la #90 termine au mieux 4ème. Hors, ils remontent jusqu’a un problème de frein qui leur coûtera une minute d’arrêt dans les stands et ils termineront à la 8e place.

Nous sommes champions du monde! 

J’ai encore du mal à réaliser, même plus de deux semaine plus tard.

Ce titre, on est allé le chercher avec nos tripes. Quelle saison ! Nous n’avons jamais été les plus rapides, nous n’avons scoré aucune pole position, deux victoires contre quatre pour la #90, mais on n’a jamais rien lâché, et surtout surtout, pas d’erreur, toujours dans les points. Il y a eu un boulot incroyable de toute l’équipe, des gars qui ne lâchent jamais rien, un esprit d’équipe monstrueux et soulignons le quand même, une voiture exceptionnelle qui n’a pas toujours été la plus rapide mais diablement fiable. Merci les Macaronis!!!

C’est vrai, nous avons été très chanceux sur cette dernière course, mais c’est ça la beauté sport, savoir être au bon endroit au bon moment, saisir les opportunités, toujours y croire et saisir sa chance.

Bientôt dix ans que je me suis mis au sport auto et le bilan est plutôt positif, deux titres mondiaux, trois podiums au Mans, alors que faire maintenant ? J’ai de plus en plus de travail, les enfants grandissent, ma femme gueule… Oui mais voila, quand on est passionné, comment être raisonnable ? J’avais pour projet d’arrêter le WEC car trop de courses lointaines, hors le Covid-19 est passé par là et la saison 2021 n’en comportera que six. J’avoue que remettre mon titre en jeu est plus que tentant. Promis, vous serez les premiers informés.

En attendant, ma prochaine course s’annonce passionnante car nous allons disputer les 24 Heures de Dubai avec mon pote et beauf Charly Samani, Manu et Matthieu. Un magnifique équipage dans un pur esprit Pro/Am car Charly débute et il va en prendre plein la gueule! Nous roulerons avec la Mercedes-AMG GT3 qui est une excellente voiture, exploitée par Racetivity, une équipe de jeunes super motivés et compétents et avec qui nous nous entendons très bien. L’aventure promet d’être mémorable.

Joyeuses fêtes a tous, faites au mieux en ces temps compliqués, on croise les doigts pour que l’année 2021 soit meilleure que 2020 et surtout, un grand merci a tous ceux qui m’ont supporté, en particulier aux membres du forum d’Endurance-Info.

Kenavo 

Francois