Notre abécédaire des 24 Heures 2019 s’ouvre aujourd’hui à la lettre F
F comme Ferrari
Pour être honnête, peu d’observateurs auraient pronostiqué une victoire en LMGTE Pro d’une Ferrari 488 GTE. Face à l’armada des Ford GT et des Porsche 911 RSR de Porsche GT Team (avec quatre voitures), Maranello pouvait s’appuyer sur les deux Ferrari engagées par AF Corse et sur celle de Risi Competizione, mais devait aussi affronter la compétitivité au Mans des Corvette, sans oublier l’inconnue Aston Martin et un sursaut éventuel des BMW M8 GTE. Bref, la tâche paraissait lourde et la balance semblait pencher en faveur des Ford, décidées à retrouver le chemin du succès de 2016 et voulant célébrer le cinquantième anniversaire de la dernière victoire au général d’une Ford au Mans, ou de Porsche, victorieux en 2018 et dont les résultats 2019 témoignaient d’une bonne santé, les C7.R restant des outsiders redoutables.
Les essais avaient paru corroborer ces impressions et, de plus, Aston Martin avait jeté le trouble dans les esprits avec la pole position de Marco Sorensen et de la Vantage GTE #95. Sam Bird avait été le plus véloce des pilotes des voitures italiennes avec la Ferrari AF Corse #71, mais avec seulement le huitième chrono de la catégorie, en 3.49.391, loin des 3.48.00 de Sorensen. Les deux autres 488 GTE étaient encore plus mal engagées avec le douzième temps pour James Calado et la Ferrari AF Corse #51 et le dix-septième et dernier de la catégorie pour Oliver Jarvis sur la Ferrari Risi Competizione #89, devancée par la Porsche GTE Am de Matteo Cairoli !
La donne fut toutefois différente en course. Si la Ferrari Risi Competizione ne fut inexplicablement jamais dans la cadence, les Ferrari AF Corse étaient dans la lutte et étaient dans le haut du tableau, même si elles étaient un peu en retrait. La Ferrari #51 se plaça cependant très vite dans le trio de tête et se révéla intraitable, maîtrisant les menaces de la Corvette #63 et des Porsche #91 et #93. La Ferrari n’était sans doute pas la plus véloce ce week-end, mais James Calado, Alessandro Pier Guidi et Daniel Serra n’ont pas fait une seule faute, sont restés à l’abri des pénalités et n’ont pas connu le moindre souci mécanique. Après la disparition de l’autre Ferrari AF Corse sur casse moteur et avec le manque de performance de la Ferrari Risi, la 488 GTE #51 semblait bien isolée mais, contrairement à la chèvre de Monsieur Seguin, elle a survécu au petit matin et a tenu bon jusqu’à l’arrivée donnant la victoire à Ferrari, 70 ans après la victoire de la Ferrari 166MM de Luigi Chinetti et Lord Selsdon, alors que la dernière victoire de Ferrari en GTE Pro datait de 2014 avec la Ferrari 458 Italia de Gianmaria Bruni, Giancarlo Fisichella et Toni Vilander.
Le bilan de Ferrari au Mans en 2019 est enrichi par la deuxième place en GTE-Am des Ferrari #84 de JMW Motorsport (nouveau podium après la victoire de 2017) et “62 de WeatherTech Racing qui ont toutes deux profité du déclassement de la Ford GT/Keating Motorsports.
F comme Ford
Après Ferrari, Ford…Logique, somme toute en cette année de sortie du film « Ford vs Ferrari, Le Mans 1966 », 1966, année de la première victoire de Ford au Mans avec la Ford GT40 Mk II de Bruce McLaren et Chris Amon. Seulement l’issue du combat a été toute différente. Ford Performance était pourtant venu en force après avoir annoncé son retrait de l’endurance. Pour partir sur une bonne note, quatre Ford GT, couvées par le Chip Ganassi Racing Team étaient engagées, Ford ayant eu de surcroît l’excellente idée de les présenter sous quatre livrées différentes rappelant les victoires de 1966, 1967, la victoire en GTE de 2016 et la 2e place de la Ford MKII #1 en 1966.
Cependant, le ramage n’a pas été à la hauteur du plumage. La Ford GT -davantage un prototype qu’une GT traditionnelle – avait gagné au Mans dès la première année du programme en 2016, et comme Sébastien Bourdais l’a dit après la course, peut-être la barre avait-t-elle été placée un peu trop haute, les Ford GT ayant été ensuite rappelées à l’ordre par le législateur. Malgré une belle performance de Harry Tincknell et de la Ford #67, les belles américaines se sont contentées de suivre les débats pour la victoire en GTE Pro, de près certes, mais pas suffisamment pour pouvoir l’emporter. C’est la Ford#67, aux couleurs de la Ford MkIV victorieuse en 1967, qui décroche finalement le meilleur résultat après le déclassement de la #68.
Pour faire bonne mesure, Ford avait confié une Ford GT, aux couleurs Wynn’s, à Keating Motorsport, engagée en GTE Am et visait ainsi la victoire dans les deux catégories. Sur la piste, l’écurie a parfaitement accompli son contrat, mais le déclassement de la #85 a encore noirci le tableau 2019 du constructeur américain qui quitte Le Mans cette année sans avoir décroché le moindre podium.
G comme G-Drive Racing
Les années se suivent et se ressemblent pour le team russe. Déclassé en 2018 après avoir franchi la ligne d’arrivée en vainqueur en raison d’un système de ravitaillement non conforme, l’équipe a encore vu la victoire lui échapper cette année. Pourtant, l’Aurus 01-Gibson (un châssis ORECA 07 rebaptisé Aurus du nom d’un constructeur automobile russe) a longtemps fait figure de vainqueur potentiel en LMP2. Le duel a duré 18 heures avec l’Alpine A470 Signatech Alpine Matmut (autre châssis ORECA 07) et a été superbe, constituant un des hauts faits de cette 87ème édition.
Les deux protos avaient le même tableau de marche et rentraient au stand pour ravitailler séparées de quelques secondes seulement. Dans la nuit mancelle, l’Aurus #26 prit un peu de champ sur l’Alpine, mais après 16 heures de course, elle n’avait qu’une minute et demie d’avance sur le proto bleu. Deux heures plus tard, la foudre est tombée sur la camp russe, le démarreur de l’Aurus refusant de fonctionner après un passage au stand. Les 17 minutes passées au stand étaient évidemment rédhibitoires dans une catégorie où les écarts étaient très serrés. Dommage pour Jean-Eric Vergne, Roman Rusinov et Job van Uitert, auteurs d’une bien belle course…
G comme GT
La bagarre des LMGTE-Pro restera elle aussi comme un des hauts faits de ces 24 Heures 2019, avec des écarts aussi faibles entre les autos qu’en LMP2, mais avec davantage de protagonistes. Après 10 heures de courses, huit GT étaient toujours dans le même tour (une Ferrari, trois Porsche, une Corvette et trois Ford), moins de deux secondes séparant le leader, la Ferrrari AF Corse#51, de sa suivante, la Porsche 911 RSR #92 !
Aux deux tiers de l’épreuve, elles étaient encore six dans le même tour, avec les quatre mêmes marques concernées (deux Porsche, une Ferrari, une Corvette et deux Ford) avec quatre autres voitures en embuscade à un tour ! A quatre heures du drapeau à damiers, les cinq premiers de la catégorie (une Corvette, une Ferrari, deux Porsche et une Ford) étaient groupés en deux minutes. Alors que le moindre faux pas, la moindre crevaison lente étaient interdits. Ferrari a remporté la victoire, mais la concurrence n’a pas à rougir !
En GTE Am, Porsche via Project One a récupéré la victoire au détriment de la Ford GT de Keating Motorsport pour un problème de réservoir, ce qui a permis à deux Ferrari d’être sur le podium.
H comme Hypercar
Dans le cadre de la semaine des 24 Heures, la future réglementation a été présentée. Place désormais aux Hypercar, nom provisoire de la catégorie, la dénomination officielle n’étant connue que l’an prochain. Deux cas de figure sont envisagés : un proto fermé avec une carrosserie rappelant une Hypercar, soit une voiture dérivée d’une Hypercar de route.
La liberté de choix sera donnée aux constructeurs tout comme pour la motorisation, une Balance de Performance étant appliquée. Les objectifs de performance interpellent, puisqu’on parle de 3.30 au tour, ce que dépassent de très loin les LMP1 actuelles et ce que dépassent aussi largement les LMP2….
Deux constructeurs se sont d’ores et déjà déclarés : Toyota, qui restera fidèle à l’Hybride en bâtissant son projet autour de la GR Super Sport Concept et Aston Martin qui fera ainsi son retour dans la catégorie reine, avec une Valkyrie propulsée par un moteur V12 de 6,5 litres. D’autres constructeurs se sont montrés intéressés…Wait and see !
I comme Ickx, Jacky
Le pilote belge a repris samedi dernier le volant de la glorieuse Ford GT40 #6 du JW Automotive Engineering (si le J fait bien référence à John Wyer, le W fait référence à John Willment, son associé), victorieuse des 24 Heures du Mans, en lever de rideau de la course.
Jacky Ickx emmenait à bord de la Ford son coéquipier de 1969, le Britannique Jackie Oliver. Ce dernier est toujours le détenteur du meilleur tour absolu au Mans en 3’13”6, chrono réalisé lors des essais préliminaires d’avril 1971 avec une Porsche 917, sur un circuit dépourvu de chicanes dans les Hunaudières et bien différent de ce qu’il est actuellement. Jackie Oliver a également été le fondateur de l’écurie de Formule 1, Arrows.
I comme Inter Europol Competition
Le team polonais avait obtenu une invitation en LMP2 pour ces 24 Heures 2019 grâce à son titre en Asian Le Mans Series dans la catégorie LMP3 avec une Ligier JS P3 pilotée par Martin Hippe et Kuba Smiechowski. L’équipe, vice-championne LMP3 en ELMS 2018, a donc honoré sa sélection et d’aucuns, pour la première participation de l’équipe au Mans, lui prédisaient quelques difficultés.
La Ligier JS P217 #34 n’a certes pas été la plus rapide de la catégorie, mais Nigel Moore, James Winslow (qui remplaçait l’infortuné Léo Roussel, blessé lors des essais ELMS à Monza) et Kuba Smiechowski ont rallié l’arrivée à la 16e place des LMP2 et l’écurie figurera dans les classements de l’épreuve sarthoise.