Reprenons aujourd’hui une bonne habitude que nous avions négligée ces dernières années, en déclinant l’Abécédaire des 24 Heures du Mans. Cet exercice étant subjectif, nous nous excusons auprès des pilotes et des équipes qui auraient mérité d’y être inclus et qui auraient été oubliés.
A comme Abandons
C’est toujours dommage de commencer un abécédaire avec des nouvelles qui fâchent comme les abandons au cours des deux tours d’horloge, mais si on veut respecter l’ordre alphabétique, il faut en passer par là…Par le passé, les chroniqueurs qui s’occupaient des Rallyes pouvaient échapper à cette contrainte avec le Finlandais Rauno Aaltonen , mais il n’a pas encore trouvé son homologue en endurance.
Nouvelles qui déçoivent, mais bonnes nouvelles cependant avec seulement 11 abandons – auxquels il convient d’ajouter une non classée, l’Oreca 07 RLR M Sport #43, arrêtée au stand depuis un peu plus de 11 heures dimanche matin pour un problème mécanique. Sur les 61 partants, un record, 49 voitures étaient donc à l’arrivée, ce qui donne un pourcentage de voitures retirées de moins de 20%, 19,67% exactement. Le premier abandon, celui de la Corvette #64, n’a été officialisé qu’à 21 h 05, soit après plus de huit heures de course.
La devise du Département de la Sarthe est « En Sarthe, 24 Heures comptent plus qu’ailleurs ». Cette année encore les 24 Heures ont duré plus longtemps que deux tours d’horloge, avec les déclassements des Ford GT #68 et surtout de la Ford GT #85 du Keating Motorsports, victorieuse en GTE Am. Aura-t-on droit à une cérémonie du podium supplémentaire, comme en 2018 ?
A noter que le déclassement des deux Ford GT permet seulement à l’édition 2019 d’égaler celle de 2017, avec 47 voitures classées. Curieusement, la dernière voiture classée en 2017, 47ème et dernière était la Riley Mk30 LMP2 du Keating Motorsport, pilotée par Ricky Taylor, et Ben Keating et Jeroen Bleekemolen!!!!
Ce faible pourcentage d’abandon peut s’expliquer de plusieurs manières. Tout d’abord, la météo a été favorable. Seules quelques petites gouttes de pluie sont tombées, et encore pas uniformément sur le circuit, et les concurrents n’ont pas eu à mettre les pneus pluie. La piste sèche a donc limité les sorties de route. Ensuite, les autos sont devenues de plus en plus fiables. Il est bien loin le temps où le simple fait d’être à l’arrivée était synonyme d’un bon, et même parfois d’un très bon, résultat. Aujourd’hui, le moindre pépin mécanique, un ennui de démarreur, parfois même un simple tête-à-queue ou une crevaison lente, vous font plonger dans le classement. La Balance de Performance joue aussi un rôle. Les voitures ne peuvent exploiter au maximum leurs possibilités et les mécaniques souffrent moins (les Ferrari 488 Challenge avaient une vitesse de pointe maxi sur les Hunaudières supérieures à celle des 488 GTE…). Sur les 12 abandons ou non-classés, seuls six sont imputables à la mécanique, ceux de la BR1-AER DragonSpeed #10 (boîte de vitesses), de l ‘Enso CLM P1/01 Gibson ByKolles Racing Team #4 (casse moteur), de l’Oreca 07 Jackie Chan DC Racing #37 (mécanique), de la Ferrari AF Corse #71 (casse moteur), l’Aston Martin Vantage #98 (moteur) et de l’Oreca 07 RLR M Sport #43 (non classée, panne mécanique) ce qui nous donne un pourcentage très faible de 9,84%.
A comme Accidents
Cet item est le corollaire du précédent. Les six abandons qui restent sont la conséquence d’un accrochage ou d’une sortie de piste. Fort heureusement, il n’y a eu aucun blessé en course. Une seule collision entre des concurrents a entraîné des abandons : ceux de la Corvette #64 de Marcel Fässler et de la Porsche 911 RSR Dempsey-Proton Racing #88 de Satoshi Hoshino. Marcel Fässler a été jugé responsable de l’incident, ayant 6 points de pénalité et 7000 € d’amende ! Les autres abandons sont dus à des sorties de piste, dont la dernière aura été celle de l’Oreca 07 DragonSpeed #31 de Pastor Maldonado au Tertre Rouge.
A comme Alonso
Victorieux comme en 2018 , l’Espagnol a enrichi son palmarès avec cette seconde victoire au Mans où il n’a connu, pour l’instant, que la plus haute marche du podium et va devoir agrandir son armoire à trophées avec ce succès manceau et le titre de Champion du Monde d’Endurance LMP1 qui s’ajoutent à la victoire aux 24 Heures de Daytona en janvier dernier.
Le double Champion du Monde de Formule 1 quitte – provisoirement? – les 24 Heures du Mans, avec deux victoires en deux participations, mais il n’a pas dominé ses coéquipiers de sa Toyota #8 ni ceux de la Toyota #7, ne signant ni pole position ni meilleur tour en course. Après l’arrivée, alors qu’il va se tourner l’an prochain vers d’autres disciplines -Dakar, Indianapolis?- il a laissé entendre qu’il reviendrait au Mans. Peut-être avec McLaren pour viser une troisième victoire ?
A comme Alpine Signatech Matmut
Le team de Philippe Sinault n’aura pas eu besoin cette année du déclassement d’un concurrent, comme ce fut le cas en 2018, pour s’imposer. L’Alpine A470 #36 a constamment été à la pointe du combat et ce dès les premiers tours de course. La lutte avec l’Aurus 01 #26 de G-Drive Racing a été superbe , les deux voitures ayant pratiquement le même tableau de marche, et après les ennuis de sa rivale, l’Alpine était intouchable, l’emportant avec un tour d’avance.
Nicolas Lapierre, Anndré Negrão et Pierre Thiriet ont fait un sans faute, remportant leur second succès consécutif. Pour l’écurie, c’est le troisième succès en LMP2, après ceux de 2016 et de 2018. Il faut dire que lorsqu’on a un Lapierre dans son édifice, ça aide bien…On rêverait de voir Alpine un cran plus haut dans les catégories !
A comme Aston Martin
Une course à oublier pour la firme britannique. Marco Sorensen avait donné des espoirs en signant la pole position de la catégorie GTE Pro jeudi soir avec un chrono de 3.48.00. En course, il en fut tout autrement, les Aston Martin étant affectées par une modification de la Balance de Performance, l’équipe se justifiant après la course pour « avoir été contrainte de prendre le départ de la course avec un set-up compromis et trop peu testé pour chacune de ses voitures en GTE Pro . » Marco Sorensen fut moins heureux en course qu’en qualifications, avec une sortie de route à Indianapolis qui mit fin un terme à la course de la Vantage #95, la seconde Aston Martin GTE Pro, la #97 terminant à une anonyme 12ème place de la catégorie.
En GTE Am, ce ne fut pas mieux, la Vantage #98 cassant son moteur samedi à la tombée de la nuit et la #90 terminant dans les profondeurs du classement. Aston Martin doit une revanche, en attendant son arrivée avec la Valkyrie Hypercar en 2021.
B comme BMW
Les 24 Heures du Mans 2019 ne resteront pas non plus les annales du constructeur munichois. La dernière course au Mans et en FIA WEC des BMW M8 GTE est passée pratiquement inaperçue. Les deux GT allemandes ont pris les dixième et treizième places de la catégorie GTE Pro, sur treize concurrents classés.
Les essais des BMW M8 GTE MTEK avaient été un peu meilleurs, avec le cinquième chrono réalisé par Augusto Farfus sur la BMW #82, mais en course les M8 furent distancées et ce dès la première heure de course. Les BMW M8 GTE quittent le FIA WEC et on ne devrait pas les revoir l’année prochaine au Mans.
B comme BR1
SMP Racing et BR Engineering décrochent le premier podium d’une équipe russe au Mans pour le plus grand bonheur de Boris Rotenberg, le fondateur du team, grâce au trio Vitaly Petrov, Mikhaïl Aleshin et Stoffel Vandoorne. Un peu en retrait lors des qualifications, la BR1 AER #11 a fait une course très rapide et régulière et, profitant des pénalités et des quelques incidents des Rebellion, a terminé troisième et première des protos non-hybrides.
SMP Racing aurait peut-être pu espérer mieux encore, mais la BR1 #17 a fini sa course dans les virages Porsche à la suite d’une sortie de piste de Egor Orudzhev. Le pilote russe (meilleur temps absolu jeudi soir lors de la Q3) voulait reprendre la piste – il n’est pas certain toutefois que, en raison des dommages importants subis par la voiture, la BR1 ait pu repartir – mais le corps médical, arrivé sur les lieux, ne l’a pas autorisé à (re)prendre le volant.
B comme Buemi
Le Suisse est arrivé chez Toyota en 2012 et est depuis un des piliers du constructeur nippon avec Kazuki Nakajima. Il réalise, comme ce dernier, et Fernando Alonso le doublé après la victoire de 2018.
En huit participations aux 24 Heures du Mans, Sébastien Buemi totalise cinq podiums – deux victoires, deux deuxièmes places et une troisième-, le dernier en date étant son troisième consécutif, comme ses coéquipiers. Cette année encore, il a été performant, réalisant le deuxième meilleur tour en course, le meilleur de la TS050 #8 en 3.18.397. En course, il a réalisé un sans faute et son titre de Champion du Monde est amplement mérité.