Nous entamons ce lundi les avant-dernières feuilles de notre abécédaire 2019, en commençant à la lettre Q
Q comme Qualité
Nous aurions pu avoir Q comme Quantité (soit x la capacité d’un réservoir) ou Q comme Quota (nombre de pneus dûment enregistrés pour la course), sans y voir de malice aucune, mais nous préférons Q comme Qualité .
Si d’aucuns diront que cette édition 2019 n’a pas été exceptionnelle, en revanche on peut s’accorder sur la qualité du plateau. Qualité n’est pas forcément synonyme de compétitivité et si Toyota était effectivement seul dans sa catégorie « Hybride », toutes les voitures étaient parfaitement présentées.
Il est bien loin le temps où, au moment du traditionnel Pesage, les fans, voire même des acteurs de la course plus avertis, découvraient des engagements « exotiques », peut-être également « erratiques »… Nous ne citerons pas de noms, mais beaucoup auront certainement des idées en tête.
Il est clair que l’effet de surprise ne joue plus. La quasi-obligation de participer à un championnat sous label pour prétendre à un engagement, le choix imposé des quatre châssis en LMP2 qui empêche un autre constructeur de courir au Mans, impliquent que le public, du moins celui qui suit régulièrement les compétitions, connaît déjà les modèles qui seront présentés.
Le XXIème siècle est un autre monde. Il est difficile désormais à un constructeur ou un team de se cacher complètement. L’époque où toutes les équipes se préparaient dans le plus grand secret – avec le plus grand soin, parfois un peu moins et d’autres fois pas assez ce qui pouvait déboucher sur une course très brève ou même sur des catastrophes – est révolue. Ce n’est pas encore Big Brother ou « l’œil était dans la tombe et regardait Caïn », mais difficile de passer inaperçu.
Cela a pour effet de voir au Mans des voitures bien finies et, cerise sur le gâteau cette année, superbement décorées – et non achevées à la va-vite comme a pu le voir parfois par le passé. On ne parie plus, ou alors très rarement, sur le nom des voitures qui abandonneront très vite. Toutes les autos présentes au départ peuvent prétendre être à l’arrivée, ce qui n’était pas forcément le cas il y a quelque temps, et le nombre de protos ou de GT à l’arrivée en 2019, témoigne de cette réalité.
R comme Rebellion
Nous avons déjà beaucoup parlé des courses de Thomas Laurent, Gustavo Menezes, sans oublier Nathanaël Berthon qui a tourné sur le même rythme que ses coéquipiers, à travers ORECA également.
Rebellion Racing avait fait le buzz en changeant la robe de ses deux R13 entre la Journée Test et la course pour les vêtir d’une tenue chamarrée et flashy du plus bel effet, mais l’équipe n’était pas venue au Mans que pour un défilé de mode.
Les équipages étaient de première ordre avec les trios Lotterer/Jani/B.Senna (dont deux vainqueurs des 24 Heures du Mans) et Laurent/Menezes/Berthon. Si sur le papier, Toyota semblait un cran au-dessus (malgré l’EoT, mais en raison de la consommation, sans parler des moyens matériels), on pensait bien pouvoir se battre, et même mieux, avec les BR1 du SMP Racing.
La première alerte a eu lieu pendant les essais, avec la casse de deux moteurs Gibson, ce qui explique peut-être que la meilleure R13, la #3 de Menezes, n’a pu devancer la BR1 #11 d’Egor Orudzhev.
Le potentiel était cependant là, la Rebellion #3 est celle qui a été la plus proche du rythme des Toyota TS050, mais le résultat n’est pas au diapason : une friction avec les rails de Thomas Laurent, un marquage de pneumatiques oublié, un passage dans le gravier de Gustavo Menezes, des incidents, des bêtises, mais tout n’a pas été très bien Madame la Marquise, et la Rebellion #3 a été éjectée du podium et a terminé derrière la voiture sœur dont la course avait été gâchée dès la première heure par une crevaison .
Au bout du compte, le bilan est moyen. On pourrait dire « élève plein de bonne volonté, a des capacités, mais peut mieux faire ».
R comme Rookies
Dites 33…Les malades se portent bien ! Ils étaient 33 novices des 24 Heures du Mans avant le départ et seuls sept d’entre eux n’ont pas vu la ligne d’arrivée, soit 21,21% ! Ces infortunés sont Jordan King (Oreca 07 Jackie Chan DC Racig #37, abandon, boîte de vitesses), John Farano et Arjun Maini (Oreca 07 RLR Msport/Tower Events #43, non classée, moteur cassé), Henning Enqvist et Konstantin Tereschenko (Ligier JS P217 ARC Bratislava, abandon, sortie de route), Felipe Fraga (Ford GT Keating Motorsport #85, disqualifiée, réservoir non conforme) et Satoshi Hoshino (Porsche 911 RSR Dempsey-Proton racing #88, abandon, suite collision).
Trois de ces rookies sont montés sur le podium : Stoffel Vandoorne (BR1 SMPRacing #11), troisième au général et en LMP1, et Rodrigo Baptista et Wei Lu (Ferrari 488 GTE JMW Motorsport #84), deuxièmes en LMGTE Am.
Nous donnerons la palme au trio 100% rookie de la Porsche 911 RSR Proton Compétition #78), Vincent Abril, Louis et Philippe Prette, qui ont pris la septième place de la catégorie LMGTE Am en dépit de leur inexpérience au Mans. Louis Prette -le fils de Philippe-, histoire de se mettre en jambes, avait participé le samedi matin à la course du Ferrari Challenge, terminant deuxième alors !qu’il avait fait la pole position !.
S comme Safety Car
Les périodes sous safety car sont évidemment les moins prisées des spectateurs. De plus, elles ont parfois l’effet dévastateur d’influer sur les écarts, la longueur du tracé manceau accentuant encore cette influence, bien que trois voitures de sécurité soient déployées.
C’est pourquoi la Direction de Course essaie d’en limiter l’usage autant que faire se peut et n’actionne cette procédure que pour des impératifs de sécurité. En 2019, les safety cars sont rentrés en action à huit reprises pour un temps de piste total de 2h09 et 18 secondes. Pour éviter ces périodes derrière les voitures de sécurité, la Direction de Course a déployé à huit reprises également la procédure Full Course Yellow, qui a l’avantage de ne pas resserrer les positions, toutes les voitures devant rouler à 80 kmh maximum. Les concurrents ont tourné pendant 22 minutes et 22 secondes sous FCY et ont été ralenties pendant 49 minutes et 18 secondes par les Slow Zones.
S comme Sorensen
La pole position en LMGTE Pro de Marco Sorensen et de l’Aston Martin Vantage #95, un chrono de 3.48.00 pour le Danois, aura été la seule éclaircie du constructeur britannique. Ce fut un peu l’arbre qui a caché la forêt car en course les Aston Martin furent inexistantes.
La marque a pointé du doigt la Balance de Performance, modifiée la veille de la course, avec une diminution de la capacité du réservoir et une baisse de pression de turbo sur les Vantage.
En course, les pneus des Vantage se dégradèrent rapidement. Marco Sorensen fut nettement moins heureux qu’en qualifications puisqu’il tapait dans les rails à Indianapolis à haute vitesse. Suite à ce choc, il a dû déclarer forfait pour la manche du British GT qui s’est déroulée hier à Donington. La seconde Vantage LMGTE Pro, la #97, avait eu elle aussi une sortie de route,
Aston Martin doit une revanche, mais la performance de Marco Sorensen reste belle.
T comme TDS Racing
L’Oreca 07 #28 avait fait la pole position de la catégorie, Loïc Duval réalisant le meilleur tour en 3.25.345 après l’annulation du chrono de Tristan Gommendy et de l’Oreca 07 Graff #39, mais Loïc Duval avait subi le même sort en 2018…
En course, l’Oreca # 28 allait être aussi la plus rapide de la catégorie, Matthieu Vaxivière ayant établi le meilleur tour en course des LMP2 en 3.27.611 dès son troisième passage.
L’Oreca #28 a dû laisser s’échapper l’Alpine A470 et l’Aurus 01 après un embouteillage lors des ravitaillements mais Matthieu Vaxivière, Loïc Duval et François Perrodo sont remontés méthodiquement vers l’avant et sont venus cueillir une superbe troisième place dans a catégorie.
Loïc Duval et Matthieu Vaxivière ont fait une course brillante, Loïc étant lui aussi dans les meilleurs chronos du LMP2 et François Perrodo, pour sa dernière course en LMP2 , a été très solide et a fort bien tenu son rang, alors qu’il va regagner les rangs du GT, ce podium s’ajoutant à celui de 2016 en GTE Am. TDS Racing demeure une référence en LMP2 et le prouvera sûrement de nouveau l’année prochaine.
T comme Toyota
Tout a été dit, ou presque, sur la victoire et la prestation des TS050, aussi nous ne nous étendrons pas outre mesure. Cette victoire et le titre mondial FIA WEC constructeurs ne souffre d’aucune restriction, même si Toyota Gazoo Racing, avec des fins de course parfois surprenantes et inédites, pourrait concourir au Festival de Cannes avec quelques chances de succès pour le Prix du Meilleur Scénario !!!
Meilleurs temps des qualifications, meilleurs tours en course, doublé à l’arrivée…La réussite a été totale. Si chronométriquement parlant, l’écart a paru se resserrer entre les TS050 et les Rebellion R13 ou les BR1 – un effet de l’EoT? – , ces écarts sont peut-être trompeurs car on a eu nettement l’impression que les Toyota en avaient sous le pied, si vous nous pardonnez l’expression.
Conway, Kobayashi et Lopez auraient mérité l’emporter mais le palmarès retiendra les noms de Nakajima, Buemi et Alonso. C’est la loi du Mans.
Toyota a annoncé très tôt son intention de continuer l’aventure du Mans et du WEC dans la nouvelle catégorie Hypercar en prenant pour base la Toyota GR Super Sport et en restant fidèle à la technologie Hybride.
Si Toyota doit beaucoup au Mans et à l’endurance, l’endurance et Le Mans doivent aussi beaucoup à Toyota…