Allez c’est parti pour une petite anecdote supplémentaire. Comme son nom l’indique, un essai privé doit généralement rester privé. Nous sommes en février 2013 et Aston Martin Racing prépare une évolution de sa Vantage GTE. Des essais privés sont organisés à Portimao et personne n’a encore vu la voiture.
2013 est l’année où Fred Mako est pilote officiel Aston Martin Racing. Forcément, c’est plus facile pour moi d’assister aux essais. AMR donne son accord mais je dois respecter le fait que ce soit des essais privés, donc aucune photo de la voiture ne doit être publiée et les interviews doivent être validées (ce qui l’a été sans le moindre problème).
Direction Portimao où je n’avais encore jamais mis les pieds. On prend un vol Paris/Lisbonne et c’est Bruno Senna, lui aussi pilote AMR, qui doit nous récupérer pour nous emmener en Algarve. Se faire véhiculer par Mako et Senna est tout de même assez sympa. On fait le trajet en Opel Corsa. Pour avoir l’habitude de monter avec des pilotes, je peux vous dire que parfois c’est assez rock ‘n’ roll. Là, rien à redire. Pas un excès, le clignotant pour dépasser, les contrôles dans l’angle mort. On dirait qu’il passe son permis. C’est assez rare pour être souligné. Un vrai ange de la route…
Les essais se passent pour le mieux, l’Aston Martin se comporte bien et je peux faire les interviews des personnes sur place allant de John Gaw à Stefan Mücke en passant par Fred Mako et Darren Turner. Là où ça se complique, c’est quand j’ai su que ça allait rouler toute la nuit. Imaginez une séance privée avec une seule auto qui roule, d’autant plus qu’il n’y avait pas Internet sur le circuit et que bien entendu pas de media centre vu que j’étais tout seul.
Vu que les pilotes se sont relayés au volant de la Vantage GTE, j’ai quand même pu aller dormir. On passera sur le fait que nous sommes partis en retard de l’hôtel, que Stefan Mücke est passé mach 2 sur un ralentisseur. Bah logique, rouler pleine balle de nuit fait qu’on voit les ralentisseurs ‘last minute.com’. Mon dos s’en souvient encore.
Une fois les essais terminés, il faut rentrer à Lisbonne toujours avec mes deux compères. Je me dis que le trajet va me donner l’opportunité d’écrire, tranquillement assis à l’arrière de la Corsa, l’ordinateur sur les genoux, le carnet parfaitement posé. On ne va pas aller jusqu’à dire que c’est le top mais presque. On sort tranquillement du paddock. Ceux qui connaissent Portimao savent qu’il y a un rond-point en sortant. Et ce qui devait arriver arriva. Il suffit de prendre le fameux rond-point assez vite, que le passager qui répond au nom de Fred Mako commence à tirer le frein à main et nous voilà partis en travers après seulement 100 mètres. Je n’avais pas commencé à écrire deux mots que l’ordinateur m’a échappé des mains pour terminer sa course contre la porte. Quand je pense au voyage aller qui avait été tout doux…
Après quelques tours (et des pneus carrés), on reprend notre route. Portimao est un circuit situé en pleine campagne et il faut faire quelques kilomètres pour trouver trace d’une quelconque civilisation, notamment l’autoroute.
Le souci est que pour rattraper l’autoroute dont l’entrée est à gauche au milieu d’une grande ligne droite, il faut continuer environ 500 mètres, faire demi-tour sur un rond-point, revenir sur ses pas et donc emprunter l’autoroute, cette fois à droite.
Selon Fred, quand le World GT1 venait à Portimao, tout le monde tournait à gauche à l’arrache sans aller au rond-point. Le Portugais, loin d’être idiot, a dû voir les nombreuses traces de freins au sol (même moi j’avais repéré la veille). Il a donc été décidé de mettre des plots afin d’éviter de couper à gauche. Bruno l’avait bien compris, sachant qu’on arrivait assez vite dans la descente vers le rond-point. Pourquoi voudriez-vous avoir peur ? Puisqu’on vous dit qu’il y a des plots… Quand j’entends soudainement un ‘ça doit passer’, je me dis que là ça pue un peu. Il suffit de relever légèrement la tête pour comprendre. Il me semble qu’il y a un espace plus important entre deux plots. En réalité, il doit en manquer un. Je vous le donne en mille. Un coup de volant, un coup de frein à main et ça passe entre les plots. La vache, j’aurais parié que ça ne passait pas.
Une fois sur l’autoroute, on était loin de la vitesse à l’aller. On était à la bourre pour l’avion, donc il a fallu cravacher. On a dû faire plus de voie de gauche que de voie de droite, toujours avec une seule main sur le volant comme le montre la photo plus haut. Si vous vous souvenez d’une précédente anecdote avec Mako en Californie, vous savez qu’une main sur le volant veut dire que c’est tranquille. On est loin de la conduite en auto-école. Sauf que quand on roule vite, on consomme plus. Il a donc fallu s’arrêter faire un pit stop en carburant. Par chance, il n’y avait pas de temps limite à respecter lors de l’arrêt. Cependant, c’est un peu le chien qui se mord la queue. Vous roulez vite, vous consommez, vous ravitaillez. Sauf qu’après, il faut rattraper le temps perdu en roulant encore plus vite. On a fini par l’avoir cet avion mais je pense qu’on aurait été plus vite à rentrer en Corsa à Paris. Règle numéro 1 : toujours se méfier des pilotes…