15 ans ! Il s’en passe des choses en 15 ans… Pour vous, le 26 mai est synonyme de la victoire de Simon Pagenaud à Indy 500 en 2019. Pour nous, le 26 mai est le jour de la création d’Endurance-Info en 2006. Pour moi, le 26 mai est la date de décès de mon papa il y a deux ans. Vous comprendrez donc mon sentiment mitigé d’un 26 mai. Il faut regarder vers l’avant sans oublier le passé, surtout que mon père a toujours poussé dans mon sens. Quinze ans d’Endurance-Info. J’ai l’impression que c’était hier.
Je pourrais revenir sur l’avant Endurance-Info, à savoir Infos Course. Je vais garder l’histoire pour mes mémoires. En plus des membres fondateurs d’Endurance-Info, je tiens juste à préciser que sans Jules, Stéphane, Jean-Louis, Erik, Canard et Jérôme, vous ne liriez pas ces lignes aujourd’hui. Tout est souvent une histoire de rencontre : être au bon endroit au bon moment. Pour moi, c’est un mix de permis moto, Stéphane Ortelli, 24H de Spa, Maison Blanche, Lamborghini Murcielago et Motorlegend. Vous secouez le tout et vous avez mon arrivée en sport auto de l’intérieur. En 2004, ma première fonction, grâce à Laurent Chauveau, était le rôle de modérateur sur le forum Infos Course. J’avais une première fonction en sport auto. C’était un an après ma toute première accréditation sur un circuit (FIA GT Magny-Cours), accréditation qui était au nom de Stéphane Ortelli, mais ça c’est une autre histoire qui sera à raconter plus tard. D’autres histoires à raconter, il y en a un tas. Si Jean Alesi n’avait pas eu l’idée d’amener le DTM à Avignon, il n’y aurait jamais eu Endurance-Info.
J’ai rencontré Laurent Chauveau, Anthony Megevand, Claude Foubert et Julie Sueur avant le lancement d’Endurance-Info. En 2005, on parlait d’Infos Course, l’ancêtre d’Endurance-Info. Alors que Claude se concentrait principalement sur les événements au Mans, les quatre autres commençaient à bouger. La première rencontre entre nous quatre remonte aux essais Le Mans Series 2005 au Paul Ricard. Dans la foulée, Antho, Julie et moi couvrions le meeting FIA GT à Monza. Nous avons eu la chance d’arriver à un moment où peu de médias 2.0 étaient en place. Une chance ? Finalement, pas certain car il a fallu du temps avant d’avoir la confiance des acteurs. J’en profite pour remercier Jacquie Groom qui a été la première à m’accréditer pour le FIA GT. Les autres championnats en ont fait de même sans trop sourciller. Le graal était bien entendu l’accréditation média aux 24 Heures du Mans. Là, c’est comme si tu es médaillé olympique. Tu as tellement désiré d’être acteur de cette course que tu as envie de garder le pass média autour du cou jusqu’à l’édition suivante. Avant cela, j’économisais pour acheter un billet pit walk. La première fois que j’ai mis les pieds dans la voie des stands avec mon pass pit walk, j’ai le souvenir d’avoir appelé la terre entière pour dire que j’y étais. C’était à une époque où le forfait téléphonique était vite plombé. Ce mois de juin m’a coûté plus cher que le prix du pit walk. Bref, je m’égare…
Infos Course étant très axé sur les 24 Heures du Mans, notre petite équipe a voulu prendre son indépendance pour couvrir tous les championnats. Nous avions tous les quatre la même envie, la même gnak sans jamais se prendre la tête. Il y a deux divergences. L’une des deux engueulades remonte justement à cette époque pour le choix du nom du site. Chacun pouvait proposer des noms. Personnellement, j’avais donné Zone Rouge mais le nom était déjà déposé. Laurent s’est embarqué dans des noms sortis de je ne sais où. On aurait pu s’appeler Côté Piste ou Ambiance Nuit, j’en passe et des meilleurs. Avec Antho, j’ai le souvenir qu’on a supplié le pauvre Lolo de virer ses propositions. Oui, on a failli s’appeler Ambiance-Nuit.com. Désolé mon Lolo mais on ne vend pas de lampadaires. On a parlé, échangé, reparlé, échangé à nouveau. L’histoire a bien duré une semaine. La fumée blanche est sortie de la cheminée avec Endurance-Info. On voulait un nom compréhensible par tout le monde. Ce sera donc Endurance-Info ! L’aventure est partie.
La seconde engueulade remonte au même mois de mai 2006. SRO lance la catégorie GT3 sur deux courses d’une heure. Fallait-il couvrir le championnat. Allez dire cela à Lolo qui ne jurait que par l’Endurance. Vu que l’on couvrait le FIA GT, le GT3 collait bien. Julie a souhaité s’en charger. Bon, on attend toujours son premier article, mais c’est l’intention qui compte.
Quand vous lancez un site internet, vous êtes comme une chaine TV. Le lendemain, vous regardez les audiences de la veille. Au début, c’était déprimant. Le seul qui consacrait tout son temps à Endurance-Info en plus de son rôle de journaliste pour un quotidien local était Antho. Le mec est une machine, un rouleau compresseur, un malade du travail. De 2006 à 2011, nous avons passé toutes nos soirées à échanger sur Messenger, à parler des articles, à échanger. Plus de 2000 soirées. A cette époque, impossible pour moi de garder une copine plus de 6 mois. Le jour je bossais, le soir j’écrivais, le week-end j’allais en boîte. Vis ma vie. J’ai tout de même emmené ma copine à Silverstone, alors c’est dire…
Petit à petit, le site se faisait un nom. Nous couvrions surtout le FIA GT, Le Mans Series, l’ALMS, le GRAND-AM, le SUPER GT et Le Mans. Nous étions une association, donc sans le moindre revenu. Tout était du pur bénévolat. Pour ma part, j’ai commencé à voyager en Europe : Silverstone, Brno, Mugello, Jarama, Spa, Nürburgring, Barcelone, Monza, Zolder, Donington. Les acteurs étaient bienveillants avec nous, les chiffres de fréquentation montaient. Endurance-Info m’a permis dès 2005 de prendre l’avion pour aller à Silverstone. Deux ans plus tard, nous trouvions un peu de budget pour aller au Petit Le Mans (Julie, Antho et moi). Laurent allait à Sebring en mars sur ses propres fonds. Road Atlanta était mon premier voyage aux Etats-Unis mais aussi la rencontre avec Eric Gilbert et Rainier Ehrhardt sur place. Un déplacement incroyable et des poilades à ne plus en finir. Des histoires que je n’ose même pas vous raconter. Avec Eric, c’est du n’importe quoi depuis 2007. Les mots radis, Paulette, ticket de hockey, tampon, Sonny Crockett, trottoir, camion poubelle, et au moins une centaine d’autres ont tous une signification pour nous. Je pourrais vous raconter des dizaines d’anecdotes. Il y a le “Elle et moi”. Depuis ce COVID-19, j’ai le blues de Miami. Cette ville qui m’a fait rêver quand j’étais gamin avec Miami Vice, cette ville que j’ai découvert grâce à Endurance-Info via un déplacement aux 24H de Daytona et Winter Test de l’ALMS à Sebring, cette ville où je me rends chaque année.
Endurance-Info me permet de voyager près de 300 jours/an en temps normal aux quatre coins du monde. Il y a eu des voyages mémorables comme l’Argentine pour la finale World GT1 à San Luis avec Thibaut, ma découverte de Dubai avec Canard, le love hôtel à Suzuka, les cafés et madeleines avec Pierre, l’Australie avec Patrick et le mix auto/vélo/tennis, Sao Paulo, Mexico, Road America, Laguna Seca, Abu Dhabi, etc… Des moments forts, il y en a eu un paquet, comme par exemple Silverstone où j’ai frôlé l’accident cardiaque à cause de Guillaume Moreau et d’une valise. Il y a aussi Suzuka avec Fred Mako, ce qui reste pour moi la plus belle anecdote. Je ne parlerai pas de Los Angeles toujours avec Fred (lui seul sait pourquoi). Que dire aussi des longues discussions avec Romain Dumas ? Le mec mérite une statue pour sa carrière qui n’est pas terminée. Et Pascal Witmeur ? Son imagination débordante m’impressionne toujours autant. Je ne peux pas mettre de côté Lucien Monté qui avec ses archives me permet d’en apprendre beaucoup sur une période que j’aurais aimé vivre. Des histoires vécues grâce à Endurance-Info, j’ai de quoi en écrire un livre. On fait tout cela aussi pour vivre des histoires humaines. C’est ce vers quoi tend Endurance-Info.
Endurance-Info m’a permis de rencontrer un tas de gens. Je n’ai jamais eu vraiment de mal à aller poser mes questions aux acteurs du sport auto. Toutefois, quelques-uns m’ont impressionné la première fois. Je peux citer Henri Pescarolo, Gérard Larrousse, André de Cortanze, Stéphane Ratel, Jack Leconte, Yves Courage, Guy Ligier, Tico Martini, Yannick Dalmas, Alain Ferté, Hugues de Chaunac ou encore Valentino Rossi. Pourquoi eux ? Certainement parce qu’avant de les voir de visu, ils étaient sur le petit écran ou sur des magazines. Je n’ai pas le souvenir que quelqu’un nous ait refusé une interview. Ah si, une fois je vais voir Rubens Barrichello à Daytona qui me dit qu’il est là pour faire une course et pas pour répondre aux journalistes.
J’ai eu la chance de tout apprendre avec Antho, Laurent et Claude. Je vais rajouter Jérôme Mugnier. Tous sont d’une intégrité incroyable. Aucun ne cherchait le scoop mais l’info. Croyez-moi, c’est encore le cas en 2021. Je ne serai peut-être jamais un bon journaliste car le scoop, ce n’est pas pour moi. Je préfère échanger avec les acteurs, boire un café avec eux, manger des madeleines. Depuis 2006, pas une fois nous avons trahi la confiance. Quand on nous dit de ne pas publier, on ne publie pas. Le plus souvent, on se fait devancer par les collègues. Pas grave, on a dit qu’on ne dirait rien. C’est ce que j’appelle une relation de confiance. Bon, on passera sur ceux qui disent ‘je t’appelle avant que ça sorte’ et qui ne préviennent pas. Avoir une info en avance permet un certain confort de préparation avant d’appuyer sur ‘publier’. Si tout le monde pouvait s’en souvenir, ce serait pas mal. Allez on va en mettre une couche pour les constructeurs qui ont encore du mal à comprendre l’intérêt des médias 2.0. Lamborghini fait partie des marques qui ont compris.
Cette équipe d’Endurance-Info était un commando qui ne comptait pas ses heures sans gagner le moindre euro. Beaucoup nous disaient que ça ne durerait qu’un temps, qu’on se lasserait. Laurent a commencé à lâcher prise. Avec Antho, Claude et Julie pour les photos, on continuait au quotidien. A un moment, ça devenait n’importe quoi. J’étais moniteur auto/moto-école et il m’arrivait de faire des interviews au beau milieu d’une leçon, le temps d’une manœuvre. Une pauvre élève s’est tapée trois créneaux le temps d’appeler Jack Leconte. Je me souviens de l’endroit comme si c’était hier. Une fois, j’ai appelé Patrick Dempsey pour une interview alors que j’étais en leçon de conduite. J’avais un créneau (pas la manœuvre mais le créneau horaire). On s’arrête, je fais l’interview. Une fois raccroché, la fille me demande quel pilote était au bout du fil. Je réponds Patrick Dempsey. Elle m’a pris pour un mytho. Je lui ai envoyé l’article en question.
C’est là qu’il a fallu prendre une décision car mener deux métiers de front n’était plus possible. Antho rejoignait ORECA, Laurent ne voulait plus écrire, Claude ne se déplaçait pas, Julie avait un autre métier. Donc, stop ou encore ? Nous sommes fin 2010 et il faut prendre une décision. Tout arrêter ou trouver le moyen de continuer. Arrêter ? Peut-être bon pour la vie sentimentale mais pas pour le moral. Ce métier, qui reste une passion avant tout, m’a tellement amené que c’était impossible de débrancher la prise.
Il a fallu consulter, trouver des partenaires pour poursuivre l’aventure. Le premier à y croire a été Patrice Lafargue avec IDEC. Lecteur de la première heure, Patrice a été le premier à soutenir la cause Endurance-Info en prenant de la pub. En 2012, cette association est devenue une société avec un travail à plein temps assorti d’une carte de presse. C’est là que les voyages autour du globe ont vraiment débuté : quatre passeports, une connaissance millimétrée de Roissy CDG. Près de 40 pays, des anecdotes dans chaque pays, de belles rencontres. On ne retiendra pas les mauvaises qui ont été très rares. Sans mes compères des débuts, sans mes parents qui m’ont poussé, sans les partenaires qui aident, sans les lecteurs, sans la confiance des acteurs et des promoteurs, nous n’en serions pas là. Imaginez si j’avais gardé ma vie d’avant…
L’aventure a pris une autre tournure quand SRO m’a proposé de faire des commentaires. Un jour, Laurent Gaudin, alors manager général de feu la Blancpain Endurance Series, vient me voir pour me demander si je voulais être consultant. Je pense que le gars est fou. Je n’ai jamais fait cela. Laurent Gaudin est celui qui a toujours proposé (et qui propose toujours) des actions pour mettre Endurance-Info en avant. Mais de là à commenter. Après l’aventure Joost Custers, c’est Thomas Bastin qui est entré dans ma vie professionnelle. Dans ma vie de saltimbanque des circuits, j’ai côtoyé deux assidus du travail, deux malades du détail prêts à passer quasiment une nuit blanche tant que tout n’est pas impeccable. Le premier est donc Anthony Megevand, mon compère du début. Un bosseur qui a le soin du travail soigné. Le second est Thomas Bastin, mon partner in crime des circuits. Lui aussi est une machine du détail. Les deux sont des exemples d’intégrité. Je ne compte plus les 400 coups avec l’un et l’autre. Avec le premier, j’ai notamment le souvenir d’une soirée manzana en Espagne qui a donné un gros mal de tête. Avec le second, c’est toujours du grand n’importe quoi, mais sans ce n’importe quoi, la vie sur les circuits serait bien triste. Pourtant, des moments tristes, il y en a eu quelques-uns.
Avec le décès de Claude fin 2020, une page s’est tournée. L’équipe en place est amputée d’un élément clé. David Bristol a rejoint Endurance-Info il y a plus de deux ans. On me demande souvent combien de personnes écrivent quotidiennement. Le nombre est : 2. Depuis toutes ces années, j’ai écrit en voiture, dans le train, dans l’avion, dans un bateau, dans le bus, sur le trottoir, à l’immigration aux Etats-Unis, au restaurant, etc… J’ai même lâché un moment ma copine de l’époque pour écrire un article au resto. Je sais, c’est moche. L’info n’attend pas. Avec le temps, j’ai appris à relativiser l’info et ne pas tout laisser pour publier. La vie est trop courte. En 2009, on m’avait prédit un burn out, le dégoût d’écrire, une lassitude. Rien de tout ça ! Il y a juste quelques regrets de ne pas pouvoir tout faire, de toujours chercher des partenaires pour se développer, ce qui n’est pas mon métier.
Y-a-t-il encore des rêves à réaliser ? Je suis déjà dans une BD signée Philippe Graton grâce à GPX Racing. J’ai roulé il y a peu en R5 Turbo à Dubai, toujours grâce à GPX Racing. Pour vous, cela ne représente rien, mais pour moi il y a une signification. Des envies, il y en a encore un tas sur deux et quatre roues. J’attends de faire une rencontre à quatre avec Stéphane Ortelli, Allan McNish et Laurent Aïello, de retourner à Bathurst, d’aller discuter vélo chez Eddy Merckx, de boire un café avec Marc Madiot, de visiter la soufflerie Specialized en Californie et de choisir un tatouage pour Thomas Bastin, le looser du pronostic.
Voilà donc 15 ans que cette histoire a débuté. Personne ne sait jusqu’où elle nous mènera. Cette nouvelle version d’Endurance-Info doit nous permettre de passer une étape supplémentaire. Un grand merci à tous ceux qui font que l’aventure peut continuer. Ils se reconnaîtront sans aucun doute. The show must go on !