En 20 ans, le volant de compétition qui ne servait qu’à diriger la voiture, est devenu un élément incontournable, véritable ordinateur de bord ou objet digne de fusée spatiale. Les pilotes Porsche et Pascal Zurlinden reviennent sur l’évolution des volants en moins de deux décennies chez le constructeur de Stuttgart.
Le volant est un des éléments devenu de plus en plus important dans la course automobile. Au temps de la légendaire Porsche 917 du Mans, son volant ne comportait pas un seul bouton ou une seule fonction d’affichage. “C’est difficile à croire, mais les développements de cet élément n’ont vraiment pris leur essor qu’en l’an 2000. Depuis, les progrès massifs au niveau du volant sont clairement évidents”, explique Pascal Zurlinden, en charge des programmes officiels chez Porsche. En seulement 20 ans, un simple volant recouvert de cuir s’est transformé en un « élément de contrôle multifonctionnel ». Les pilotes de la toute dernière Porsche 911 RSR ont à leur disposition 30 fonctions sur le volant. À Weissach, deux spécialistes travaillent à la recherche de nouvelles solutions pour avoir encore plus de possibilités de réglage et un meilleur confort.
“En 1999, j’ai disputé la Carrera Cup en tant que Porsche Junior. À l’époque, le volant n’avait pas de bouton, pas de radio, pas de palettes de changement de vitesse, pas de limiteur de vitesse au stand. Nous devions rouler sur la voie des stands en gardant un œil sur le compteur de vitesse”, explique Timo Bernhard, double vainqueur des 24 Heures du Mans. Le pilote allemand a été le témoin direct des rapides progrès de la technologie des volants. Il a pu voir qu’en 2001, les Porsche Cup ont reçu un bouton radio sur le volant pour la première fois. Trois ans plus tard, le nombre de fonctions de la Porsche 911 GT3 RSR, utilisée en American Le Mans Series, est passé à six. À cette époque, les interrupteurs et les boutons étaient installés sur un volant de course automobile, certes modifié, mais disponible dans le commerce ! Les temps ont bien changé !
Au fil des années, la conception a pris de plus en plus d’importance à mesure que les progrès se poursuivaient. Alors que cela importait peu au départ, la disposition de toutes les fonctions est devenue la priorité absolue afin que les pilotes puissent les utiliser de la manière la plus intuitive possible. “C’est comme regarder la télévision à la maison”, explique Pascal Zurlinden. “Les télécommandes des téléviseurs sont constamment modifiées avec de nouvelles touches, des applications, Amazon Prime, etc. En dépit de cela, les utiliser devient rapidement un réflexe. Si je reçois un modèle différent de la même marque, je sais immédiatement comment l’utiliser. C’est aussi ce que nous faisons chez Porsche. Comme la disposition suit toujours le même schéma, les pilotes n’ont aucun problème pour passer d’un modèle de véhicule à l’autre”.
Les pilotes eux-mêmes jouent un rôle clé dans l’organisation de ces boutons. Ils apportent une contribution essentielle au cours de la phase de développement pour assurer la meilleure ergonomie possible. La première étape consiste à positionner les quatre fonctions les plus importantes : le limiteur de vitesse dans la voie des stands, les situations de Full Course Yellow ainsi que les boutons ON / OFF du moteur et de la radio. Les autres fonctions sont ensuite ajoutées selon une liste de priorités. Au cours de ce processus, les développeurs doivent tenir en compte que certaines fonctions doivent être activées par des combinaisons désignées – comparables aux commandes Ctrl+Alt+Del sur un ordinateur personnel.
Romain Dumas revient sur moment précis de la saison 2012. “Je pilotais une Porsche 911 GT3 R à Pikes Peak et j’étais sur la bonne voie pour gagner lorsque la pluie s’est mise à tomber et la neige tombée en altitude. C’est là que j’ai tout perdu. Un bouton de commande pour l’essuie-glace était installé sur le volant. Il fallait appuyer dessus pendant une seconde pour activer la fonction balayage intermittent, et pendant trois secondes pour qu’il soit en continu. C’était beaucoup trop compliqué. À Pikes Peak, les virages s’enchaînent les uns après les autres. Le temps que les essuie-glaces fonctionnent correctement, j’avais perdu trop de temps”.
De nos jours, les pilotes participent à la configuration du volant dès le premier jour, mais aussi à la rédaction des manuels d’instructions ! Imaginez, celui de la Porsche 911 RSR comptent 27 pages ! “Ces commandes sont faciles à mémoriser, ce qui vous permet de vous concentrer entièrement sur la conduite”, explique Matt Campbell. “Cela va tellement vite, nous avons la possibilité de donner notre avis pendant le développement. En tant que pilote officiel Porsche, nous sommes surtout impliqués dans les courses d’endurance. Il faut non seulement que le volant soit intuitif, mais il doit aussi demander le moins d’effort physique possible. C’est toujours le but recherché lorsque l’on travaille sur la nouvelle disposition d’un volant”. La partie ‘client’ exige également beaucoup de réflexion et d’efforts comme par exemple avec la Porsche 911 GT3 R. Le volant doit être facile à utiliser, tant pour les pilotes d’usine que pour les gentlemen drivers, il est donc essentiel de trouver des compromis acceptables lors du développement.
Au cours des dernières décennies, les volants ont considérablement évolué en termes de fonctionnement et de fonctionnalité. La forme et les matériaux utilisés ont également changé à de multiples reprises. “Lorsqu’on compare un ancien et un nouveau volant, il est difficile de croire que les nouveaux modèles sont encore plus légers que les précédents malgré toutes les commandes, les écrans et l’électronique. Cela est dû à l’utilisation de l’aluminium et de la fibre de carbone”, explique Pascal Zurlinden.
Un dernier élément technologique est apparu ces dernières années : l’envoi et la réception de donnés du volant vers les systèmes électroniques de la voiture. La connexion entre le volant et l’électronique de la voiture s’effectue par le biais d’une interface CAN. “Les données circulent dans les deux sens (volant / voiture) grâce à un seul câble. C’est fascinant !” conclue Pascal Zurlinden !