Le Mans, les 24 Heures… Tout un programme largement imbriqué dans mon existence…
Avec une famille originaire de la Sarthe et un grand père garagiste, cet événement qui était une fête pour moi avant d’être une course s’est depuis mes huit ans imposé dans ma vie. J’en ai aujourd’hui 55 et depuis la première victoire de Pesca, je n’ai manqué que 3 départs… 1973, 1980 et 1991.
Ce qui fait le charme de ce rendez-vous, au-delà de l’intérêt de la compétition, c’est de ranger ma vie dans un tiroir pour ouvrir une parenthèse de quelques jours…
Ce rendez-vous est une tradition familiale. Chaque année, le point de ralliement de trois générations se trouve dans une petite ville du nord de la Sarthe… Fresnay. Le point d’ancrage de la famille. Le mercredi des premiers essais, pour l’apéro de midi, tout le monde se doit d’arriver à l’heure… Le second impératif est d’arriver assez tôt l’après-midi pour planter les tentes sur une bonne place à Arnage. Samedi soir, le confort sera spartiate, mais pour rien au monde, mon père de 79 ans n’accepterait de dormir ailleurs. Le montage terminé, le reste de la journée est consacrée aux premiers essais avec la découverte des concurrents, le rappel des odeurs et ces dernières années, la petite larme qui coule au passage des 911 RSR…
On peut regretter mille choses sur l’évolution pas forcément positive des aménagements du public, il n’empêche que pour les oreilles, rien n’a encore pu altérer ce plaisir essentiel… Les diesels ont disparu et les électriques n’ont pas encore pointé le bout de leur capot. Une voiture de course qui passe, ça vous prend aux tripes… On entend les turbos, la boite qui siffle, ça crachote… jamais vous n’entendrez cela à la télé. Comme l’odeur du pneu qui part en fumée au freinage loupé. Mon plaisir du mercredi est là. En bord de piste à l’autre bout du circuit quand les premiers chronos sont peu importants et qu’il faut juste ouvrir les yeux et les oreilles pour profiter de l’instant. Et il ne faut pas croire qu’on a le temps. cette semaine tant attendue défile aussi vite qu’un de ces protos !
Pour les essais qualif’, nous revenons vers le cœur du circuit. Les Esses Ford, la Dunlop, la Forêt et le Tertre rouge sont un terrain de jeu formidable. A chaque point de vue différent, de nouvelles sensations, de sons toujours, mais aussi de points de vues. Le tout avec l’Ipad en main pour suivre l’évolution des chronos sur l’appli. Et bien souvent, plus qu’à la lecture des temps, la qualité des passages répétés et le nombre de tours couverts nous donne une indication sur les teams en forme…
C’est le samedi que notre équipe donne l’image parfaite de passionnés des 24 heures. L’expérience comme dit mon père ! Utilitaire de location, duvets, sacs avec affaires de rechange, des pulls, des bottes, des vêtements de pluie… Nous avons tout connu, alors inutile de vous dire que la liste est exhaustive ! A chaque repas sa glacière. Une bonne réserve d’eau, et d’autres liquides obligatoires bien entendu… Deux jours complets, c’est trop long pour se contenter de sandwiches et trop d’attente (et puis trop cher) pour aller au resto. Autonomie complète et liberté d’action ! c’est notre premier secret pour passer de bonnes 24 Heures.
L’autre, c’est de s’assurer de bien voir… Et là, on épate pas mal de monde avec notre matos… Bien sûr, il y a l’option confortable des places en tribune. Mais rester longtemps au même endroit c’est pas notre truc. Alors l’astuce, mais vous le gardez pour vous (!), c’est d’être plus haut, partout. Depuis 76′, nous avons donc pris l’habitude de nous déplacer autour du circuit avec nos tréteaux et nos planches. Attention ! du bon matériel, il ne s’agit pas de se retrouver au sol à 14h59… Option gratuite du dispositif, cela nous sert aussi de table pour manger…
Et là mes amis, pour rien au monde je ne céderais ma place. Derrière tous les spectateurs, la vue bien au-dessus, une petite bière dans la main droite et la liste des engagés dans la gauche, je goûte au spectacle…
Mon plaisir de l’année, et je peux vous dire que les sourires de mes compères ne trompent pas. La haut, face aux stands Toyota, avec ce vacarme réjouissant du départ, si nous ne sommes pas sur le toit du Monde, je sais qu’il n’existe pas d’autre endroit pour être heureux, quelques heures, finalement si loin de tout. Au Ford, à Mulsanne, Arnage… au Tertre, la vue est imprenable.
Je passe pour un fou à raconter ça aux gens “normaux”, mais ici, une fois l’an je retrouve d’autres milliers de dingues comme ces deux danois qui viennent nous claquer la bise tous les ans, avant le départ, depuis 15 ans… déjà !?! comme le temps passe vite au Mans…