Quand j’essaie d’expliquer ma relation avec les 24H du Mans, on me prend souvent pour un fou. Certains attendent Noël avec impatience… Pour moi, le 25 décembre veut dire qu’on est à la moitié du chemin avant la prochaine édition.
Ma relation avec les 24H a commencé assez tôt puisque mes parents m’ont emmené à 10 mois découvrir les voitures au Pesage puis les années suivantes sur le circuit. On avait toujours le même rituel. On commençait d’abord dans la ligne droite des stands en montant en général jusqu’au Dunlop. Puis, on allait toujours à l’Auberge de Mulsanne voir les prototypes avaler à fond la courbe alors que les chicanes n’existaient pas encore. Et puis, on finissait par l’endroit le plus magique du circuit à mes yeux : Arnage. En arrivant dans le virage, avant de se garer, on entendait déjà les voitures qui ré-accéléraient après le droite. J’avais déjà la larmichette avant de les voir dans ce lieu mythique…
Et des larmichettes, j’en ai versé beaucoup au Mans depuis. Le dimanche matin de la journée Test lorsque j’entends la première voiture prendre la ligne droite des stands pour se lancer dans un tour rapide. Le samedi matin de la course, quand je quitte ma chambre d’hôtel en espérant ne pas la revoir avant que le drapeau à damiers soit abaissé. Le dimanche, après l’arrivée quand toute la pression, qui s’est accentuée depuis plusieurs semaines, retombe. Et surtout le lundi matin, lorsqu’on se dit qu’il faut maintenant attendre 1 an.
J’ai cette chance, depuis plus de 25 ans maintenant, d’être de l’autre côté de la barrière, comme on dit. Et au fil des années, j’ai surtout découvert qu’au-delà d’être la plus belle course du monde, les 24 Heures sont surtout une aventure humaine. On y fait toujours de belles rencontres avec des gens qui ont chacun une relation différente à cet événement hors-norme. Mais dans tous les cas, qu’on soit pratiquant de longue date ou bien novice, chaque édition des 24H ne peut laisser indifférent. Toute la semaine, voire même avant, on sent la pression monter au fur et à mesure qu’on se rapproche du départ. Quel que soit le niveau d’implication dans cette course, du spectateur au pilote en passant par les commissaires ou les organisateurs, on se doit de respecter cette grande dame de bientôt 100 ans. De toute façon, ceux qui y sont arrivés arrogants sont souvent repartis plus tôt que prévus.
Dans l’un des derniers films officiels des 24H, Fred Roba a eu ces mots qui résonnent dans ma tête à chaque fois que je viens au Mans et qui relatent parfaitement cette course : « Le Mans a une âme… celle des millions d’individus qui s’y sont exprimés…. Celle de ceux qui y ont ri ou pleuré, en quête d’une gloire tellement inutile qu’elle en est devenue indispensable »
Voilà, Le Mans, c’est ma vie… Je suis tombé dedans quand j’étais tout petit et les effets sont permanents chez moi… Et si ça redescend, je me connecte sur YouTube et je mets une vidéo du virage d’Arnage pendant la nuit… Et même si le circuit a perdu de sa superbe ou si je suis parfois nostalgique de la liste des engagés d’il y a 20 ou 30 ans, Le Mans restera toujours Le Mans…. La plus belle course du monde !