24 heures du Mans 1964, comment est né une passion…
En ce mois de juin habitant alors au Mans depuis moins d’un an, et après que j’ai lourdement insisté au nom de mon intérêt grandissant pour la chose automobile, ma maman accepté de m’emmener voir les essais des 24H du Mans le jeudi en soirée (c’était l’après-midi libéré à l’école à cette époque), car il n’était pas question de lâcher le garçonnet que j’étais (pas encore neuf ans) dans la grande foule le jour des 24 heures…
Grâce à des billets spéciaux obtenus par Papa, nous avions accès aux balcons au-dessus des stands, auxquels nous pouvions monter depuis le paddock. Avant que les essais ne débutent, nous déambulons donc au milieu des camions et des voitures (le paddock de l’époque, c’était quelque chose avec un mélange désordonné de caravanes, camions transporteurs, voitures, etc…), lorsque je tombais en arrêt devant une magnifique voiture à la robe bleue clair métal, fendue par une large double bande blanche… Impossible de détacher mes yeux de ce long capot et surtout de cet arrière tronqué surmonté d’un gros becquet.
J’étais scotché, en proie à toutes les émotions quand un grand gaillard aux cheveux courts en ouvre la porte et me parle dans un langage dont j’ignorais même jusqu’à l’existence : de l’américain ! Voyant mon incompréhension, un large sourire dessiné sur un visage avenant, il me prend la main et me fait monter au volant de cette Cobra Coupé n° 5. Volant en main, j’étais alors le plus heureux de la terre, à part peut-être les pilotes qui allaient en prendre le volant un peu plus tard dans l’après-midi. Je me pris à rêver de me lancer dans les Hunaudières dont j’avais appris le nom et les vitesses atteintes dans les journaux la veille. Dommage qu’à l’époque aucun smartphone n’ai pu saisir l’instant !
Un peu plus tard dans cette soirée mémorables, je regarder passer cette voiture frappée du n° 5, et j’en avais fait ma favorite. Mais j’appréciais aussi avec les Alpine, d’un tout autre bleu magnifique, dont les jantes avant flasquées me paraissaient irrésistibles.
Et ce n’est que quelques années après que j’ai découvert qui m’avait invité à monter dans cette voiture. En me plongeant dans de vieux journaux automobiles pour passer ma frustration d’habiter alors un pays africain où il n’y avait pas de courses de 24 heures je me suis aperçu qu’il s’agissait de Bob Bondurant, dont le talent et les performances restent légendaires…
Et de ce jour, je suis tombé vraiment amoureux des 24 heures. Toujours à l’étranger, j’ai passé toutes les nuits de 1968 à 1971, avec des amis à écouter Tommy Franklin sur France Inter commenter la course heures après heures.
Ce n’est qu’en 1972 que je suis revenu seul, grand adolescent, voir les 24 h. J’ai passé toute la course sur le circuit sans dormir, profitant de la liberté toute neuve de mes 16 ans… J’ai cette année-là supporté la victoire Matra, mais aussi admiré du haut des auvents au-dessus des stands, durant la nuit, les mécaniciens Alfa Roméo changer un embrayage en pleine course en se brulant les doigts…
Et depuis cette édition, je suis revenu tous les ans… avec le même plaisir et la même passion.