L’ancien pilote LMP1 Audi Sport est un homme bien occupé. En effet, Oliver Jarvis a disputé les 24 Heures du Mans, les essais officiels des 24 Heures de Spa, deux manches d’IMSA puis les 24 Heures de Spa en l’espace d’un mois et demi. Nous avons recontré l’homme pressé en Belgique pour faire un point sur ses différents programmes…
La veille des 24 Heures du Mans, le nouveau règlement Hypercar a été présenté. Vous avez évolué en LMP1 avec les voitures Hybrides chez Audi Sport. Quel est votre regard sur le futur de l’endurance ?
« Au départ, j’ai pensé que cela n’allait pas intéresser les constructeurs, mais j’avoue que j’ai été surpris par l’intérêt que cela a finalement suscité. Aston Martin Red Bull et Toyota ont déjà annoncé leur arrivée. De plus, de ce que j’entends dans le paddock, il y a plusieurs constructeurs qui y regardent de prés et qui pourraient s’engager. C’est toujours un bon signe quand vous avez de nouvelles marques qui veulent rejoindre un championnat. Donc plutôt bien joué de la part du WEC et de l’ACO car le changement était nécessaire. A l’heure actuelle, personne n’est en mesure de se battre contre Toyota et on ne voyait personne arriver. J’ai eu la chance de piloter pour Audi, lors d’une époque que l’on pourrait appeler les années dorées, contre Porsche et Toyota et même Peugeot avant cela. Après plusieurs années avec uniquement Toyota en LMP1, il est bon de voir de grands constructeurs s’impliquer. J’adore le WEC et je lui souhaite le meilleur ! »
Vous avez disputé les 24 Heures du Mans sur la Ferrari 488 GTE #89 de Risi Competizione avec Jules Gounon et Pipo Derani. La course ne s’est pas très bien passée pour vous…
« Pas vraiment, il est vrai, et ce n’est certainement pas ce que nous espérions ! Ce fut un vrai privilège de piloter pour Ferrari et Risi Competizione. Il s’agissait de ma première participation dans une GTE et j’ai adoré cette expérience. J’ai toujours eu un œil sur cette catégorie car c’est là que sont les plus belles batailles. Malheureusement pour nous, nous n’avions pas le rythme nécessaire avec la voiture. Quelqu’en soit la raison, nous n’avons pas été en mesure d’être au niveau des Ferrari AF Corse, ce qui est dommage. Cependant comme je l’ai précisé, j’ai vraiment apprécié et j’aimerais bien y retourner, mais dans des conditions légèrement différentes. »
Vous êtes aussi impliqué dans le programme Mazda en IMSA et vous avez remporté la manche de Mosport et la marque les trois dernières courses. Qu’est ce qui a changé depuis le début de l’année car vous étiez aussi rapide à Daytona et Sebring, mais les résultats n’ont pas suivi ?
« Cela a vraiment commencé l’année dernière. Nous avons énormément progressé car, au départ, nous avons vraiment des soucis de fiabilité. Faire tourner ce moteur quatre cylindres 2 litres turbo demandait beaucoup quand nos concurrents étaient eux avec des 5.4 litres ou même des six. Nous avons plus un moteur de petite capacité et nous avons donc fait un gros programme de développement cet hiver. Malheureusement, Daytona est arrivé un peu trop tôt pour nous. C’est un peu le souci en IMSA. Vous commencez directement par une course de 24 heures à Daytona et presque dans la foulée une course de 12 heures à Sebring, qui elle aussi est difficile. C’est pour cela qu’en cette fin de saison, nous sommes dans une position plus confortable. Le travail paie et les courses sont un peu plus courtes. Nous sommes rapides depuis le début de la saison, mais les choses ne s’imbriquaient pas. Mazda vient de gagner deux courses coup sur coup (trois avec Road America, ndlr) et c’est un vrai soulagement pour toute l’équipe ! Quand vous savez que vous avez une bonne et rapide voiture, mais que les résultats n’arrivent pas, la pression se fait de plus en plus forte. Nous signons deux doublés et nous devons continuer lors des dernières manches restantes. »
D’ailleurs, vous allez finir par une course plus longue…
« Nous allons terminer par Petit Le Mans, une épreuve plus longue que les dernières manche. Cela sera une course très intéressante car avec notre nouvelle fiabilité, ce sera la bonne occasion de prouver que nous ne sommes pas que bons dans les courses de 2 heures 40 ou de 6, mais que nous avons vraiment franchi une étape, que la voiture est aussi résistante et fiable maintenant pour des courses des 10 heures. Ce sera aussi important car la pause entre Petit Le Mans et les 24 Heures de Daytona 2020 n’est pas si grande et il faudra débuter la nouvelle saison au mieux. Je suis optimiste, nous avons vraiment bien travaillé sur la voiture. »
Le programme Mazda est géré par Joest Racing, une équipe que vous connaissez très bien. Quelle est son importance dans votre actuelle réussite ?
« Le rôle de Joest Racing est primordial. Les gens s’attendaient à ce que Joest Racing arrive en IMSA et gagne tout de suite. Mais on oublie que l’IMSA est un championnat très difficile. C’est très différent du WEC au niveau des réglementations, d’un point de vue stratégique. Maintenant, nous travaillons au même niveau que ce que j’ai pu connaître avec Audi en LMP1. La préparation des autos est juste fantastique, les ravitaillements sont parfaits et gérés de main de maître par les mécaniciens. J’adore travailler dans cette écurie ! Cela fait sept ans que j’y suis. Je connais tous les gens qui y sont et la plupart était déjà présent au moment du début du programme Audi. Ils travaillent très dur, mais l’ambiance y est vraiment bonne. »
Vous êtes aussi en Intercontinental GT Challenge avec Nissan et KCMG. Pourquoi ce choix ?
« Parce que j’adore piloter ! J’avais déjà roulé en GT3 avant. L’opportunité de faire des courses comme Bathurst, Spa, Suzuka et Kyalami à la fin m’a poussé à accepter. Il y a de très bons pilotes dans cette série et les courses sont très disputées. C’est sympa d’être roues dans roues avec les autres voitures et comme je l’ai précisé, j’adore le sport automobile… »
Comment est cette auto à piloter ?
« Ce n’est pas facile de sauter dans la voiture surtout quand vous arrivez d’autres séries, mais il y a pas mal de pilotes qui le font. Je me suis vite adapté à cette Nissan GT-R NISMO (qu’il partage avec Edoardo Liberati et Alexandre Imperatori, ndlr). Cette auto est similaire à la Bentley avec son moteur à l’avant. Sur certaines pistes, nous avons été très compétitifs comme à Bathurst où nous aurons dû terminer sur le podium si ce n’est nous battre pour la victoire. » (Au final, son équipage termine à la 18e place aux 24 Heures de Spa, ndlr)
Passer d’une GTE à une DPi puis à une GT3. Est-ce difficile au niveau adaptation ?
« C’est un défi que j’apprécie car chaque auto a ses propres caractéristiques. Du DPi vers GT, c’est vraiment différent. Ensuite, du GTE au GT3, honnêtement, les différences ne sont pas si énormes. La plus grande est certainement l’ABS. En tout cas, je m’amuse beaucoup à piloter ces trois voitures. Je sais que je fais face à des gars qui roulent en GT3 25 week-ends par an et il est difficile d’être à leur niveau rapidement quand vous changez régulièrement d’auto. Cependant, dès que je roule dans la Nissan, je sens que je m’améliore comme mon 9e temps dans ma qualification à Spa l’a montré ! Maintenant au niveau adaptation, j’ai besoin de deux ou trois tours pour retrouver mes marques. »