Quand un gentleman driver se fait épauler par un pilote professionnel, il a un objectif : progresser. Gagner est l’étape suivante. Dans tout sport, il y a un seul vainqueur, alors c’est dire la complexité d’y arriver. Depuis 2017, Olivier Estèves partage sa vie sportive avec Anthony Beltoise chez Saintéloc Racing en FFSA GT. Féru de sport aussi bien dans sa vie professionnelle que personnelle, Olivier Estèves a connu des hauts et des bas depuis 2017, mais le mot d’ordre est resté le même : persévérance. Pour cela, il peut compter sur un Anthony Beltoise toujours bienveillant avec la positive attitude qu’on lui connaît. Tout ce que recherche un gentleman.
Dimanche dernier, Olivier Estèves et Anthony Beltoise se sont imposés au général à Magny-Cours sur une Audi R8 LMS GT4/Saintéloc Racing. On parle là d’une victoire décrochée à la régulière sans le moindre fait de course. Impérial tout le week-end nivernais, Anthony Beltoise a pu compter sur un Olivier Estèves des grands jours qui a su parfaitement gérer la fin de course. Deux jours après la victoire, Olivier Estèves était en essais sous la pluie à Albi, lieu du prochain rendez-vous FFSA GT. C’est là que nous l’avons attrapé pour revenir sur son week-end gagnant.
Surpris par cette victoire ?
“Forcément. Je fais du sport depuis longtemps et j’ai bien conscience que quand on parle de technique, il y a souvent des paliers. Je pense avoir passé un nouveau cap le week-end dernier. Tout est arrivé d’une manière plutôt inattendue.”
Lorsqu’on s’est croisé samedi après la Q1, vous n’étiez pas en grande forme alors que vous veniez de signer un très beau 8e temps à 0.3s de la pole…
“J’étais pourtant plutôt mal fichu en arrivant à Magny-Cours, certainement encore à cause du vaccin. Je suis arrivé relativement fatigué en ayant du mal à me projeter. Je n’étais pas dans le rythme lors des essais libres. Le samedi, j’ai retrouvé la forme avec un très bon chrono en Q1. La voiture était parfaite, les conditions étaient bonnes. Les planètes se sont alignées avec un chrono à 4 centièmes de Fabien (Michal), ce qui pour moi est plutôt inhabituel. Ce temps m’a mis en confiance.”
Pourtant, votre relais en course 1 a connu un couac…
“J’ai eu un accrochage qui m’a fait descendre en queue de peloton avec 15 places perdues. Ensuite, il y a eu la fantastique remontée d’Antho jusqu’à la 5e place finale.”
Et cette course 2 ?
“Les conditions étaient idéales. J’ai pris l’auto en tête de course, j’étais en confiance. Compte tenu de ma bonne qualif’, je devais pouvoir tenir la concurrence sans trop forcer. J’ai vu que l’écart ne se réduisait pas.”
Un peu de stress ?
“J’ai eu quelques moments de solitude (rires). Quand mon ingénieur m’a dit à la radio : “Olivier, il reste 4 minutes”. Il fallait rester concentré et serrer les fesses dans le baquet sans se désunir. Je ne me suis pas laissé atteindre par l’effet de gagner une course car je n’avais jamais pensé que cela puisse arriver un jour.”
Quand on est en tête d’une course d’un Championnat de France FFSA GT et qu’il ne reste que quelques minutes, on pense à quoi ?
“J’étais pleinement concentré sur ma fin de course. Il faut juste penser au prochain virage et au prochain tour. Je n’ai surtout pas pensé à un éventuel safety car. Je me suis dit : “advienne que pourra”. Je n’ai pas eu cette peur de gagner. Après la victoire, j’ai reçu pas mal de marques de sympathie de personnes du paddock, ce qui m’a beaucoup touché.”
L’hiver avait pourtant été positif…
“J’ai roulé en ROSCAR et en GT4 South European à Portimao avec des victoires. Il faut tout de même relativiser car le niveau était inférieur au FFSA GT. Malgré tout, être en tête d’une course donne des sensations. Toute cette accumulation m’a aidé.”
Partager votre volant avec Antho depuis 2017 dans la même équipe est aussi un avantage ?
“Il y a entre nous cette proximité et cette connivence. La présence d’Antho est fondamentale. On peut aussi parler de l’ambiance Saintéloc Racing où les échanges sont permanents. Tout le monde fonctionne en équipe. Les autres pilotes professionnels n’hésitent pas à me donner des conseils quand ils me voient en piste. Tout le monde est bienveillant. Nous sommes aussi dans un sport d’équipe.”
Gagner une course en FFSA GT était envisageable ?
“Pas une seule seconde, surtout à la régulière. Ce n’est pas pour autant que je ne travaillais pas pour cela. Antho a accepté de coacher quelqu’un qui venait de nulle part. J’ai aussi cette motivation de tout faire pour remettre Antho le plus haut possible dans une feuille de classement, donc de faire du mieux possible. Je fais tout le plus sérieusement possible en compensant avec le travail. Au début, je me suis pris des coups, surtout la première année. C’est le problème quand tu n’as pas d’expérience et que tu es en queue de peloton. Il y a des hauts et des bas comme dans tout apprentissage.”
Vous avez pensé tout arrêter ?
“Je me suis accroché même s’il y a eu des moments où en rentrant d’un meeting, je me suis dit que c’était trop haut pour moi. Par exemple, en 2017, je ne comprenais pas trop cette histoire de pick up sur les pneus. Les pros ont l’habitude de cela car pour eux c’est une seconde nature. J’ai bien mis une saison à comprendre comment ôter le pick up correctement sur un pneu. Il y a des moments de découragement. Avec un Sébastien Chetail à la tête de l’équipe, tu persévères. Antho a une qualité immense : il positive tout le temps, même quand tu fais une connerie. Je ne suis pas quelqu’un qui lâche, donc je m’accroche. Plus je prends des coups, plus j’y retourne.”
Le tandem Beltoise/Estèves va être regardé différemment…
“Je reste réaliste. Ce n’est pas parce que nous avons gagné une course que tout va être révolutionné. Loin de moi l’idée de me dire que ça va le faire tous les week-ends. Il faut déjà être régulier et terminer dans le top 10 le plus souvent possible. Ce championnat a un niveau de folie et il faut rester à sa place.”