Olivier Panis, team principal de Panis-Barthez Compétition, est actuellement engagé avec son équipe en ELMS. Lors de la dernière manche à Monza, il a fait le point avec nous sur les différents nouveaux projets de l’écurie pour 2020, sur la non-sélection de la 2e voiture aux 24 Heures du Mans et nous a livré sa vision de l’avenir et de la catégorie Hypercar…
Olivier Panis est déjà tourné vers le futur alors que nous ne sommes pas à mi-championnat en ELMS. « Nous avons actuellement deux LMP2 et en avons même une troisième. Vu que l’équipe a grandi d’année en année, que nous avons réuni une très belle écurie, nous allons donc avoir des nouveaux challenges la saison prochaine. » En parallèle de l’ELMS et de l’Asian Le Mans Series, l’écurie a l’envie de se lancer dans de nouveaux championnats outre-Atlantique mais également de continuer, en association avec Tech1 Racing, l’aventure du Blancpain GT Series et réfléchit également à s’engager en GT4.
L’une des pistes pour 2020 privilégiée par Panis-Barthez Compétition est l’Asian Le Mans Series. L’équipe y a débuté cette année avec une Ligier JS P2 pour le trio Matthieu Lahaye, son frère, Jean Baptiste, et François Heriau. Avec deux podiums au compteur, Olivier Panis se montre ravi de cette première expérience. « Notre envie, notre but est de refaire l’Asian Le Mans Series cet hiver. Nous sommes satisfaits de la dernière saison, ce fut vraiment une belle découverte et nous souhaitons vraiment y retourner cette fois avec deux voitures. »
La saison 2019 est actuellement tournée vers l’Europe où Panis-Barthez Compétition engage deux Ligier JS P217 en European Le Mans Series, championnat dans lequel l’écurie a débuté en 2016. L’envie de continuer est toujours là, mais Olivier Panis émet néanmoins certaines réserves. « Rester en European Le Mans Series est aussi notre priorité car il y a un vrai championnat, une vraie compétition et le niveau aujourd’hui est tout simplement incroyable. Si cela va dans le sens du business plan que l’on a et que l’on voudrait garder, nous avons l’intention de continuer avec au moins deux voitures. J’adore ce championnat, c’est bien organisé, le niveau est vraiment très bon, les courses sont belles, je n’ai rien à redire à ce niveau là. Cependant, attention, car la LMP2 coûte de plus en plus cher et, à un moment donné, si cela continue, on n’y arrivera plus. En effet, il faut trouver de plus en plus de partenaires et des pilotes avec du budget. Certes, il y en a, mais pour pouvoir gagner des courses, il faut des pilotes rapides mais avec du budget. Avoir un bon équipage est compliqué au niveau de l’équilibre performance et financièrement acceptable ! Le souci est que l’on met des essais le mercredi maintenant qui coûtent 40 000 euros. Si on les annulait, on économiserait 200 000 euros par saison! En Formule 1, ils l’ont fait : cinq journées d’essais dans l’année et terminé ! Les équipes pourraient souffler un peu, les budgets pilotes seraient un peu moindres. Pour cela, il faut que ça parte du principe suivant : aider les équipes privées ! Grace à Ligier et Norma qui ont boosté la catégorie LMP3, il ne faut pas l’oublier, le championnat ELMS est fantastique. Alors, pour une fois dans le sport auto, essayons de ne rien casser, de stabiliser les choses et de perdurer. J’aimerais que les décisionnaires prennent conscience de la conjoncture et des sommes actuellement investies. L’ELMS et Le Mans restent nos deux priorités, mais pour l’avenir, il faut nous donner les moyens à tous de pouvoir tenir financièrement. Le souhait est de continuer à grandir à travers de nouveaux défis et, bien évidemment, d’avoir deux voitures invitées aux 24 Heures du Mans l’année prochaine ! »
Une troisième « corde » devrait être ajoutée en 2020. En plus de l’Asian Le Mans Series et de l’ELMS, l’écurie française souhaite traverser l’Atlantique. Ce n’est pas nouveau, l’équipe y pense depuis un moment déjà et semble prête à franchir le pas. « Notre troisième envie est de faire de la compétition aux Etats Unis, nous prévoyons donc de disputer les 24 Heures de Daytona et les 12 Heures de Sebring avec deux voitures. Nous travaillons déjà sur ces trois directions à l’heure actuelle car nous sentons, pour Panis-Barthez Compétition et Tech1 Racing, qu’il est nécessaire et intéressant de s’expatrier. »
Pour finir, le GT n’est pas du tout mis de côté chez Panis-Barthez Compétition. Mieux encore, de plus grands projets sont dans les cartons. « Nous sommes très fiers de travailler avec Lexus et d’être en Blancpain GT Series. L’ambition est de faire ce championnat en 2020 avec deux Lexus RC F GT3. Nous avons pas mal de demandes de jeunes pilotes et de Am aussi. D’ailleurs, nous avons déjà Fabien (Barthez) dans une et j’aimerais bien avoir de nouveau Eric Debard chez nous sur la 2e. Je dois même avouer que nous regardons aussi du côté du GT4. Cela a beaucoup grandi en France, il y a un très bon niveau et Toyota nous pousse un peu pour engager deux Toyota Supra, donc on y réfléchit. »
L’année 2019 n’est pas forcément toute rose. Certes, l’Asian Le Mans Series s’est très bien passé, l’écurie engage maintenant deux autos en ELMS en LMP2, mais il y a eu un couac il y a peu de temps. En effet, la seconde Ligier JS P217 de l’écurie a été mise sur la liste des suppléants alors que l’équipage était bouclé. « Je n’ai rien à cacher : la 2e voiture qui n’a pas été prise aux 24 Heures du Mans alors qu’officieusement elle devait être là, nous a coûté une perte de 300 000 euros, mais je crains qu’il ne faille faire plus de politique que de sport pour arriver à ses fins, mais cela ne me ressemble pas. »
Dans le contexte actuel où tous les principaux intéressés (team managers, écuries, pilotes, mécanos, journalistes, etc…) et le public attendent avec impatience la publication du futur règlement, Olivier Panis nous livre son avis. « Je pense qu’ils sont un peu à côté de ce qu’il faut faire, mais cela n’engage que moi ! J’en ai par ailleurs discuté il y a quelques temps avec des professionnels que je connais très bien chez Rebellion comme Calim (Bouhadra, Vice President du groupe Rebellion) mais encore Hugues de Chaunac pour ORECA et Jacques Nicolet pour Ligier. Les 24 Heures du Mans sont une course que j’aimerais vraiment gagner un jour avec l’équipe. C’est une épreuve magique pour tous les gens qui y vont et qui y participent. Là, je pense que nous sommes à un tournant important et c’est aussi la raison pour laquelle nous souhaitons nous expatrier. Je pense qu’au Mans, nous devrions accueillir les DPi, qu’on les booste un peu pour qu’elles aillent cinq secondes plus vite que les LMP2. Il ne faut pas toucher à ces dernières car, faut-il le rappeler, on nous a fait investir des fortunes dans ces nouvelles LMP2 il y a deux ans. Si on leur enlève 100 / 150 chevaux, certaines personnes vont mal le prendre ! Il y aurait aussi un souci de sécurité avec les GTE car, à l’heure actuelle, nous sommes plus rapides. Il ne faut pas oublier que les GTE qui roulent au Mans valent très chères et que des équipes privées font du business avec. Si on ne va pas vers le DPi ou quelque chose d’approchant, cela va complètement tuer les business plans de tout le monde. C’est certainement une bonne idée, mais dans trois ans. En attendant, il faut une passerelle. De toute façon, les constructeurs viennent et partent, c’est cyclique comme dans tous les championnats. Les seuls qui restent et qui font le plateau, ce sont les privés, mais on les oublie souvent ! Il y a une remise en question de la part de l’ACO. Je comprends et je sais que ce ne doit pas être simple de trouver la solution, mais je parle au nom de Sarah, Simon (Abadie) et moi-même : si cela ne se passe pas comme ça, cela peut mettre énormément de choses en péril derrière ! C’est inquiétant et il faut trouver une solution qui convienne à tout le monde, même si je sais qu’elle n’est pas évidente. Je dirais même que si Toyota part, tant pis, car en face on pourrait avoir Chevrolet, Mazda, Acura, Cadillac et d’autres qui seraient intéressés. Ça fait plusieurs constructeurs, on peut communiquer autour de cela et ainsi faire venir les gens. »
La situation est compliquée en ce moment, on ne peut pas le cacher. Moins de constructeurs avec le retrait d’Audi en 2016, Porsche en 2017, Ford et BMW en 2019, le futur règlement LMP1 que tout le monde attend et qui tarde à sortir. Cependant, l’envie est toujours là et Olivier Panis résume très bien la situation. « On fait énormément d’efforts, mais on veut aussi se faire plaisir. Le but n’est pas de devenir riche avec le sport automobile, sinon ça se saurait. Nous voulons faire de belles choses, ne pas perdre d’argent et surtout ne pas en remettre à chaque fois. L’ambiance serait meilleure si on mettait au point une stratégie commune. Nous souhaitons que l’ACO réussisse, que nous allions au Mans avec nos voitures et qu’on se régale ! »