Une Supercar française ? C’est le courageux pari que se sont lancés Bruno Prata et Rodolphe Tousset. Vous pourrez très prochainement découvrir leur voiture, la ORAGE au monstrueux moteur V8, dans les rues du Mans au cours de la Parade des Pilotes. Nous avons pu rencontrer récemment Bruno afin de découvrir ce tout nouveau constructeur français, Prato Automobiles, qui souhaite mettre à disposition de ses clients une bête de route prête pour le circuit.
Tout est parti de l’IUT d’Annecy en Haute-Savoie en 2001. Un binôme se forme lors des travaux pratiques. « Nous avons tout de suite perçu les qualités de l’autre. Tous les deux passionnés de voiture, l’un de muscle cars américaines, l’autre de belles sportives italiennes. Une amitié s’est vite forgée et nous sommes toujours restés amis depuis. » Après l’IUT, Bruno obtient son diplôme de designer automobile et Rodolphe celui d’ingénieur en mécanique. Les pions sont en place. Mais tous les amis d’Université n’en viennent pas pour autant à construire leur propre Supercar. « L’élément déclencheur, c’est la crise de 2008. Me retrouvant sans travail, j’ai eu l’idée de dessiner des kits carrosserie afin de trouver une source de revenus. Avec Rodolphe, vivant aux Emirats Arabes Unis, nous avons donc créé la marque STINGER afin de vendre ces kits sur base de BMW série 7 au Moyen-Orient. Cela a bien fonctionné, nous avons pu faire une petite série de véhicule. Nous avons également développé des kits de gros freins à hautes performances et déposé un brevet pour la couverture des étriers de freins avec des feuilles de métaux (argent, or, platine, palladium,…). Nous avons ainsi vu que nous pouvions réellement allier nos compétences respectives, les siennes en ingénierie, les miennes en design. »
L’époque est alors au boom des supercars lancées par des constructeurs de taille relativement modeste. « Pagani et Koenigsegg nous ont donné l’idée d’aller plus loin. Pourquoi pas nous ? ». Les deux amis prennent le temps de bien mûrir le projet avant de se lancer. « Il était important de se différencier des autres. Rodolphe lance l’idée de faire une supercar à moteur avant avec un capot imposant comme les voitures des grandes heures des courses d’endurance telles que Cobra Daytona et Ferrari 250 GTO ». Se lancer dans la conception d’une supercar ne nécessite pas d’être ingénieur en électronique : « Le marché de ce type de véhicule a tendance à partir vers la course à l’électronique embarquée et les aides à la conduite en tout genre. Notre vision est bien différente, en effet nous voulions revenir à la quintessence d’une Supercar, à savoir la gueule, le bruit et le plaisir … la passion tout simplement. Nous avons ainsi défini l’esprit de la marque. Les sensations pures pour le pilote, une voiture de course pour la route. »
ORAGE se base sur un châssis en aluminium hydroformé. « Nous avons veillé à nous appuyer sur des partenaires spécialistes de la compétition afin de nous aider à gagner du temps et de l’expérience dans la conduite d’un tel projet. »
« Se passer de KERS était pour nous évident car cela ne collait pas du tout avec l’image et la philosophie de notre marque. Mais cela n’est pas antinomique d’une voiture extrêmement puissante, voire surpuissante. Bien au contraire… « Le moteur a donc été développé en interne. Nous avons conçu un V8 spécifiquement pour ORAGE, c’est ainsi qu’est né un 8,1 Litres atmosphérique développant 900 chevaux et 1044 Nm ! » Il s’agit donc du moteur V8 atmosphérique le plus puissant au monde monté dans une voiture de série ! Et nous le verrons plus loin, ce n’est pas la seule première mondiale de cette Supercar.
« Rodolphe m’a fait entièrement confiance pour le design de l’auto (de même que je lui ai fait entière confiance pour la mécanique) mais il m’a précisé qu’il n’avait qu’une seule exigence : que les trompettes d’admission du moteur soient, comme sur les voitures de course des années 70, visibles. Cela a été un challenge, autant pour moi que pour lui dans le développement du système d’admission d’air. »
Pour passer la puissance de cet énorme V8 placé en position centrale avant, la boite de vitesse a elle aussi été spécifiquement développée pour ORAGE. Pour l’instant, elle est mécanique : « le pilotage à l’état pur ! » clame Bruno. Le premier rapport emmène la bête jusqu’à 110 km/h « afin de favoriser le 0 à 100 sans changer de vitesse et en moins de 3 secondes. » L’étalement de la boite 6 n’est pas prévu pour faire des économies de carburant sur le 6ème rapport. « Ca pousse tout le temps jusqu’à atteindre la Vmax que nous avons visée, à savoir plus de 350 km/h, mais limitée par les pneumatiques, ce qui est amplement suffisant ! » Par la suite, une boite séquentielle X-Trac à palettes au volant sera disponible selon le souhait des clients. L’arbre de transmission est en carbone, les freins en carbone-céramique. A l’avant, on trouve des disques de 400mm de diamètre et des étriers 6 pistons. A l’arrière, des disques de 380mm et des étriers 4 pistons. Les jantes en alliage d’aluminium sont également spécifiques.
Toute la partie connectique sous le capot moteur est confiée à de la connectique type aviation en or massif 24 carats pour une fiabilité maximale dans des conditions extrêmes. C’est une première mondiale pour une voiture de route. La lanternerie n’est pas en reste en terme de première mondiale. Les feux et projecteurs reposent ainsi entièrement sur la technologie OLED.
Contrairement aux autres constructeurs, Bruno et Rodolphe sont partis du châssis totalement équipé de sa mécanique pour dessiner la voiture. « Bien entendu, nous avions déjà une idée de ce à quoi elle ressemblerait mais nous avons attendu que tout soit bien en place, que le châssis ait pu rouler à nu, avant de l’orner de sa carrosserie. Cela nous a évité des aller-retours, des atermoiements. » Autre particularité de cette création française : « nous avons tout créé virtuellement, sans passer par l’étape de validation par des maquettes. Directement de l’écran à la réalité ! » Seuls certains petits détails seront ajustés entre le modèle de présérie que vous verrez dans les rues du Mans et les moules des pièces définitives. « Tous les éléments de carrosserie ou de décor intérieur, sont soit en carbone, soit en aluminium taillés dans la masse. Il était important qu’aucune pièce en plastique ne soit présente… La philosophie de Pagani nous a guidé quant à la qualité de réalisation mais en partant sur une toute autre silhouette. »
Le plus difficile pour une marque naissante est évidemment de se définir une identité propre. « Le langage formel devait immédiatement nous permettre de nous distinguer de ce qui existe par ailleurs. C’est passé par une recherche graphique. Notre concept se perçoit en vue de dessus. La cellule de vie constituée par la coque en carbone est prise en étau dans les mâchoires formées par la carrosserie. » C’est la raison pour laquelle la partie centrale est à la fois en carbone à l’extérieur et à l’intérieur afin de conserver une continuité, une homogénéité entre le capot et la planche de bord. « Cet effet de mâchoire constitue notre identité stylistique et graphique. Je souhaitais aussi que les volumes soient relativement simples, que la voiture ne souffre pas de rajouts inutiles comme on peut en voir sur d’autres supercars. Je voulais revenir à l’essence de la carrosserie authentique, qu’elle ne soit pas trop ostentatoire. » Il faut dire qu’avec des voies de 2,08m à l’arrière et de 2,01 m à l’avant, ORAGE est déjà bien posée sur la route ! A cela s’ajoute l’identité sonore du « tonitruant V8 et ses montées en régime aussi violentes que stratosphériques (7250 tr/min)… Inutile d’en rajouter pour déclencher l’effet Waouh ! »
L’un des incontournables de ces voitures ultra élitistes, c’est d’offrir une très grande possibilité de personnalisation. « Chaque voiture devra être unique. Dès qu’un type de carbone ainsi qu’une nuance de couleur auront été choisis par un client, ils seront retirés du catalogue ! » La partie carbone au centre pouvant être colorée, la palette de combinaisons offertes est très large et permet une configuration réellement personnalisée, propre à chaque acheteur.
La voiture sera donc visible lors de la Parade des Supercars le vendredi 16 juin au Mans. « C’était très important pour nous que la voiture soit dévoilée en France. Il l’était tout autant de démontrer lors de sa présentation qu’elle roule ! Nous n’avons pas voulu, comme beaucoup d’autres, présenter une voiture virtuelle puis chercher des investisseurs pour lanver la fabrication. Nous avons préféré rester seuls maitres de notre projet et demeurer dans l’ombre, le temps de créer et développer ORAGE durant 5 ans, puis de la présenter roulante ! Les salons, ce sera pour plus tard » Aujourd’hui elle existe, elle est concrète, elle est sur la route même si elle est encore jeune. « Elle effectuera de nombreux tests intensifs sur circuits et sur différents types de routes (montagne, ville,…) durant tout l’été aux mains d’un pilote professionnel afin d’achever la mise au point. L’homologation se fera à l’automne. » Il faut noter que la conception a intégré toutes les contraintes de tous les pays et que la voiture sera donc homologuée sur tous les continents. Ce tout premier exemplaire servira à faire la promotion du modèle et de la marque. Elle voyagera à travers le monde afin de se faire connaître et participera à quelques grands événements automobiles. « Elle sera notamment dévoilée à la presse lors du concours d’élégance de Chantilly en septembre. Nous aurons un stand, exposerons la voiture et participerons au concours d’élégance. Puis elle voyagera dans des salons en Europe, au Moyen-Orient et en Asie. Elle participera à des rallyes, notamment le Gumball 3000 pour le 20ème anniversaire de cette épreuve, en Mai-Juin 2018 entre Londres et Tokyo. Les organisateurs du Gumball seront d’ailleurs présents au Mans pour découvrir la voiture. »
« Nous avons comme objectif de produire 8 exemplaires par an à partir de 2018. Les voitures étant assemblées entièrement à la main et les options étant faites sur mesure pour les clients, il est difficile d’augmenter le rythme de production sans affecter le niveau de qualité que nous nous imposons. Notre but et rêve ultime est évidemment de parvenir à homologuer la voiture pour la compétition dans les courses d’endurance. »
Pour lancer une marque, il fallait évidemment un logo. Celui de Prato Automobiles (Pra pour Prata, To pour Tousset) allie ainsi le lion or sur fond blanc du signe zodiacal de Rodolphe et de la neige des Alpes, le piment rouge sur fond bleu ciel est le porte bonheur que les napolitains sculptent dans des morceaux de corail (Bruno ne saurait renier ses origines italiennes…). Enfin, la fleur de Lys est là pour symboliser les racines françaises de la marque. ORAGE et Prato Automobiles se lancent dans l’arène des Supercars, l’initiative méritait d’être saluée et nous ne manquerons pas de la suivre.
Vous pouvez les contacter ici : info@pratoautomobiles.com et media@pratoautomobiles.com