A trois meetings de la fin de saison WEC, Signatech-Alpine ELF ne pointe qu’au 5e rang du championnat LMP2, mais l’équipe française conserve toute ses chances de couronne mondiale malgré un handicap de 30 points à combler. Rien que la victoire aux 24 Heures du Mans rapporte 38 points et Signatech-Alpine reste sur un succès en terre sarthoise. En attendant, Philippe Sinault continue de peaufiner le retour en piste de l’ORECA 07 de Thomas Laurent, Andre Negrão et Pierre Ragues. Le patron de Signatech a fait le point pour Endurance-Info sur la situation actuelle et l’avenir.
A l’image des promoteurs, vous mettez en place différents scénarios ?
“Dès le début du confinement, nous avons pris des dispositions pour mettre le personnel de l’équipe de course en chômage partiel. La reprise doit se faire début juin car nous savons combien de temps il nous faut pour remettre la machine en marche. Bien entendu, il y a encore des suppositions pour la date de reprise des compétitions.”
Comme tout le monde, vous suivez les évolutions des calendriers…
“Dans ce contexte, il faut être courageux et les promoteurs sont extrêmement courageux de se repositionner. Les nouvelles dates amènent des perspectives même si on sait qu’il n’y a pas la moindre garantie. C’est grâce au courage des promoteurs qu’on peut faire notre métier. Dire non est la solution la plus facile et la moins courageuse. Il faut que les gens soient respectueux de ceux dont c’est le métier et ne pas céder à la panique.”
La saison blanche serait catastrophique ?
“Ce serait pire que tout ! Qui peut passer le cap d’une saison blanche ? Il faut de l’activité car le gouvernement ne va pas accepter le chômage partiel jusqu’à la fin de l’année. Du côté de l’Alpine Elf Europa Cup, nous avons repositionné le calendrier même si la saison sera plus courte.”
Spa figure au calendrier WEC avant Le Mans. Ce serait un moindre mal ?
“Avoir une course avant Le Mans est important, mais si on devait débuter au Mans, alors on débutera au Mans. C’est plus compliqué pour les équipes ELMS avec une saison qui n’a pas commencé. En fonction des déclarations du gouvernement, on peut voir le verre à moitié plein ou à moitié vide. On espère que des essais pourront être organisés en amont.”
Le huis clos peut être une solution ?
“Il faut considérer le huis clos comme une bonne alternative. Un huis clos au Paul Ricard me conviendrait bien. Je fais confiance à l’équipe de Gérard Neveu pour organiser cela du mieux possible. Je sais que la distanciation sociale sera compliquée à respecter. L’autre sujet sera les hôtels et les restaurants. Aujourd’hui, on peut réserver un hôtel pour une raison professionnelle. Est-ce que la course automobile est considérée comme un déplacement professionnel ? Je l’espère…”
Vous travaillez pour 2021 ?
“Je suis d’un naturel optimiste, le sportif est optimiste. Il est clair que les choses vont être chamboulées. Je fais confiance à la nature humaine pour trouver un vaccin. J’ai en mémoire Fukushima. Lorsque la catastrophe est arrivée, nous étions à Sebring avec Nissan. Ils étaient sous le choc, mais, tout de suite, ils ont dit ‘vous verrez, on surmontera cet événement dramatique’. Donc, oui je travaille pour 2021 et c’est ce qui m’anime le matin. En pensant à 2021, on va régler 2020. Je sais que cela peut être indécent de chercher de nouveaux partenaires et de demander de l’argent dans cette période. Ce temps sans compétition me permet de réfléchir à des projets au sens large. Durant ces deux mois, j’ai demandé à mes collaborateurs de réfléchir à ce que l’on peut faire et surtout innover. Je joue aux petites voitures depuis 30 ans et je veux continuer. Bien sûr, j’aimerais faire rouler une LMP1, c’est quelque chose que j’ai toujours dans un coin de ma tête.”
Le sport auto va changer ?
“Le sport auto doit se réinventer car on était arrivé à des extrêmes. Beaucoup de disciplines, beaucoup de championnats et tout cela a tendance à brouiller les messages. Il faut retourner à des choses lisibles et plus rationnelles. Tout le monde est conscient qu’il y a une certaine forme de rejet des excès de ces dernières années. On est au bout d’un système. J’ai la chance d’avoir les deux programmes confirmés (ELMS + WEC, ndlr) et je tiens à remercier l’ensemble de nos partenaires. C’est agréable et primordial. On échange et on se projette. Il paraît qu’on a les partenaires qu’on mérite. En Alpine Elf Europa Cup, tout le monde a confirmé sa présence. Il ne faut pas briser la continuité et la dynamique en place.”