Suite de notre interview avec Pierre Ragues (1ere partie ICI). Cette fois-ci, on parle Rallye et de la façon dont le Français a eu accès à cette discipline éloignée du monde des circuits. Il a disputé son premier rallye mondial fin 2020 à Monza sur une Alpine A110 Rally RGT qu’il partageait avec son copilote, Julien Pesenti.
Après les 8 Heures de Bahrain WEC, on vous voit inscrit sur la liste des engagées du Rallye de Monza WRC. Ensuite, vous enchainez avec le Rallye Monte Carlo et votre programme 2021 tournera autour du rallye. Pourquoi ce choix ?
« J’ai toujours rêvé de faire le Rallye de la Côte Fleurie, à coté de chez moi. Depuis que je suis gamin, c’est l’épreuve phare de ma région. Mon père a fait pas mal de rallyes étant jeune. Etant dans le milieu de l’automobile, l’entreprise a aidé des pilotes ou des compétitions de rallye. On ouvrait le Rallye de Deauville avec mon papa, j’étais d’abord été copilote puis je suis passé pilote. C’était sympa, on partageait pas mal de choses, on se retrouvait un peu père / fils comme en Karting où il me faisait la mécanique. En 2013, on s’est dit que ce serait bien de mettre des numéros sur la voiture pour voir ce que cela donnait.
Un ami achète une Skoda S2000 quatre roues motrices, il me la propose et j’accepte. Je n’aurais jamais pensé débuter avec une aussi grosse voiture, mais je me suis dit, qu’avec mon passé, c’était aussi bien de commencer avec une voiture avec de la puissance et qui freine bien. On est alors en 2014. On fait l’épreuve de la Côte Fleurie et, quinze jours avant, j’avais appris qu’une seule Alpine était acceptée aux 24 Heures du Mans. Philippe (Sinault) ne pouvait donc qu’en aligner une, nous sortions d’un titre en Le Mans Series en 2013 et je ne me voyais pas aller autre part que chez lui. Le souci est qu’il avait déjà signé trois pilotes et a été obligé de les mettre dans l’auto, donc pas de volant pour moi. Cette Skoda de rallye étant toujours disponible, je m’inscris à un rallye de Championnat de France afin de rouler et découvrir une autre discipline. Puis j’en fais d’autres et tous les ans depuis 2014, en fonction de mon programme circuit, je prends régulièrement part à des rallyes.
Etant proche de Philippe Sinault et de Signatech, il y a cette Alpine A110 qui sort avec une version Alpine Cup. Je lui dis qu’il faudrait faire une Alpine de rallye, mais il y avait déjà pensé avant moi (rire). J’ai alors pu faire une journée de développement avec eux, j’ai pris beaucoup de plaisir au volant de cette voiture, ne sachant pas à quoi m’attendre avec une propulsion, une GT, sur des petites routes. Je suis plus habitué à des quatre roues motrices avec 300 chevaux, là c’est la même chose sauf que c’est sur les roues arrière. Cette expérience m’a plu et l’idée de m’engager en rallye avec une Alpine a fait son chemin. Signatech Alpine était intéressé pour que la voiture débute à Monza en WRC en catégorie RGT. L’histoire s’est faite un peu précipitamment, l’annonce de l’organisation de ce rallye étant arrivée tard. On s’est dit pourquoi pas car je connais déjà un peu le circuit de Monza. Le samedi, c’était plus dans la montagne mais j’ai bien géré, faisant du rallye depuis plus de six ans, je commence à avoir un peu d’expérience en termes de prise de notes.
De plus, j’ai une structure depuis 2015 avec un mécanicien à plein temps et avec d’autres en free lance. On est monté jusqu’à cinq personnes à temps complet car, à un moment, nous avons fait pas mal de sous-traitance technique pour Peugeot lorsque la marque était en Championnat du Monde de Rallycross. J’avais toujours des contacts avec mes gars donc il a été assez facile de réunir une équipe un peu plus fournie pour Monza. Voilà comment l’aventure a démarré… »
En plus, vous gagnez Monza et vous décidez de vous aligner au légendaire Rallye Monte Carlo…
« Un jour, j’ai eu le rêve de préparer le Monte Carlo sauf qu’avant de s’aligner sur ce genre de rallye, il y a des épreuves à cocher. Ca commence par le Rallye d’Antibes où l’on passe dans les spéciales du Monte Carlo, mais au mois de juin, donc pas dans les mêmes conditions. Il y a aussi le Rallye du Dévoluy, dans la région de Gap, avec des conditions de neige et de verglas. On arrive à Monza et là aussi on a coché pas mal de cases car on a roulé sous la neige et dans la boue. Le résultat est bon, l’envie vient d’essayer de se lancer. Il y a ce championnat RGT alors pourquoi pas le disputer. Ce n’est pas très prenant car ce ne sont que six épreuves et tout le monde ne les fait pas. Cela me permet, si j’ai un programme circuit, de pouvoir jongler avec les dates.
Voilà un peu comment on s’est retrouvé inscrit au Monte Carlo, mais la date de clôture des engagements devait être le 16 décembre et nous avons appuyé sur le bouton le 15 au soir. Nous avons vraiment attendu le dernier moment car il y a pas mal d’inconnus comme organiser une séance sous la neige, je veux dire la ‘vraie’ avec des clous. Ce fut un peu chaud, difficile cette année car, par rapport aux éditions précédentes, aux dires des autres pilotes, c’était un vrai Monte Carlo. On ne savait pas ce que l’on allait croiser, de la neige, du verglas quand on rentrait dans les virages. Même si on a des ouvreurs, si on a confiance en nos notes, ce genre de conditions, pour un pilote de circuit, restent compliquées. Savoir “lire la route”, c’est-à-dire voir si c’est du verglas, de l’eau, les virages à l’ombre, les ponts, etc… J’ai pris de l’expérience, mais le plaisir dans la voiture est plus compliqué surtout avec une deux roues motrices. Par contre, je peux affirmer que, quand on arrive sur le port de Monaco à l’arrivée, après ce genre de spéciales, c’est juste beaucoup de plaisir. »
A suivre…