Ce week-end va avoir lieu la finale du DTM sur le tracé d’Hockenheim. René Rast s’est déjà assuré un nouveau titre DTM à deux courses de la fin de saison. Dans une longue interview pour Audi Sport, le champion DTM 2019 se dévoile. Il parle de ses succès (six cette année), des records qui l’intéressent, du secret de son succès, du Super GT et raconte comment il a passé les jours suivant son titre !
Qu’est-ce que ça fait d’être double champion DTM ?
« C’est un sentiment formidable et totalement différent de ce que j’ai ressenti lorsque j’ai remporté mon premier en 2017. Le titre, à ce moment-là, est venu quelque peu inopinément. La surprise fut immense. Cette année, j’ai pu me préparer mentalement parce qu’on m’a présenté comme favori. Malgré tout, c’est une sensation géniale. C’est l’un des plus grands moments de sport automobile de ma vie. Quand j’ai intégré le DTM, je ne m’attendais pas à décrocher deux titres en l’espace de trois ans. »
Comment avez-vous passé les jours qui ont suivi votre victoire ?
« Heureusement, d’une manière relativement tranquille. La plupart de mes interviews ont été menées par téléphone. C’est pourquoi j’étais souvent à la maison et j’ai pu passer du temps avec ma famille. »
Avez-vous le sentiment que votre popularité a augmenté de manière significative depuis que vous êtes entré dans DTM ?
« Tout à fait ! On peut dire que la perception en bord de la piste et dans les média a changé par rapport à 2017. Ces changements interviennent progressivement suite à des événements majeurs. Il y a eu un gros coup de pouce après mon premier titre. Il y en a eu deux autres : l’un après mon accident au Lausitzring l’an dernier et l’autre après mes six victoires consécutives. »
Vous avez de bonnes chances de battre de nombreux records en DTM. Cela vous intéresse-t-il ?
« Je ne m’intéresse aux records que lorsqu’ils me concernent personnellement. Je n’y accordais pas beaucoup d’attention dans le passé, mais quand on se rapproche des références, ils commencent à devenir pertinents. Surtout les 23 victoires que Mattias (Ekström) a remportées pour Audi, plus un troisième titre DTM. Seuls Bernd Schneider et Klaus Ludwig ont signé plus de deux titres. Si vous avez la chance de devenir l’un des trois meilleurs pilotes DTM de tous les temps, c’est un objectif à poursuivre. »
Qu’est-ce qui a été décisif pour votre titre 2019 ?
« Notre constance dans les qualifications. Nous avons toujours été aux avant-postes quand c’était important. D’une part, nous avons marqué des points supplémentaires et, d’autre part, nous avons évidemment obtenu une bonne base de départ pour la course. Avoir eu la possibilité d’être toujours dans la course devant a été la clé du succès., mais il y a aussi eu la régularité en course. Nous n’avons fait que quelques erreurs cette année, tout a parfaitement fonctionné. »
Lors du premier essai avec la nouvelle Audi RS 5 DTM, vous attendiez-vous à ce que cette voiture soit aussi bonne ?
« Ce n’était pas forcément prévisible. Lors des tests de pré-saison, nous avons toujours eu l’air plus forts et plus fiables que la concurrence, mais à l’époque, nous ne savions pas encore à quel point la compétition serait relevée. L’idée qu’ils pourraient revenir dans le coup – ce qu’ils ont fait lors de la première course à Hockenheim – est restée gravée dans nos esprits. C’est à ce moment là que nous avons vu à quel point BMW était soudainement rapide. »
Où situez-vous les grandes forces d’Audi par rapport à la concurrence ?
« Vers la fin de la saison, clairement en qualifications où, après un certain temps, nous n’avons plus laissé la moindre chance à BMW. En course, nous avions souvent la meilleure voiture. En termes de rythme, nous avons été dominateurs et très fiables depuis la mi-saison. Ceci s’est particulièrement reflété au niveau du championnat constructeur. Nous avons travaillé très dur pour cela cet hiver. »
Que pensez-vous généralement des nouvelles voitures DTM ?
« Je les aime beaucoup, elles sont vraiment très amusantes ! Plus de puissance fait toujours plaisir au pilote. Les voitures sont plus difficiles à conduire et proposent certainement un plus grand défi et c’est exactement ce que nous voulons. Les pilotes doivent se concentrer et se battre davantage. »
Nous avons vu beaucoup de courses DTM palpitantes cette année. Malgré tout, y a-t-il quelque chose que vous changeriez au sujet de championnat?
« Rien qui ne me vienne à l’esprit sauf, peut-être, encore plus de puissance et encore moins d’appui. C’est quelque chose que l’on souhaite toujours en tant que pilote de course, même si l’on doit s’assurer que les pneus sont encore capables de le supporter, sinon cela se transforme en course de gestion des gommes, comme en Formule 1 dernièrement. Tout d’un coup, on se retrouve à rouler dix à quinze secondes plus lentement qu’en début de course sinon les pneus ne tiendront pas. Personne ne veut voir ça. »
Pouvez-vous comprendre l’agacement des fans à propos des consignes d’équipes après Brands Hatch et le Lausitzring ?
« Bien sûr, aucun fan ne veut voir de consignes d’équipes et nous, pilotes, non plus. Ce n’est pas pour cela que nous participons aux courses, donc je les comprends parfaitement. Cependant, il faut aussi comprendre les intérêts des constructeurs. Ils veulent être autant que possible en mesure de faire pencher le championnat en leur faveur en fin de l’année. Cela a toujours été le cas en DTM. Chez Audi, chaque pilote a la chance de courir pour gagner le championnat. Au début de saison, cela va, mais il est clair que les consignes d‘équipe sont émises au cours du dernier tiers de l’année. Même si les fans n’aiment pas ça, elles font tout simplement partie du sport automobile aujourd’hui, comme nous le voyons en Formule 1 également. Cependant, c’est évidemment plus agréable de pouvoir rouler librement comme cela a pu être le cas au Nürburgring. »
Dans la course au titre, vous deviez non seulement l’emporter sur le pilote BMW, Marco Wittmann, mais aussi sur Nico Müller. Se battre contre un pilote de la même marque, est-ce différent ?
« Je dirais qu’il est toujours un peu plus difficile de se battre contre un pilote de la même marque parce qu’on ne peut pas, on ne veut pas piloter aussi durement que contre les pilotes d’un autre constructeur. Vous devez toujours faire preuve d’une certaine retenue et ne pouvez pas démontrer pleinement votre potentiel agressif. J’ai l’impression que, à l’exception peut-être du Norisring, nous avons assez bien géré ce problème cette année. »
Avant la course à Brands Hatch, Timo Scheider, commentateur TV (et ancien pilote DTM), a déclaré que votre relation avec Nico Müller était tendue. Est-ce vrai ?
« Je ne sais pas d’où Timo tient cette information, c’est un peu tiré par les cheveux. Quand Nico et moi avons lu cela, on s’est mis à rire. Évidemment, on ne passe pas nos vacances ensemble, mais nous parlons beaucoup les week-ends de course, nous plaisantons ou nous nous asseyons les uns à côté des autres pendant les briefings des pilotes ou les séances d’autographes. Nico et moi sommes assez professionnels pour pouvoir séparer les choses privées et le travail. Entre nous deux, tout s’est déroulé de manière très détendue et cool dans notre course au titre. »
Gerhard Berger, CEO de DTM, a souligné à plusieurs reprises que vous auriez également eu ce qu’il faut pour courir en Formule 1. Est-ce que cela vous fait-il plaisir ? La Formule 1 est-elle toujours d’actualité pour vous ?
« J’aimerais avoir l’occasion de piloter une Formule 1 une fois. Je l’ai déjà dit à plusieurs reprises, mais seulement pour voir ce que c’est. Je pense qu’une saison complète n’est pas réaliste car, d’un côté, je suis trop vieux pour cela et, de l’autre, les cockpits sont bien sûr très convoités. Beaucoup de gens font la queue pour en avoir un et cela impliquerait aussi beaucoup d’argent. C’est pourquoi mes chances sont très faibles. Si je recevais une offre, j’en discuterais bien sûr avec Dieter (Gass, responsable Audi Motorsport), mais on en est très loin. »
Voyez-vous votre avenir en DTM ?
« Tout à fait ! Je me sens très à l’aise en DTM. Je m’amuse beaucoup. C’est pourquoi je vois mon avenir en DTM. »
Deux autres pilotes Audi (Nico Müller et Robin Frijns) courent en Formule E. Cette série est-elle également pertinente pour vous ?
« Oui, et c’était déjà le cas l’année dernière. Mais, avec Audi, nous avons décidé de nous concentrer entièrement sur le DTM. Cependant, pour l’avenir, la Formule E est sans aucun doute une option. »
Comment préparez-vous une course de DTM ?
« La préparation est très importante en DTM. Beaucoup de petits détails comptent. Elle commence relativement tôt, généralement deux ou trois jours après le week-end de course précédent, en commençant par des analyses vidéo. Cela vous donne un aperçu de ce qui s’est passé sur la piste l’année précédente. Qu’est-ce qui était important ? Quelle a été la clé du succès ? Cela ravive peu à peu des souvenirs. Ensuite, vous commencez à regarder les données pour voir où vous avez été moins bon l’année précédente, où vous pouvez vous améliorer afin d’éviter de commettre les mêmes erreurs. Ensuite, vous discutez de la mise en place avec l’équipe. Cela inclut aussi le travail dans le simulateur chez Audi, dans l’équipe Rosberg et chez moi. »
Pour la finale à Hockenheim ce week-end et suite à votre titre 2019, allez-vous l’aborder avec plus d’aisance ou avec autant de minutie que les autres courses ?
« Certainement avec plus de facilité. Après le titre de champion, il n’y a plus de pression. Évidemment, nous aimerions encore gagner le championnat des équipes. J’ai hâte d’avoir un week-end DTM sans aucune pression pour changer car je n’ai jamais connu ça auparavant. »
Avez-vous hâte de participer à la compétition avec les Japonais ?
« Je pense que ça va être méga cool ! J’ai attendu ça toute l’année. Et maintenant, je peux en profiter sans aucune pression. »
Suivez-vous l’évolution du Super GT au Japon ? Connaissez-vous les pilotes et les voitures qui vont courir à Hockenheim ?
« Bien sûr, je connais Jenson Button et je suis en contact avec d’autres pilotes, mais je ne suis pas vraiment plongé dans le Super GT. Je suis très excité de voir ce qui va se passer à Hockenheim. Ce sera la première rencontre entre le DTM et le Super GT. Pour la première fois, nous allons avoir six constructeurs en course. Ce sera sans aucun doute un événement très spécial. »
Fin novembre, les premières courses conjointes DTM et Super GT auront lieu au Japon. Les attendez-vous avec impatience ?
« Oui ! Je ne suis jamais allé à Fuji, jamais au Japon. Je suis impatient de voir ce qui nous attend là-bas. Ce sera sans aucun doute un autre événement sympa en cette fin de l’année, où nous pourrons voyager sans aucune pression et voir ce que les Japonais font de mieux que nous. On va probablement apprendre quelque chose. »
Comment le champion DTM préfère-t-il passer son temps libre ?
« Avec la famille. Évidemment, je fais aussi du sport en parallèle. Mais je préfère passer du temps avec ma famille pour me détendre un peu du stress du sport automobile. »