Copropriétaire de United Autosports avec Zak Brown (directeur exécutif de McLaren), Richard Dean fait partie des figures les plus connues des différents paddocks. Le team anglo-américain engage à nouveau deux Ligier JS P217 en ELMS avec en parallèle quelques courses IMSA telles que Daytona, Sebring et Watkins Glen. Il reste deux courses ELMS à United Autosports pour ouvrir son compteur. Nous avons rencontré Richard Dean pour faire le point avec lui sur la saison européenne, les 24 Heures du Mans, le retard des Ligier par rapport aux ORECA et l’avenir de l’écurie.
Que pensez vous du début de saison de United Autosports ?
« Notre première moitié de saison a été décevante puisqu’à la même époque l’an dernier, nous comptions déjà deux victoires. Nous nous attendions à remporter des courses cette saison. Tout le monde au sein de l’équipe me dit que je devrais avoir un peu plus le sourire suite à une 3e place au Red Bull Ring et aux 24 Heures du Mans après la disqualification ! En plus, nous avons été en pole position à Watkins Glen, terminé 4e aux 24 Heures de Daytona, 5e aux 12 Heures de Sebring. Dans l’ensemble, ces résultats ne font pas de 2018 une mauvaise année et il nous reste deux courses en ELMS pour gagner.»
Comment jugez-vous votre prestation aux 24 Heures du Mans ?
« La première heure a vraiment donné le ton de l’épreuve pour nous. Sur les deux voitures, nous avons eu des soucis frustrants. Sur la #22, le GPS de la FIA s’est déconnecté, il a fallu le changer et ça nous a coûté pas mal de temps. Sur la #32, nous avons eu un problème avec la radio de la direction de course, l’antenne s’est cassée ! Nous n’avons pas eu de souci mécanique, l’équilibre et le rythme de course étaient bons, mais il a fallu réparer. Donc après 60 minutes de course, les deux autos avaient déjà perdu un tour ! Le dimanche, nous avons eu l’accident de la #22 alors qu’elle se battait pour un podium. Sur la #32, en fin de course, l’auto a eu une crevaison au niveau du Tertre Rouge, l’auto a dû faire quasiment un tour complet au ralenti. Pour résumer, nous avions un vrai potentiel au Mans, les deux autos auraient pu finir sur le podium. L’une a terminé dans le mur au Virage Porsche et l’autre est provisoirement sur le podium, nous attendons la décision du tribunal par rapport à G-Drive Racing. »
Juan Pablo Montoya a disputé les 24 Heures du Mans sous vos couleurs pour la première fois. Que pensez-vous de sa prestation ?
« Pour lui, ce fut une vraie surprise car au Mans tout est différent : l’ambiance, le circuit, la course. Pour moi, c’est l’un des pilotes les plus talentueux. Avec son implication en IMSA (avec Acura Team Penske, ndlr), il n’a pu beaucoup roulé avec l’auto et a aussi raté une partie de la Journée Test car il arrivait de la manche de Detroit. On a pu le voir lors de la course, au fil des tours, il était bien, comprenant mieux la course et la voiture. Ce fut une belle opportunité pour toute l’équipe de travailler avec lui. »
Ligier a utilisé son joker l’hiver dernier, mais semble toujours être derrière les ORECA. Comment expliquez-vous cet écart ?
« C’est une question que nous nous posons, qu’Onroak Automotive se pose et que nous avons questionné l’ELMS. Onroak Automotive a utilisé son joker, mais cela ne signifie pas qu’ils ont été autorisés à faire ce qu’ils voulaient. Il y a eu ce qu’ils ont pu faire et ne pas faire. La question est : devait-il y avoir plus ? Ce n’est pas un argument avec lequel je vais pouvoir me battre avec l’ACO et l’ELMS. Nous avons des pilotes de classe mondiale dans notre effectif comme Filipe Albuquerque, l’un des meilleurs du paddock. Je ne veux pas me reposer sur cette histoire de joker. Cette auto, avec ces modifications, est encore assez nouvelle et le changement au niveau pneumatique a aidé ORECA et ralenti les Ligier. C’est pourquoi nous travaillons dur sur la composition des gommes avec Dunlop (entre temps, l’équipe américaine a changé de fournisseur, passant de Dunlop à Michelin, ndlr). Même s’il est difficile de ne pas être d’accord, c’est trop simple de dire que les ORECA sont plus rapides que les Ligier. En IMSA, Dallara gagne des courses avec les Cadillac. Nissan, via Onroak Automotive, a gagné assez facilement les 12 Heures de Sebring. Cela montre que l’équilibre entre les Dallara, Ligier et ORECA peut être trouvé suivant certains règlements et certaines circonstances. Nous aimerions avoir quelques ajustements au niveau du règlement, mais cela ne se fera pas. Nous allons donc continuer de nous battre. Nous avons fait des tests le lundi avant la course de Silverstone, puis deux autres journées après et encore la semaine suivante. Cela fait partie de notre envie de trouver davantage de potentiel et plus d’équilibre sur la voiture. Dernièrement, nous avons eu de meilleurs retours de la part de nos pilotes, il y a des signes positifs. Nous sommes donc optimistes pour le reste de la saison, les choses peuvent vite changer en sport automobile.»
Vous ne serez pas au Petit Le Mans. De quoi 2019 et les années suivantes seront-elles faites pour United Autosports ? Serez-vous toujours avec Ligier ?
« Nous ne pouvons pas tout faire ! Disputer Petit Le Mans quasiment au même moment que la fin de la saison ELMS à Portimão tout en assumant notre engagement en Asian Le Mans Series est trop difficile, c’est pour cela que nous n’y allons pas ! De plus, suite à la décision de l’IMSA de séparer les DPi et les LMP2, nous ne pouvons plus prétendre à la victoire au général. Nous ne disputerons pas les 24 Heures de Daytona 2019. Nous avons dû repenser notre programme, nous avons besoin d’être actif cet hiver pour rester compétitif et de courir dans des championnats compétitifs. Nous avons donc regardé la piste Asian Le Mans Series, challenge que nous allons relever en LMP2 et LMP3 (deux Ligier JS P3 et deux JS P2). Nous y allons pour gagner. Pour ce qui est de 2019, nous serons de nouveau en ELMS et aux 24 Heures du Mans si l’ACO nous sélectionne. Nous avons une longue relation avec Onroak, aussi bien en LMP2 qu’en LMP3, et nous sommes aussi leur représentant en Grande-Bretagne. Même si c’est compliqué en LMP2, nous sommes là pour nous battre et accepter les défis qui nous sont proposés. Nous continuerons donc avec eux, aucun doute là dessus et ce sera sur le long terme ! »
Pourquoi ne pas penser au WEC ?
« Pour plusieurs raisons. D’abord parce que les coûts en WEC ne sont pas les mêmes qu’en ELMS, qui sont déjà importants. C’est le sport auto, nous n’avons jamais assez d’argent (sourire). Toutes les équipes se plaignent il y a toujours quelque chose à dépenser : de nouveaux essais, de nouveaux équipements… En WEC, le budget est encore plus important. Ensuite, avec cette Super Saison, ce n’est pas le bon moment pour une équipe impliquée principalement en ELMS de rajouter le WEC. Il faudra se poser pour réfléchir à la saison 2020/2021. Cependant, j’adorerais prendre part à un championnat du monde, mais je vous ai donné les raisons pour lesquelles ce n’est pas possible. Mon côté compétiteur me dit que c’est pourtant ce qu’il faudrait faire, je dois juste trouver la façon de le faire ! »
Certaines rumeurs ont fait écho de la présence de United Autosports en IMSA, mais en catégorie DPi. Qu’en est-il vraiment ?
« Beaucoup de médias parlent d’une association avec McLaren. Zak Brown est mon associé chez United Autosports, mais ce que fait McLaren n’a absolument rien à voir avec l’équipe ! Je n’ai aucune idée de ce qu’ils font ou s’ils sont intéressés par le DPi. Ce que je peux affirmer, c’est que nous sommes intéressés par le DPi dans le futur, mais il n’y a pas de programme constructeur ! Nous avons le désir et un vrai intérêt pour cette catégorie comme beaucoup d’autres équipes. Nous réfléchissons juste à comment le faire et quand le faire, en tout cas pas avant 2020 ! »