Double vainqueur des 24 Heures de Spa, Romain Dumas avait le rythme pour s’imposer une troisième fois le week-end dernier dans les Ardennes belges. La Porsche 911 GT3-R/ROWE Racing qu’il partageait avec Mathieu Jaminet et Sven Müller n’a pas pu faire mieux qu’une 5e place finale. Le mauvais choix de pneumatiques en début de course a mis à mal la prestation de la #98.
En pilote d’endurance qu’il est, certainement l’un des plus expérimentés de la planète, Romain Dumas a été contraint, comme ses camarades de jeu, de poser le casque dans le stand dimanche matin suite à la sortie du drapeau rouge. Sur cette longue interruption de course, les avis sont partagés (on ne parlera pas de ceux de certains internautes qui n’ont jamais mis leur derrière dans une voiture de course sous la pluie, ndlr).
“Selon moi, on ne doit pas arrêter une course d’endurance”, nous a déclaré Romain Dumas. “Je ne comprends pas cette nouvelle mode. On doit rouler, même derrière un safety-car à 80 km/h, mais on doit rouler. S’arrêter fait toujours des mécontents. 80 km/h est trop rapide ? Alors on roule à 60 km/h. Là, ce n’est pas une course de 24 heures. La pluie fait partie de la course. Dans ce cas, on a eu une course tronquée. Si la course ne s’arrête pas, le résultat final peut être différent. Une course de 24 heures doit durer 24 heures.”
Les conditions de piste devant trop compliquées, la direction de course a sorti le drapeau rouge au petit matin avant une reprise des hostilités en fin de matinée.
Romain Dumas a déjà connu pareille mésaventure dans le passé : “Je me souviens d’une édition des 24 Heures du Nürburgring, interrompue à cause de la météo, où nous en avions profité pour changer la boîte de vitesses car nous n’étions pas sous régime de parc fermé. On gagne la course à cause de cela. Sans cette interruption, la boîte n’aurait pas tenu. La mauvaise météo fait partie du jeu.”
“Rouler à vitesse normale le dimanche matin n’était pas possible”, tient à préciser le Français. “Il y avait trop d’eau. Alors, on sort le safety-car et on roule moins vite.”
Malgré cette interruption, l’Alésien retient une très belle course : “C’était vraiment une très belle édition. Je me suis régalé en piste, sur le sec, sur le gras, sur le mouillé. C’était très ouvert. Pour la #98, l’erreur stratégique du début de course nous a bien plombé. C’était dur de savoir qui allait s’imposer. Notre auto s’est bien comportée sous la pluie.”
En 2003, année de sa première victoire à Spa, mais aussi en 2010 lors de la seconde, on ne parlait pas d’arrêt technique et de joker. “L’arrêt technique et ces histoires de jokers sont selon moi du nivellement vers le bas”, regrette Romain Dumas. “On ravitaille, on attend 20 secondes sur place. L’essence même de l’endurance est d’avoir les meilleurs mécaniciens, le meilleur matériel. Avec cet arrêt technique, où est l’endurance ?
“C’est la même chose pour l’arrêt toutes les 65 minutes. Avant, tu pouvais sauver du carburant. On nous a appris à freiner pour sauver de l’essence. De nos jours, cela ne sert plus à rien. En 2010, nous avions des freins Brembo très durs, ce qui n’était pas le cas de la concurrence. C’était compliqué à gérer en piste mais on gagne car on ne change pas les freins. IMSA Performance, qui termine 2e, a changé les freins. C’est comme cela que je conçois l’endurance. Il faut faire des paris qui peuvent s’avérer gagnants ou perdants.”
“De nos jours, il n’y a plus la moindre surprise“, martèle le Français. “On fait les pneus puis l’essence. Chez ROWE, on avait deux équipes de mécaniciens pour trois autos. La notion d’endurance se perd. A l’époque, il y avait des rebondissements. Est-ce qu’on voit des roues voler dans la voie des stands ? Avoir la meilleure équipe, les meilleurs mécaniciens, ça c’est l’endurance. Maintenant, quand deux voitures ravitaillent en même temps, elles ressortent forcément dans le même ordre. Les jeunes pilotes n’ont connu que ça sauf ceux qui roulent aux Etats-Unis. Peu de jeunes savent comment sauver du carburant.”