Faire un parallèle entre la voile et l’endurance n’est pas très compliqué. On a des sportifs de haut niveau dans les deux cas, on a des courses longues, les deux ont des montures de haute technologie qui valent très cher et chacun doit franchir la ligne d’arrivée le premier. Le parallèle le plus flagrant entre les deux disciplines est que tout le monde donne tout ce qu’il a, voire même plus…
Dans le cas de la Route du Rhum, le parallèle circuit/voile est tout trouvé : IDEC Sport. Si à plus de 60 ans, il serait de nos jours compliqué d’aller remporter les 24 Heures du Mans, Francis Joyon a prouvé que “les vieux pots font les bonnes soupes”, selon l’expression de Loïck Peyron, vainqueur de la précédente édition de la Route du Rhum. Décidément, chez IDEC Sport les plus âgés n’en finissent plus de briller quand on voit la prestation de Jean-Claude Ruffier, qui à 79 ans, s’est illustré lors du dernier Turkmenistan Rallye. N’oublions pas que le trimaran a 12 ans d’âge, bien loin d’une homologation très courte d’une voiture de course. Vous imaginez la victoire d’une Pescarolo C60 aux 24 Heures du Mans 2018 ?
Si Francis Joyon et François Gabart sont bien arrivés à bon port dans un mouchoir de poche, les autres navigateurs sont encore en mer. Que ce soit sur un circuit ou au milieu de l’océan, il faut passer cette fichue ligne d’arrivée à la différence près que sur la mer la course s’arrête une fois que tout le monde est arrivé et non pas après 24 heures.
Quand les deux navigateurs bataillaient pour la victoire, 93 skippers étaient encore en course dans les différentes catégories. Comme en Endurance, plusieurs catégories voguent sur les eaux. Le plateau de la catégorie Rhum Mono se situe à l’Ouest des Canaries alors que chez les Rhum Multi, certains skippers ont dû rejoindre la terre pour réparer. Fabrice Payen (Team Vent Debout) est arrivé à Porto après avoir démâté.
Jean Galfione (Serenis Consulting), l’ancien perchiste, qui évoluait dans la catégorie Class40, a dû se résoudre à abandonner. Il reste encore une quarantaine de skippers en course, dont deux sont en escale technique à Baïona. Dans la catégorie des monocoques IMOCA, Alex Thompson (Hugo Boss) mène la danse. Du côté des Multi50, Thomas Coville a repris la mer sur Sodebo après une escale technique à La Corogne.
Le Mans ou la Route du Rhum, il faut tenir le coup, s’arrêter pour réparer s’il le faut, être rapide, éviter les embûches pour briller. Même si les navigateurs ont des routeurs qui sont d’une aide précieuse, ils doivent évoluer par tout temps à la barre sans se préoccuper du “temps de conduite”. Pas de massage à l’issue des relais, pas de petits plats pour se refaire une santé, le debriefing se fait en solitaire. Ces héros des mers sont certainement moins médiatisés que d’autres sportifs qui gagnent des sommes colossales mais on leur doit un profond respect, du premier au dernier, un peu à l’image de la lanterne rouge en cyclisme. L’humain tient une place importante et peut-être encore plus chez IDEC Sport qu’ailleurs, sur le bitume et sur la mer.
Francis Joyon n’est pas le seul à avoir remporté cette Route du Rhum 2018 puisque Jean, à la barre de CapKermit, s’est imposé dans la Route du Rhum virtuelle. L’une des particularités de la voile est que vous pouvez faire la course d’une façon officielle depuis votre canapé sur Virtual Regatta. Âgé de 64 ans, Jean a lui aussi vaincu des skippers (virtuels) bien plus jeunes que lui.“On fait des rencontres, on crée des liens avec d’autres joueurs, on peut se suivre et dialoguer, c’est aussi ça que j’aime”, a déclaré le skipper de CapKermit qui est “arrivé” seulement 9 minutes et 29 secondes avant Francis Joyon et IDEC Sport.
Comme dans la réalité, il faut être rusé pour prendre l’avantage. Plus de 400 000 concurrents sont encore en course dans les catégories Class40, IMOCA et Multi50. On pense qu’ils seraient aussi nombreux à participer aux 24 Heures du Mans virtuels en même temps que les grands…