Deuxième partie de l’entretien avec Tony Menard, directeur de Michelin Motorsport pour l’Amérique du Nord avec un point sur le Michelin Raceway Road Atlanta.
Il y a tout juste un an, vous avez inauguré la Michelin Tower sur le circuit de Road Atlanta. Avez-vous eu le temps d’en profiter ?
“Ce week-end, c’était la première fois de l’année où nous pouvions y convier des distributeurs, mais aussi les emmener en fan zone. Le fait d’avoir construit cette tour a eu par ailleurs des effets très positifs. Nous avons reçu beaucoup d’appels d’autres circuits, qui nous ont proposé des partenariats. Beaucoup juraient avoir plus de place, plus de spectateurs et plus de journées piste occupées… En clair, nous avons fait des envieux. C’est bon signe car cela veut dire que Michelin représente un bon partenaire potentiel.”
Pourquoi avoir choisi Road Atlanta pour faire un tel investissement ?
“Dans le cadre du partenariat de long terme que nous avons signé avec l’IMSA, il y eu la question de saisir cette opportunité de sponsoriser un circuit appartenant au championnat. En outre, c’est la piste la plus proche de notre siège en Amérique du Nord, à Greenville (Caroline du Sud), et c’est aussi pour nous un outil de travail car on peut y développer nos pneus, de route ou off-road. Par ailleurs, les infrastructures, les hôtels, tout ce dont on peut avoir besoin pour faire des événements, est à proximité. Tout était réuni pour qu’on puisse avancer, et faire quelque chose sur ce circuit qui avait besoin de se moderniser.”
L’IMSA est propriété de la Nascar, un championnat plus populaire qui profite de davantage de spectateurs. Est-ce que Michelin pourrait s’y engager ?
“On fait du sport automobile pour avoir un message cohérent avec la politique et la stratégie de l’entreprise. L’IMSA nous permet de montrer toutes les facettes d’un pneu qui offrent des performances qui durent. Il y a 16 constructeurs engagés, l’an prochain il y en aura 17, et ça nous intéresse. La Nascar est très populaire, c’est vrai, mais il n’y a plus que 3 constructeurs engagés et il s’agit d’une autre catégorie de spectateurs, moins attirée par les marques premiums. Et puis, il y a la démonstration de la performance pure. Le week-end dernier nous étions à Charlotte (Caroline du Sud) avec l’IMSA, en support de la Nascar, et on a vu que la Corvette qui a fait la pole position aux essais (sur le Roval, un mélange de circuit et d’ovale) a tourné 6 secondes plus vite que la pole de la Nascar Cup l’an dernier sur le même tracé. Quand on met tout cela bout à bout, être en Endurance avec un partenaire comme l’IMSA fait beaucoup de sens, aussi bien pour les catégories de fans que l’on touche, mais aussi pour le développement de nos futurs produits.”
Les spectateurs de l’IMSA ont un profil plus premium ?
“Nous respectons bien sûr toutes les catégories de spectateurs, mais au travers de toutes les analyses qu’on nous avons pu mener, il apparait que le profil de l’américain qui suit l’IMSA est beaucoup en phase avec le consommateur que nous ciblons. Le Nascar, c’est du show, beaucoup de crashs, et des voitures qui tournent sur un ovale. L’IMSA propose autre chose, et notamment une volonté de faire évoluer la technologie des voitures. Les systèmes hybrides qui équiperont la future catégorie LMDh, aussi bien en IMSA que dans le championnat du monde d’Endurance, sont d’abord la volonté de l’IMSA. Cette technologie était au départ destinée à une catégorie appelée DPi 2.0. L’IMSA ne pourrait pas attirer autant de constructeurs si elle restait sur le modèle purement américain. C’est aussi pour cela que nous travaillons avec eux pour le futur.”
Est-ce que votre engagement en IMSA s’est déjà vu dans les ventes de Michelin sur le marché américain ?
“Je ne peux pas vous donner de chiffres car cela reste des données sensibles, mais la réponse est oui. Quand on invite des distributeurs importants sur une manche d’IMSA, qu’on leur explique ce qu’on fait et là où on veut aller, il y a un impact direct sur les ventes en comparaison de ce qu’on peut faire avec un distributeur lambda. Nos partenaires, les constructeurs, sont aussi nos prescripteurs. Quand Corvette lancent à la fois une C8 de série et une autre de compétition avec des pneus Michelin en équipement d’origine, il y a une question d’image et un vrai effet consommateur. Sur le moyen/long terme, ce sera encore davantage.”
Est-ce qu’on peut dire qu’entre Michelin et l’IMSA, c’est le début d’une longue histoire ?
“Tout à fait. Le championnat nous donne une exposition intéressante, et nous permet d’engager des discussions avec d’éventuels nouveaux partenaires. Aux Etats-Unis, le motorsport est un levier marketing efficace.”