Deux A110 à Paris au départ du tour auto Optic 2000, deux A110 à Nice à l’arrivée, nous l’avons fait !!! Mais que ce fut dur jusqu’à la dernière seconde…
Le programme de l’ultime journée comprenait 3 spéciales dont le graal de tout pilote de Rallye, le Col de Turini. La première spéciale est magnifique et nos Alpine et leurs pilotes s’y régalent. Nos deux équipages y signent à la seconde près le même temps au 22ème rang ex aequo. Nous sommes à notre place, la journée s’annonce magnifique. La seconde spéciale est malheureusement neutralisée et nous voici en route pour le Col.
Bernard OLLIVIER, homme clé du retour d’Alpine et véritable puits de science et d’anecdotes sur la marque au A fléché, m’avait longuement parlé avec passion et émotion au gré de nos diners de course improbables (Le Pinocchio du Nürburgring…) de ce monument. Tous ces échanges à bâtons rompus me sont revenus à l’esprit et un mélange d’émotion et de fierté m’a accompagné toute la journée. Avec mon père nous avons eu l’honneur de ramener notre merveilleuse voiture sur ce lieu 45 ans après y avoir terminé à la deuxième place du Monte Carlo avec Ove ANDERSON et Jean TODT dans l’habitacle.
Je vous le confirme, c’est grand, très grand. La montée de La Bollène est déjà fabuleuse, mais les derniers lacets mêlant enchainements rapides et épingles sont à couper le souffle. Je soupçonne les hommes de Patrick PETER de nous avoir laissé négocier les derniers 2,73 km de la spéciale sans notes afin de pleinement en profiter sans guide, ni filtre. J’ai pu lever les yeux de mon trip et de mes notes et aider mon pilote à anticiper les enchainements. Dernier coup de gaz rageur et nous sommes arrivés. Quel pied ! Le temps de savourer pendant quelques minutes l’instant magique à 1607 mètres d’altitude, de prendre des photos et de partager notre joie avec les autres équipages et on remet les Mickeys et le nez dans le Road book pour boucler les 45 km de liaison finale et savourer officiellement notre bonheur. On se dit qu’il va falloir faire attention à l’auto et garder sa concentration encore une petite heure pour ne pas faire de faute stupide, mais tomber en panne à ce moment…
Souvenez-vous que mardi matin l’aventure de l’Alpine 290 de Lionel MOUTOUH et Elise PERCEBOIS avait bien failli prendre fin 5 km seulement après le départ à cause d’une entretoise de boite de vitesse défaillante. 5 jours de course plus tard, le chat noir caché sous le capot moteur s’est réveillé et l’impensable a failli se produire quand après plus de 2500 kilomètres de course, à 40 km seulement de l’arrivée la 290 s’est immobilisée dans un nuage de fumée… Rupture de la courroie d’entrainement de pompe à eau. Une situation inimaginable après avoir bouclé la dernière épreuve chronométrée du Tour. Mais celui-ci n’est terminé qu’une fois l’arche d’arrivée franchie à Nice.
Rajoutez à cela que nous sommes en train de perdre nos rapports de boite les uns après les autres sur la 291 et vous pouvez imaginer notre stupeur quand à la sortie d’une épingle nous voyons la voiture sœur immobilisée au bord de la route à côté d’une dépanneuse de l’organisation guettant une éventuelle décision d’abandon… Hors de question ! On a décidé de finir, on finira !
Elise prend immédiatement contact avec les responsables des relations concurrents pour les informer que nous tentons une réparation et dans la 291 je suis en contact tout le temps de la descente vers Nice avec nos mécanos afin d’organiser le sauvetage.
Il devient vite évident que le salut ne peut venir que de notre véhicule d’assistance rapide en position à une vingtaine de minutes. Seul problème, il n’a pas la courroie en question dans son lot de bord. Il va falloir improviser, et à ce petit jeu nos gars ne sont pas trop mauvais. Après avoir fait le tour de tous les lacets de chaussures, câbles de téléphone, élastiques divers et rilsans, il est décidé d’utiliser… Une paire de collants d’Elise ! Je vous promets que tout cela est vrai et je souris encore en me souvenant d’Ari VATANEN nous disant qu’avoir une coéquipière féminine de talent telle qu’Elise dans notre équipe est une chance inestimable !
Pendant ce temps nous arrivons enfin dans la 291 au parc d’arrivée et sautons immédiatement sur les officiels pour leur expliquer la situation. Nous venons de boucler notre seconde Tour Auto d’affilé à une magnifique 19ème position mais l’heure n’est pas encore aux réjouissances. Accord nous est donné pour une arrivée tardive grâce à la neutralisation du temps imposé sur cette ultime liaison, mais cela ne durera pas, la voiture balai rode et il est déjà près de 23H00.
Le collant est torsadé, croisé, lié et monté. Moteur… Et ça tourne ! Lionel et Elise sautent dans l’auto et filent vers le parc. Minuit approche, Tous ces efforts seront-ils vains ? La ligne d’arrivée est finalement franchie par Lionel, nous présentons les réparations aux commissaires, plaidons notre cause et le strict respect du règlement et après délibération le verdict tombe, la 290 de Lionel MOUTOUH et Elise PERCEBOIS est classée et vient de finir son premier Tour Auto à la 24ème place ! Nos deux voitures sont à l’arrivée, la pression tombe, l’ambiance au diner est euphorique et démarre une longue nuit… de sommeil ! Nous n’en pouvons plus !
Dimanche matin, nous nous retrouvons pour un ultime Brunch face à la mer et aux bateaux de la Nice Ultimed en entrainement. Dernières poignées de main à nos amis concurrents, applaudissement nourris pour les organisateurs qui nous ont encore organisé une épreuve exceptionnelle, félicitations de son Altesse Sérénissime le Prince Albert II de Monaco et il est l’heure de rentrer.
Ce soir bien entendu mon père, Elise, Lionel, Jean, Jean-Luc, Cédric et Bertrand, notre formidable équipe un peu barrée mais si talentueuse me manque, mais de nouveaux défis nous attendent avec le Rallye de la Drome, la Montagne Noire, le Tour de Corse Historique et très certainement une ou deux autres épreuves avant la fin de l’année. Jean REDELE aurait certainement apprécié de voir ses voitures courir encore sur les plus belles routes et pistes du Monde. Nous voulons être dignes de son héritage.
Pour clore cette chronique une seule question très personnelle me trotte dans la tête et je me permets de la poser :
« Papa, jamais deux sans trois ? »