Tristan Gommendy est une valeur sûre en Endurance et en LMP2 en particulier. Cet hiver, le pilote de 40 ans a quitté Graff et est désormais chez Duqueine Team (ex Duqueine Engineering). Il va amener toute son expérience au profit de l’équipe française. Endurance-Info a contacté Tristan Gommendy pour faire un point avec lui…
Pour commencer, comment allez-vous ?
« Je vais bien, merci. Tout ceci demande de l’organisation surtout lorsqu’on est confiné avec un enfant de deux ans et une grande fille, mais pour elle, c’est plus facile car elle a passé 10 ans. Ma femme est en télétravail avec énormément de travail au niveau communication de crise et sur les plans à venir du constructeur pour lequel elle bosse. Nous essayons de gérer tout cela tous les deux. Le temps commence à être long, surtout pour les enfants. Nous n’avons pas la chance, dans cette région parisienne, d’être en pavillon, mais ça va, pas d’inquietude ! »
Comment arrivez-vous à vous entretenir physiquement en cette période de confinement ?
« C’est vrai qu’en appartement, cela demande de de l’organisation. Depuis, plus de 10 ans, j’ai un entraîneur physique que je vois quatre fois par semaine en salle ou au stade. Cela s’est arrêté du jour au lendemain, nous avons donc continué de travailler par visio. C’est important de conserver une structure d’entrainement. Je m’entraîne avec lui tous les matins, pendant 1 h 30. J’ai récupéré du matériel de musculation avant le confinement, acheté une corde à sauter et certains accessoires pour faire de l’échauffement et du cardio. De plus, avec mon attestation, je vais courir tous les jours. Ce n’est pas toujours facile, ce n’est pas pratique, mais on gère. Psychologiquement, c’est important de se dire que l’on maintient un niveau physique qui va faire que, lorsqu’on pourra reprendre un entrainement plus « normal », le niveau sera bon. En tout cas, il faudra être prêt quand tout va pouvoir repartir. »
Vous avez passé deux ans chez Graff. Que gardez-vous de ce temps passé dans la structure de Pascal Rauturier ? Pourquoi en êtes-vous parti ?
« J’en garderais un excellent souvenir et le sentiment d’un travail accompli. Pas forcément terminé, mais on ne peut pas toujours faire ce que l’on veut. Si on avait pu continuer ensemble avec Pascal, nous l’aurions fait. Cependant, les équipes ont des problématiques économiques et les efforts de Graff pour m’avoir au sein de l’écurie étaient compliqués à renouveler sur une saison supplémentaire. Je comprends tout à fait, je connais bien ces montages financiers et ces soucis économiques coûteux en LMP2. Ce n’est pas grave, ils n’ont pas pu me garder, c’est comme cela. Le travail a été bien fait pendant ces deux ans avec des hauts et des bas. Nous avons tous énormément travaillé, je me suis beaucoup impliqué dans l’équipe pour la structurer entre les mécanos et l’ingénieur que j’ai fait venir. Nous avons eu une relation humaine exceptionnelle entre coéquipiers et cela a joué dans les résultats. En 2019, nous avons enchaîné quatre podiums consécutifs en ELMS, mais nous aurions pu le faire à chaque course, mais nous avons commis quelques erreurs. On retiendra aussi la pole au Mans (finalement retirée, ndlr), la 2e place, toujours aux 24 Heures en LMP2 en 2018. On se doit d’être satisfaits de nos résultats sur ces deux saisons et j’en garderai un super souvenir aussi bien sportif qu’humain ! »
Vous étiez en essais privés avant le confinent avec votre nouvelle équipe, Duqueine Team. Comment se sont passés vos premiers tests ? Et la découverte de votre nouveau coéquipier, Konstantin Tereschenko ?
« Deux semaines avant Barcelone, nous nous sommes vus à l’atelier pour mouler les baquets, faire du simulateur. Avec Jonathan (Hirschi), nous étions ravis de nous revoir, ce sera notre 3e année ensemble. Nous avons découvert une nouvelle équipe, des mécaniciens, mais aussi Konstantin. Il est en ELMS depuis deux ans, mais je ne le connais pas. Dans le choix du pilote Silver, l’équipe a joué “stratégique” a niveau de la performance et de la jeunesse. Le Silver est très important et prépondérant aujourd’hui comme on a pu le voir avec Alexandre (Cougnaud) l’an dernier chez Graff où il a fait un super travail. Cela nous a permis de faire connaissance, de nous découvrir.
Ces essais sur deux jours se sont bien passés. Nous avons découvert le nouvel ingénieur de l’écurie. Avec Jon, les choses sont naturelles, on se connait bien. Je sais ce qu’il aime comme type de voiture, il sait comment je travaille. Tout est naturel, cela va aider et je pense que c’est aussi que c’est aussi ce qui a guidé l’équipe, le fait de pouvoir garder ce duo. L’ingénieur, Bruno Corbe, découvre l’ORECA, il connait le LMP2, mais la Dallara P217 uniquement (ex Cetilar, Carlin, AVF by Adrian Vallès, ndlr) et ce sont deux autos bien différentes. On a beaucoup travaillé tous ensemble, c’était important pour lui de comprendre l’auto et quelle était la fenêtre de tir. Nous avons essayé pas mal de choses, nous connaissons bien l’auto avec Jon, mais c’était important pour Bruno. Le planning a été complètement respecté, ce fut positif techniquement et humainement.
Avec Konstantin, cela se passe bien, il est adorable, mais il est très discret, un peu dans son coin. J’aime bien créer un bon relationnel avec mes coéquipiers, j’essaie donc d’aller le voir, l’inviter à manger pour avoir ce lien. Les Russes sont toujours un peu introvertis et je pense qu’il y aussi un part de timidité. Il a très bien roulé, il fait le job qu’on attendait de lui, donc deux jours positifs ! »
Les 24 Heures du Mans au mois de septembre, l’annulation de la Journée Test. Qu’est ce que tout cela change pour vous ?
« L’annulation de la Journée Test va forcément favoriser les équipes d’expérience disposant d’un équipage d’expérience ! On le voit d’habitude lors de cette journée, 70 % des pilotes ont besoin de faire 15 à 20 tours pour commencer à se sentir bien sur le tracé, même s’il le connaisse. Même si cela ne la remplacera pas, c’est bien que l’ACO ait rajouté des heures d’essais libres, mais on sait que les tours au Mans sont comptés. Duqueine Team connait maintenant les 24 Heures, Jon et moi également (7 et 10 participations respectivement, ndlr) et Konstantin y a couru une fois (en 2019 avec ARC Bratislava, ndlr). On ne partira pas de zéro, il faudra être très concentré et travailler très vite pour trouver le bon set-up.
Au niveau des changements, la nuit va être plus fraîche et plus longue, environ deux heures de plus. A part cela, cela ne changera pas grand-chose. Au vue de la pandémie actuelle, je suis ravi que l’ACO ait pris la décision de repousser de trois mois les 24 Heures. Cela nous donne l’espoir que cela puisse se dérouler. Sportivement comme économiquement, c’est extrêmement important qu’ils arrivent à maintenir cette épreuve. C’est vital pour les équipes, les privées notamment, car il y a des enjeux financiers importants. J’entends dire qu’il pourrait y avoir un décalage au mois d’octobre, pourquoi pas, même au mois de novembre s’ils veulent ! On aura froid, c’est tout ! S’il pleut, on a déjà eu des éditions en juin avec des déluges, parfois 22 heures sur 24 ! Tant que l’épreuve a lieu, cela ne change pas beaucoup les choses. Ce qui serait plus ennuyeux et moins souhaitable, c’est que cela se déroule à huis clos, même si c’est toujours mieux qu’une annulation. On pourrait avoir une belle édition, je pense ! »
Comment voyez-vous la reprise ?
« J’ai bon espoir pour l’ELMS car on parle d’un déconfinement pour des épreuves sportives le 15 juillet, même si tout cela évolue. On est sensé être au Paul Ricard à cette période. Je n’ai pas encore entendu d’annulation pour le moment. J’ai plus de doutes sur Spa au mois d’août, même si le huis clos semble rester une possibilité d’après Gérard Neveu ! Je pense que si le calendrier ELMS est maintenu sous la condition du huis clos, cela ne posera pas de problème à qui que ce soit ! Le plus important reste la sécurité sanitaire de tout le monde. Je fais partie des gens qui pensent que la vie est plus forte que tout et la vie, c’est le mouvement. A un moment, donné, il faut que l’on sorte de là, il faut se remettre en marche ! Si c’est en huis clos, pas de souci ! Il faut absolument que l’on reparte et qu’on redémarre la machine ! J’ai espoir que le calendrier soit maintenu en l’état !»