Tout juste sorti en salles, ‘Le Mans 66’ est le film dont tout le monde parle. Vaut-il le déplacement ? Faut-il passer son tour ? Il n’y qu’en allant le voir qu’on peut avoir la réponse. Pour être totalement honnête, je n’avais pas le moindre plan pour aller au cinéma voir un film dont je connais la fin. Ford a gagné les 24 Heures du Mans 1966 et Ken Miles est décédé peu de temps après Le Mans en essais privés. Voilà, tout est dit. Pour moi, Matt Damon est Jason Bourne et Christian Bale est Bruce Wayne. On est loin de Carroll Shelby et Ken Miles.
Ce n’est pas parce que tout le monde parle d’un film qu’il faut y aller. Il faut en avoir envie. Les films sur le sport auto ont souvent été mauvais, voire très mauvais, surtout pour les gens qui connaissent un tant soit peu le monde de la compétition. Driven ? J’étais allé le voir avec ma copine de l’époque qui avait trouvé ça cool. Cool ? Disons que c’était un motif de rupture sentimentale là non ? Seule la chanson ‘Mad about you’ d’Hooverphonic est d’enfer. Michel Vaillant ? Pas mieux et là aussi ma copine du moment (pas la même) avait bien aimé. Pouah !! Décidément, les filles et le sport auto… Rush ? Pas mal mais je n’ai jamais été un passionné de F1. Le Mans ? Seules les images sont belles vu que Steve McQueen avait dû oublier le scénario aux Etats-Unis.
Finalement, aller voir ‘Ford v Ferrari’, le titre du film aux Etats-Unis, à Daytona à 200 mètres du circuit peut être original. C’est quand même à Daytona que Ken Miles s’est imposé en 1966 sur une Ford GT40 engagée par Shelby-American Inc. Tout un symbole. Le cinéma face au Speedway passe justement le film vendredi en fin de journée et vu la météo, Daytona Classic se passera de moi durant 2h30 sachant que je n’ai jamais mis les pieds dans un cinéma aux Etats-Unis. Vu que je passe mes week-ends sur les circuits, je crois bien que le dernier film que je suis allé voir est un des ‘Cinquante Nuances de Grey (il faut savoir faire plaisir). L’action n’est certainement pas la même que dans Le Mans 66.
Rendez-vous est donc pris à la séance de 16h45 (en célibataire) pour 2h30 de film. Je demande un billet pour ‘Le Mans 66’ et non ‘Ford v Ferrari’. La caissière me dit : ‘vous êtes français ? Ah Le Mans !’ Le ton est donné. L’écran est immense, les sièges très confortables font que vous pouvez allonger vos jambes. Si la salle est quasiment pleine, je suis le plus jeune de toute la salle. Eux ont certainement connu Le Mans 66, moi pas.
Et le film me direz-vous… Car si vous lisez mes âneries, c’est tout de même pour savoir si ce film vaut le déplacement. Oubliez tout de suite que vous connaissez Le Mans par coeur. Ne venez pas nous saouler qu’une banderole n’est pas au bon endroit ou que tel virage du circuit n’a pas le même angle que l’original. On s’en cogne comme on s’en cogne de savoir si on a face à nous de vraies Ford GT40 ou pas ou si le gurney est à la bonne hauteur. Les ayatollahs de l’endurance trouveront toujours quelques inepties, comme quand Ken Miles (Ford) regarde dans les yeux Lorenzo Bandini (Ferrari) dans les Hunaudières.
La ligne droite des stands est magnifiquement reproduite même si je n’étais pas sur place en 1966. On s’y croirait vraiment. Pour les choses qui ne collent pas à la réalité, je vous conseille de contacter mon ami Laurent Chauveau (lien) qui a tout compilé. Personnellement, ça m’est égal de savoir s’il pleuvait à l’arrivée en 1966, s’il faisait 40 degrés ou si on faisait du ski à Mulsanne. Ce n’est pas un film pour les inconditionnels du Mans mais Le Mans 66 traduit parfaitement l’émotion que peut susciter cette course.
James Mangold et son équipe ont mis le paquet. La reconstitution de l’usine Ford est impressionnante, tout comme les ateliers Shelby et Ferrari. Au début du film, on y voit un meeting sur le Willow Springs Raceway. On a aussi droit à une Peugeot 403 en plein Los Angeles et même à certains virages de Road Atlanta. Après avoir vu le film, je comprends mieux pourquoi le fils de Ken Miles devait être ému de venir au Mans pour la présentation de l’exposition Le Mans 66. Ce film n’a rien à jeter. Il y a tout : une aventure humaine, de l’action, du rire, des pleurs. Tous les ingrédients sont réunis. Voir Henry Ford II en passager de Carroll Shelby vaut le détour. Je n’ose pas m’imaginer en interview devant Henry Ford II ou Enzo Ferrari. Je pense qu’il valait mieux passer par les toilettes avant vu le charisme des deux.
Le Mans 66 est sans aucun doute le meilleur film sur le sport automobile depuis bien longtemps et même le meilleur de tous. D’ailleurs, pas besoin d’aimer le sport auto pour adorer le film. Les 24 Heures du Mans sont vues comme LA course à gagner, même à Detroit. Je n’étais pas peu fier de penser dans la salle où je pense que j’étais le seul frenchie ‘hé ouais moi j’y vais depuis que je suis tout gamin, j’étais dans les gradins et maintenant en salle de presse.’
Vous ne pouvez pas passer à côté de Le Mans 66. Impossible de passer votre tour ! Après avoir vu un tel film, je vais avoir l’air malin de parler de BOP et de catégorisation des pilotes. Rien de tout ça en 1966. Pour gagner, il fallait la meilleure voiture et chaparder le chrono du voisin italien.
En plus de ne pas avoir vu passer les 2h30 du film, j’en retiens autre chose. Si l’IMSA et l’ACO (avec ou sans la FIA) parviennent à s’entendre, le match Ford v Ferrari pour la victoire au Mans pourrait rependre, comme à Daytona et Sebring. Sauf que là, on pourrait avoir Ford, Ferrari, Porsche, Aston Martin, Lamborghini, McLaren, Peugeot, Toyota, Mazda, Cadillac, Acura, Dodge, Nissan, Alpine et consorts. On se retrouve donc en 2076 pour le film ‘Le Mans 2023’. 2023 coïncide en plus avec le centenaire de la 1ère édition des 24 Heures du Mans. Et vous, vous venez ?