Dans la foulée du Prologue FIA WEC, Yannick Dalmas officiait comme ‘Race Advisor’ aux Essais Officiels European Le Mans Series. De quoi reprendre ses marques dans une fonction qui lui sied à ravir. Respecté par ses pairs, ses avis sont appréciés en direction de course. Où que vous discutiez avec le quadruple vainqueur des 24 Heures du Mans dans un paddock, il a toujours à la main sa radio qui le relie aux communications d’Eduardo Freitas.
Au fil du temps, votre fonction est devenue une routine ?
“Pas du tout car chaque course est différente. Il y a une vraie cohésion entre les différents départements. Il faut toujours autant de rigueur, de justesse, le tout dans une discussion ouverte et dans la convivialité. Nous sommes tous dans le même bateau avec des jouets différents. Il faut cohabiter et ce n’est pas la foire.”
La confiance avec le directeur de course est totale ?
“Sans confiance, on ne peut pas avancer. Il faut tout le temps se remettre en question et mettre son ego de côté. On discute beaucoup car Eduardo insiste énormément sur le dialogue. On a confiance l’un dans l’autre. Il attend de moi que je remplisse mon rôle. C’est un travail de l’ombre même si parfois on est amené à être dans la lumière. Les acteurs restent les pilotes. Eux doivent briller, pas nous.”
La mise en place d’une messagerie interne entre les équipes et la direction de course est un vrai plus ?
“C’est un plus indéniable. Ce système permet notamment de prévenir. C’est dans l’air du temps, à l’instar de l’utilisation de son smartphone. Tout est dit en temps réel, ce qui contribue au bon déroulement d’une course. On ne peut pas être d’accord sur tout mais le principal reste la communication.”
Le respect des limites de la piste sera à nouveau contrôlé avec minutie ?
“Quand il faut être fin, les pilotes savent le faire. Quand on ouvre, les pilotes sont contre. La piste doit rester le tarmac noir. Un bon pilote fera toujours la différence. Le parfait exemple reste Kamui Kobayashi lors du record du tour au Mans en 2017. Il est allé à la limite sans jamais la dépasser. Nous avons montré la vidéo lors du briefing au Nürburgring. On n’a pas besoin de sortir de la piste pour aller vite. Il faut revenir à des choses plus basiques qui offrent plus de spectacle et de sécurité. Le sujet des limites de la piste interpelle depuis bien longtemps. Au Mans, des quilles ont été installées avant la ligne droite des stands. Le pilotage est devenu nettement plus fin à cet endroit.”
Vous êtes pour les pénalités en cas d’infraction ?
“Tout dépend de la nature de l’infraction. Je suis pour les pénalités suspensives qui permettent de prévenir et de réfléchir. Il faut travailler sur l’attitude du pilote. C’est un travail de complémentarité.”
Quel est votre regard sur le plateau FIA WEC ?
“L’arrivée de la Super Saison est très prometteuse avec les 24 Heures du Mans à deux reprises. Le cycle habituel est quelque peu bouleversé. Le travail effectué en parallèle entre la FIA et l’ACO fonctionne. La catégorie LMP1 est très belle et le GTE très prometteur.”
En tant qu’ancien pilote, la Balance de Performance est une bonne chose ?
“Ce n’est pas la partie la plus simple à gérer. Selon moi, il faut encore plus de communication sur le sujet. L’homme doit reprendre son statut en revenant sur le devant de la scène. C’est comme si on tente de courir avec un élastique dans le dos. On court, l’élastique se tend mais on est toujours tenu. Les plus belles années du Mans mettaient en avant la stratégie et la cohésion de l’équipage. L’homme doit faire la différence.”
Porsche a battu en début de semaine le record de la piste avec une 919 Hybrid Evo. Qu’en pensez-vous ?
“Il faut comparer ce qui est comparable. La 919 Hybrid n’était plus en configuration FIA WEC. Faites la même chose avec une Formule 1 et le chrono sera encore plus bas. Comme je l’ai déjà dit, je suis favorable à ce que les premiers tours d’une course se fassent sans restriction même si pour cela il faut plusieurs constructeurs en LMP1 hybride. En agissant de la sorte, le pilote serait mis en avant et le spectacle assuré.”
L’ACO et la FIA travaillent sur la future réglementation. Êtes-vous favorable à un retour des GTP ?
“C’est une bonne chose. Le public a toujours aimé s’identifier à une auto du Mans. J’espère que, si le projet va au bout, cela incitera d’autres constructeurs à venir. Pourquoi pas faire aussi en sorte que les autos soient plus joueuses avec des pneus qui permettraient que les voitures bougent un peu plus.”
Vous vous attendez à des 24 Heures du Mans ennuyeuses ?
“Pas du tout ! Je m’attends même à une édition 2018 surprenante. L’incertitude est là. Toyota a une pression bien plus supérieure aux années précédentes, elle est diabolique. Il ne faut surtout pas croire que la course est gagnée avant le départ. C’est le cas en LMP1, LMP2 et GTE. Pour gagner les 24 Heures du Mans, il ne faudra pas laisser échapper le moindre mètre…”