Le quadruple champion du monde de Voitures de Tourisme et patron de sa propre structure, M Racing, était à Spa-Francorchamps pour la Ligier European Series où l’équipe engage trois Ligier JS2 R et une Ligier JS P4. Nous avons fait un bilan avec Yvan Muller et sommes revenus sur l’arrêt du programme LMP3 et des conséquences du Covid-19 sur son écurie…
Pourquoi avez-vous décidé de vous engager en Ligier European Series ?
« Parce que j’ai une équipe et qu’il faut la faire travailler, c’est une raison importante. La LMP3, je ne l’ai pas oubliée car nous avons fait toutes les saisons de la LMP3 depuis ses débuts. Mais cette année, les nouvelles voitures, l’investissement important et deux / trois autres choses m’ont fait dire qu’il fallait que l’on fasse une année de break. La Ligier European Series arrivant, ayant des pilotes et des clients intéressés pour en faire, cela s’est fait de façon naturelle ! »
Après deux manches disputées avec Le Castellet et Spa, quel est votre regard sur ce championnat ?
« C’est bien, mais il y a des choses à améliorer, à faire progresser. Nous en avons déjà un peu parlé avec Ligier. Ce serait bien et dans l’intérêt de tous de s’asseoir autour d’une table et discuter des petites choses qu’il faudrait faire. C’est la première année, forcément il y a des réglages à faire. La base est bonne, il faut maintenant optimiser pour que les équipes et les équipes s’y retrouvent sans forcément gêner le promoteur ! »
Pour en revenir sur la LMP3. Qu’est ce qui a fait que vous n’êtes pas reparti en ELMS ?
« Quand nous avons décidé de stopper le LMP3, l’histoire du Covid-19 n’était pas aussi présente. Cela s’est décidé dans l’hiver 2019. Chaque fois que j’ai démarré une discipline où c’était l’année 1, je me suis souvent “bouffé les doigts”. Je me suis dit qu’il y avait de nouveau un gros investissement, j’ai aussi pris plus de responsabilités auprès de Cyan Racing et Lynk & Co qui me prennent du temps, j’ai d’autres activités extra sportives qui me prennent aussi du temps et je me suis dit qu’aujourd’hui, il n’était pas nécessaire de faire de la LMP3. Nous allons attendre la fin de l’année 1 de la nouvelle génération pour décider de l’avenir. Je ne sais pas de quoi sera fait 2021. »
Comme vous venez de mentionner, vous avez connu les LMP3 génération 1. Quel bilan en titrez-vous ?
« J’en suis plutôt satisfait. Même si nous avons fait quatre saisons, il y a là aussi des petites choses à améliorer. Nous nous sommes adaptés. On a pu le voir l’année dernière. Nous avons fait trois pole positions, cinq premières lignes sur six courses, mais on n’en gagne pas une, on ne fait pas un podium tout simplement parce que le Bronze a trop d’importance. C’est un gros problème. De nos jours, les bons Bronze sont ceux qui amènent le moins de budget alors qu’au départ, ce n’était pas prévu comme cela. Cela me pose un gros souci car, en 2019, je pense que nous avions la meilleure voiture comme les résultats en qualifications l’ont montré et notre première heure de course. Malheureusement après, cela se dégradait. C’est bien, il faut faire de la course avec des Silver et des Bronze, mais il faut ménager un peu la chose. Pour gagner en ce moment, il faut un Bronze qui a été déclassé, qui a été Gold il y a 20 ans et qui aujourd’hui ne paie pas. C’est ce que j’ai fait un jour, mais économiquement, c’est dur. Je ne cherche pas à gagner ma vie par le biais de mon équipe car j’ai d’autres activités qui me permettent de le faire, mais en revanche j’aimerais arrêter d’en perdre. »
Même chose avec le LMP2 qui a flambé ! Vous vouliez faire du LMP2 pendant un moment et amener votre équipe un jour aux 24 Heures du Mans. Ce n’est plus d’actualité ?
« Plus du tout ! Et je pense qu’avec les problèmes qui découlent de la pandémie de Coronavirus, il va peut-être falloir revoir les choses. Déjà quand les choses allaient bien, qu’il n’y avait pas de problèmes, c’était compliqué. Et, là, maintenant, il faut faire attention car tout est cyclique. Cela peut descendre aussi vite et si ce n’est plus vite que c’est monté. Il va donc falloir se réinventer un petit peu. La Ligier European Series peut être une bonne formule. Il faut de tout pour faire un monde. On avait atteint des budgets en LMP2 que personnellement que je n’étais pas prêt à prendre de risques. C’est trop important, parce que commercialement, je ne suis pas assez bon, que ma partie c’est la technique et, qu’à un moment donné, mon équipe est plus une passion et ma « danseuse » plutôt qu’un business. »
Quels ont été les impacts du Covid-19 sur M Racing ?
« Pendant les deux mois de confinement, tous les matins, je me levais plus serein que si j’avais investi de l’argent dans la nouvelle LMP3, si j’avais versé les engagements pour faire de l’ELMS, etc… Sinon, j’aurais été beaucoup plus inquiet. Aujourd’hui, on a l’élan de la saison 2020, donc cela continue, mais attention à 2021. Comment cela va être ? C’est pour cela qu’il faut rester prudent, que je me suis dit que j’allais revenir en 2021, mais actuellement, j’en suis beaucoup moins sûr. Donc, j’ai un peu anticipé, j’ai réinventé un peu les activités de l’équipe, en essayant de faire des activités un peu différentes, moins sportives, avec un peu plus de coaching, du driving, des test days, de la rénovation de voitures et peut être un peu moins de compétition. »
Allez-vous faire d’autres championnats dans l’année ?
« Non, vu le timing, c’est trop juste. Nous avions des plans B avec l’Ultimate, la Ligier France. Peut être qu’à la dernière course de Ligier European Series à Portimão, on restera pour la Ligier France le week-end suivant. »
Du coté plus personnel, allez-vous repartir en WTCR ?
« Oui, pour une nouvelle saison ! A mon âge, on ne fait plus que des contrats d’un an (rires). Ceci dit, on est au moins d’août et il faut que je regarde mon option. Cela fait bizarre de parler de cela alors que la saison 2020 n’a même pas commencé ! Nous allons avoir un championnat hyper condensé, nous allons rester en Europe car il est impossible d’aller à l’autre bout du monde. Nous allons faire six meetings, 17 courses au total. On va sauver les meubles, je regrette juste que l’on n’ait pas une vraie saison parce que c’était l’année où je pouvais faire avec mon neveu (Yann Ehrlacher, ndlr) une saison dans la même équipe, sous le même nom. Mais on ne va pas se plaindre non plus. Cependant, avec Yann (qui était présent à Spa, ndlr), on se disait que l’on en avait “marre” de voir les autres faire des qualifications. Certes, on met un casque et une combinaison mais on reste tout le temps dans le stand. Donc on en a “ras le bol” (rires) ! »